Colette Lallement-Duchoze

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Billet de blog 11 juin 2025

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Another end de Piero Messina (Italie France G-B 2024)

"Après avoir survécu à l'accident qui a coûté la vie à la femme qu'il aimait, Sal ne vit plus que dans ses souvenirs. Il s'engage alors dans l'expérience Another End, qui promet d'atténuer le deuil en réanimant temporairement la conscience des personnes disparues. Sal retrouve ainsi l'âme de Zoé au travers d'une autre femme"

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avec Gael Garcia Bernal, Bérénice Béjo, Renate Reinsve

 Festival de Berlin 2024

Une technologie post mortem pour atténuer la souffrance du nevermore…Pourquoi pas ? c’est presque devenu un "marronnier" (mythologie, littérature et cinéma de science-fiction) avec ce questionnement ô combien existentiel  "que reste-t-il de l’amour lorsque l’être aimé n’est plus, mais que son souvenir persiste, réincarné et artificiellement prolongé"  Et voici que s’impose la figure de la femme aimée  disparue "ressuscitée" "(Eurydice Béatrice Rebecca ou Vertigo) même si dans ce film de Piero Messina la femme a un autre corps …

Une scène d’ouverture comme promesse augurale? . Une porte un judas un dos qui envahit l’écran et quand la porte s’ouvre la voisine accueille Sal avec déférence ; il va réparer la douche,  le  "mari" que l’on voit comme figé dans une lumière orangée, assis sur un fauteuil, n’y parvient pas…. Sal est décontenancé, le spectateur aussi quand quelques instants plus tard ce "mari" est dénudé emporté par des infirmiers, recouvert de la housse mortuaire, -l’épouse aura baisé tendrement ses lèvres. Profondeur de champ de l’obscur désormais, mélange de réalisme et de fantastique, comme si tout allait de soi…….

Dévasté par la douleur Sal acceptera le marché (dont sa sœur est la convaincante vrp )…mais en exigeant plus que le contrat …Bienvenue dans Another end cette entreprise commercialequi permet à une personne dévastée par la mort d’un proche d’atténuer sa douleur en réanimant temporairement la conscience et les souvenirs des personnes disparues en les transplantant dans des corps d’employé·es loués pour l’occasion

Las ! Malgré les belles interprétations de tous les acteurs - mention spéciale à Philipp Rosch dans le rôle du père de Zoé -,-malgré une mise en scène très "léchée", malgré la netteté et la rigueur des "cadres", malgré cette recherche d’une harmonie entre les décors aseptisés, les lumières diffuses, les mouvements feutrés et l’aspect flottant des personnages, malgré une tendance esthétique à la  " corporalité /corporéité"  dans l’épisode de Zoé/Ava en putain stripteaseuse, - on taira le twist final, prévisible et alambiqué à la fois,  malgré……l’ensemble peine à transmettre le frisson attendu, ou du moins à faire accepter l’invraisemblance dans un réel  revisité ou dans un réel devenu irréel (que la séquence liminaire avait illustré...)

Que dire par exemple de ces lits mortuaires à la verticale qui au début envahissent l’écran ? de ces couleurs mordorées des intérieurs avec ce filet de lumière sur les cheveux ou une partie du visage ? de ces propos du psychologue de pacotille (mais dont les contreplongées sont censées renforcer le rôle, le pouvoir du verbe ….dans les limites du contrat, bien entendu) de la trop grande importance accordée aux scènes "dissertatives" ? de ces "faux jeux de piste" que déclinent les angles droits croisés ou les effets spéculaires? une surenchère qui nuit au propos?

En voulant faire cohabiter conte philosophique, thriller sentimental et récit d’un désenchantement (sur l’amour ?) le film restera celui d’un paradoxe (à tel point que dans la seconde partie la traque nocturne s’épuise fébrile dans le grotesque après ….une apparition toute en lucioles de la stripteaseuse sortant des "ténèbres" )

Dommage !!

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