Colette Lallement-Duchoze

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Billet de blog 5 septembre 2021

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« First cow » de Kelly Reichardt (USA 2019)

« L’oiseau a son nid, l’araignée sa toile, et l’homme l’amitié » cette citation de William Blake, en exergue, servira de fil conducteur. First cow, une ode à la nature et à l'amitié! Prix du jury à Deauville en 2020, le film sort en salles en octobre 2021.

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« L’oiseau a son nid, l’araignée sa toile, et l’homme l’amitié », cette citation de William Blake, en exergue, servira de fil conducteur

Un cargo passe. Il  semble remonter le fleuve. Sur une de ses rives un chien creuse la terre à un endroit précis, sa maîtresse poursuivant la fouille découvre deux squelettes allongés côte à côte. Plan suivant : sur cette même terre, au même endroit,  200 ans auparavant, des mains cueillent des champignons. Ces mains sont celles de Cookie un cuisinier chargé de nourrir des trappeurs. Et plus tard dans sa recherche de baies il découvre un homme traqué, un Chinois qui redoute les représailles de Russes, il lui offre spontanément l’hospitalité…C’est le début d’une amitié.

Une relation dyadique où le savoir-faire de l’un épousera la subtilité mercantile de l’autre (fabrication et vente de beignets, préparés au lait de vache, la première introduite sur le territoire « first cow »), où les deux seront animés par la même foi en un avenir plus lumineux, et par la conviction d’un bonheur partagé, ailleurs que dans cet  Oregon encore « sauvage », sa concrétisation  exige….de l’argent !

 Terre à la glèbe arrachée, terre sans cesse retournée, terre alma mater, terre sépulture.

 Le long métrage de Kelly Reichardt, en commençant par l’épilogue (la fin d’une « aventure »), obéit ainsi à une structure circulaire, et ce choix narratif est éloquent. En mettant en exergue un geste séculaire -retourner la terre,  cueillir ses fruits, rechercher ses mystères et ses richesses – puis en privilégiant la relation entre deux hommes « à la marge » porteurs du rêve américain (?)….revisité, la réalisatrice affiche une démarche politique assez originale: ainsi pour « écrire » l’histoire des USA celle de la conquête de l’ouest, son « western immobile » ou plutôt son anti western se lit et s’écoute comme une ode à l’amitié et à la nature (ce que renforcent la musique du guitariste folk William Tyler, et le leitmotiv musical à l’autoharpe). Ce qui n’exclut nullement l’avidité la rapacité l’individualisme forcené de certains…

 Lumière automnale, chuchotements et susurrements de la forêt, douceur des paroles de Cookie destinées à la vache qu’il trait au clair de lune en toute illégalité alors que son « comparse » fait le guet, gros plan sur cet œil qui n’a plus rien de bovin mais qui reflète un destin, cargo qui fend le fleuve -dans les deux sens à l’instar de la réalisatrice qui « remonte » le temps-, une attention portée aux gestes les plus élémentaires de survie (avec effet de zoom), un rythme assez lent, un format 4/3, on est loin des mythes fondateurs de l’Amérique et de ces fameux grands espaces, devenus dans l’imaginaire collectif interdépendants des « westerns » !!!!

Un film à ne pas rater.

Actuellement visible sur Mubi, il sortira en salles en octobre 2021

De Kelly Reichardt 2019 (USA) 

Avec John Magaro (Otis "Cookie" Figowitz), Orion Lee (King Lu), Toby Jones (le facteur en chef), Ewen Bremner (Lloyd), Scott Shepherd (le capitaine), Gary Farmer (Totillicum), Lily Gladstone (la femme du facteur en chef), Alia Shawkat (la femme avec le chien), Dylan Smith (Jack), Clayton Nemrow (Clyde), René Auberjonois

Scénario : Kelly Reichardt et Jonathan Raymond d’après son livre The Half-Life

Prix du Jury Deauville 2020
 Vers 1820, un cuisinier solitaire voyage vers l’Ouest, jusqu’à l’actuel Oregon. Il y rencontre un immigrant chinois également en quête de fortune. Les deux montent un dangereux commerce impliquant de voler le lait de la vache d’un propriétaire terrien : l’unique et première vache du territoire.

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