Monsieur le Professeur Henry Laurens,
Nous, juives et juifs d’horizons et d’opinions diverses, mais unis pour le respect des droits du peuple palestinien, avons appris avec stupeur et colère l’annulation du colloque La Palestine et l’Europe : poids du passé et dynamiques contemporaines et sa délocalisation imposée. Cette décision prise par l’Administrateur du Collège de France, sous la pression de soutiens indéfectibles à la politique israélienne relayés de façon inacceptable par le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, prend prétexte d’une entorse supposée à une « objectivité » plus journalistique qu’universitaire pour porter une atteinte grave à la liberté de la recherche. Nous nous réjouissons de constater les nombreuses protestations qu’a déjà entraîné cette décision, notamment celle de votre collègue François Héran, de France Universités, de la Ligue des droits de l’Homme, ainsi que la pétition initiée par Yaani, et d’autres qui suivront assurément.
Dans cette période troublée où les faits établis sont trop souvent contestés, l’emploi de termes comme « crimes de guerre », « crimes contre l’humanité » ou « génocide », est immédiatement suspecté et accusé d’antisémitisme lorsqu’ils sont reprochés au gouvernement israélien et à son armée. Vos travaux, comme tous les travaux universitaires, sont indispensables pour éclairer la connaissance et le dialogue entre opinions qui peuvent être par ailleurs divergentes.
Nous ne défendons pas de solution toute faite pour résoudre ce conflit, mais nous sommes convaincus que la reconnaissance des droits du peuple palestinien est une condition sine qua non pour s’orienter vers une paix à construire avec tous les peuples de cette terre meurtrie. Ceci passe naturellement par l'arrêt effectif des massacres, de la colonisation et des atteintes au droit international et humanitaire. Cela suppose aussi une connaissance et reconnaissance des faits qui se déroulent depuis plus d’un siècle dans cette région.
Nous tenons à vous assurer, monsieur le Professeur, de notre pleine solidarité. Nous vous remercions également pour l’ensemble de vos travaux. Ces remerciements s’adressent également à l’ensemble de la communauté universitaire dont le travail et la liberté académique sont indispensables à une démocratie vivante.
Premiers signataires :
Edgar Blaustein, Alain Champaux, Catherine Chif, Michèle Driguez, Gilbert Elkaïm, Nicole Fayman, Georges Yoram Federmann, Bernard Fischer, Claire Gaspard, Dominique Glaymann, Laurent Kahane, Pierre Khalfa, Naïm Ksibi, Daniel Kupferstein, Danièle Lochak, Hervé Loichemol, Monique Michaëlis, Patrick Michaëlis, Mustapha Nadi, Véronique Nahoum-Grappe, Michel Ouaknine, Yves Péquin, Antoni Silberstein, Jean-Claude Soufir, Léa Szapiro, Claude Szatan, Pascale Thomas, Michèle Zemor, Agnès Zissmann, Nadia Zouiten