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Billet de blog 17 juillet 2023

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Loin des yeux, près du cœur

Depuis la fin de la trêve hivernale, et la fin de la prise en charge systématique de toutes les familles avec enfants mineurs par la Préfecture d'Ille-et-Vilaine, un nouveau campement et de nombreux enfants sont installés dans un parc, aux portes de Rennes. Pour se souvenir que les vacances n'ont pas le même charme pour tout le monde, voici les témoignages de certains d'entre eux.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Illustration 1

C’est une histoire de refoulés, de marginaux malgré eux. À l’extrémité d’un parc, en périphérie de la ville, dans un bois, autour d’une clairière plantée de fragiles tentes, ils sont là.

Mais sauf à les y chercher, on ne les voit pas. Et à vrai dire, ça tombe bien.

Qui veut les voir ?

Lorsque nous croisons la détresse, nous préférons, individuellement, détourner le regard d’une évidente faillite collective, et choisissons (ou plutôt subissons) l’évitement comme mécanisme de défense.

Fermer les yeux ne résout rien. Pas plus que l’accumulation de mesures toujours plus répressives envers ces femmes, ces hommes, ces enfants qui ont quitté leur pays pour venir en France.

Construisez des murs. Expulsez-les en espérant les décourager. Celles et ceux qui ont un jour décidé de fuir une condition qu’ils jugeaient indigne pour eux et pour leurs enfants, reviendront.

Exhortez les Français à être fiers de leur pays. Tant que perdureront de telles injustices, peut-être continuerons-nous à baisser les yeux pour éviter la douleur et la honte. Mais, peine perdue : c’est bien l’image d’un pays flétri qui persistera sur nos rétines.

Nous ne sommes pas résignés, et avons d’autres ambitions. Et nous espérons d’abord une rentrée scolaire dans des conditions décentes pour tous les enfants de ce pays.

En attendant septembre, nous avons décidé de vous partager les réflexions, les doutes, les peines, les aspirations de certains enfants de ce campement. Dans votre bureau ou sur votre lieu de vacances, loin des yeux, près du cœur.

Illustration 2

Je m’appelle Y.. J’ai 9 ans. J’ai une maladie qui me rend très vulnérable. Pourtant, je dors dans une tente. J’ai commencé à apprendre la guitare, j’espère que la pluie ne va pas revenir car elle ne sera pas bien protégée dans ma tente.


Je m’appelle V.. J’ai 7 ans. Ma tente est sous les arbres, j’ai eu très peur pendant les orages. Le 115 dit toujours qu’il n’y a pas de place à ma maman. Pourtant, elle appelle tous les jours.


Je m’appelle G.. J’ai 5 ans. Il fait chaud pendant la journée, ici, mais c’est loin pour aller chercher de l’eau. Les bidons sont lourds. Je croyais qu’aucun enfant ne devait dormir à la rue. J’en suis un !


Je m’appelle A.. J’ai 13 mois. Ma maman me donne des biberons froids car il n’y a pas d’électricité ici, et elle change mes couches en m’allongeant dans l’herbe. Ma maman passe sa journée à me courir derrière. Je me plais bien dans les bras de tout le monde, mais je sens bien que ma maman est stressée de la situation.


Je m’appelle T.. J’ai 8 ans. J’adore aller au centre de loisirs, car là-bas, j’oublie que le soir je dors dans une tente. Mais, surtout, je m’amuse et je peux manger un repas normal le midi.


Je m’appelle V.. J’ai 5 ans. J’ai peur, la nuit. Il n’y a pas de lumière dans le parc et il y a des bruits bizarres qui m’empêchent de bien dormir.


Je m’appelle G.. J’ai 11 ans. En septembre je rentre en sixième. Ma maman a des problèmes de santé. Pourtant, nous dormons dans une tente. C’est l’été, pour l’instant, mais que se passera-t-il en octobre, quand reviendra le mauvais temps ?


Je m’appelle E.. Je suis née aujourd’hui. Dans quelques jours, je vais rejoindre mon frère et ma sœur dans la tente de notre famille, qui fait office de maison depuis 6 semaines déjà. Papa n’est pas dans son assiette et il appréhende le retour de maman qui aura du mal, avec sa cicatrice de césarienne, à s’occuper de nous trois.


Je m’appelle A.. J’ai 9 ans. L’année dernière, j’ai dormi dans une tente pendant un mois. Je ne croyais pas que j’y retournerais aussi vite. Mes parents sont occupés tous les jours à nous trouver à manger. Ce n’est pas facile car nous n’avons pas de place ni de frigo pour stocker, il faut recommencer tous les jours.


Je m’appelle K.. J’ai 3 ans. Je ne comprends pas bien ce qu’il m’arrive. Mon papa est stressé, il est diabétique. Il a besoin d’un frigo, mais il n’y en a pas dans notre tente. Alors il doit aller à l’hôpital pour prendre ses médicaments. Je n’ai pas envie de rester ici mais je n’ai pas le choix. Je traîne mon doudou partout avec moi mais ça ne suffit pas à me rassurer.


Je m’appelle D.. J’ai 10 ans. Le camping, c’est marrant pour les vacances. Plusieurs jours, qui vont devenir des semaines puis des mois, ça l’est beaucoup moins. Je suis né en France et, comme mon frère, je ne connais pas le Nigeria. Mon papa a reçu l’asile et nous allons continuer à grandir en France. Alors, il serait normal que nous obtenions enfin un logement.


Je m’appelle O.. J’ai 3 ans. J’ai tout plein de copains dans les tentes voisines, mais ce soir, ça va être difficile de trouver le sommeil. Je n’ai pas de chambre, je dors collé à mon frère et à mes parents.


Je m’appelle A.. J’ai 13 ans. Je suis en vacances depuis un mois, j’en ai enfin fini avec les trajets de presque une heure pour aller en cours, au collège. Mais les journées sont longues à attendre que le temps passe. Ma maman n’en voit pas le bout.


Je m’appelle E.. J’ai 9 ans. Depuis un mois et demi, je fais mes devoirs dans ma tente, je n’ai pas de bureau. Je n’ai pas eu envie d’être inscrit au centre de loisirs car ces dernières semaines, j’ai déjà beaucoup marché pour rejoindre mon école à l’autre bout de la ville.


Je m’appelle T.. J’ai 8 ans. Je suis un excellent danseur, mais ici, je n’ai pas très envie de danser. Ma tente est trop petite pour mes parents et moi, j’ai hâte qu’une autre solution arrive mais personne ne sait me dire quand.


Je m’appelle K.. J’ai 9 ans. J’irais bien au centre de loisirs pendant les vacances, mais on dort très mal dans la tente, avec les moustiques et le manque de place. Avec ma sœur, nous avons trop de mal à nous lever tôt.


Je m’appelle R.. J’ai 6 ans. Dans un mois, je fêterai mon anniversaire et ma maman ne pourra pas me cuisiner un gâteau. Il n’y a pas de four dans la tente. En plus, ils n’ont pas d’argent car d’ici novembre, ils n’auront aucune aide. J’entends trop souvent qu’il faut attendre.


Je m’appelle L.. J’ai 7 ans. L’an dernier, j’ai dormi pendant plusieurs semaines dans une tente. Depuis que nous sommes sortis du CADA (Centre d’Accueil de Demandeurs d’Asile), et comme au moins treize autres enfants, je dors dans la voiture de mon papa car ma maman attend un bébé et a peur de dormir dans une tente qu’on ne pourra pas fermer à clé.


Je m’appelle L.. J’ai 11 ans. L’année scolaire a été difficile et s’est finie plus tôt pour moi que pour les autres élèves. Une tente n’est pas une solution acceptable pour y vivre, mais nous n’avons pas le choix.


Je m’appelle D.. J’ai 4 ans. Je n’ai pas compris pourquoi on nous a mis dehors de notre logement, et je me demande combien de temps je vais rester ici.


Je m’appelle M.. J’ai 11 ans. Mes parents ne peuvent pas retourner pas en Géorgie : ils se sont mis en sécurité en France, mais pourtant personne ne veut de nous ici. Ma copine est partie dormir dans une école avec son frère, mais ça n’est pas possible pour moi car, dans mon école, la place est déjà prise par une famille avec cinq enfants qui n’a pas d’hébergement non plus.


Je m’appelle S.. J’ai 15 ans. J’ai obtenu mon brevet avec brio, je rentre au lycée en septembre et je vais devoir préparer ma rentrée dans une tente. J’ai grandi en France, seule avec ma maman, ce qui nous rend vulnérables toutes les deux.


Je m’appelle F.. J’ai 13 ans. J’attends une place dans un collège depuis avril. Les journées sont ennuyeuses dans ma tente. J’ai des copains, mais j’ai bien conscience que la situation n’est pas normale et ça me tracasse.


Je m’appelle E.. J’ai 3 ans. Je ne serai bientôt plus le dernier de la fratrie car ma maman attend un bébé pour novembre. Pourtant, toute ma famille dort dehors.


Je m’appelle K.. J’ai 5 ans. Je dors dans une tente depuis trois mois, et cela va durer au moins le double. Maman en a marre, et moi aussi. C’est trop loin pour aller prendre une douche, encore plus loin pour aller prendre le bus.


Je m’appelle L.. J’ai 6 ans. J’ai la même maladie que mon frère, et pourtant, je dors aussi dans une tente. Ma maman est diabétique. Je crois que c’est dangereux de rester là, mais dans la voiture c’était trop serré pour nous cinq et demi.


Je m’appelle K.. J’ai 15 mois. Je n’ai pas encore une marche très assurée, et cette clairière pleine de tentes et de personnes inconnues me fait peur. Ma maman a vécu des horreurs dans les camps au Burundi, arriver ici la rend très nerveuse et angoissée. Du coup, moi aussi, et je pleure beaucoup.

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