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Billet de blog 28 novembre 2024

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Quand la gauche britannique se réveille face au suicide assisté

Les membres de la Chambre des communes débattent le 29 novembre d’une proposition de loi légalisant le suicide assisté. Plusieurs figures du parti travailliste se désolidarisent de leur majorité en pointant les risques d’une telle législation sur les plus vulnérables, sur la relation de soin ou encore sur le système de santé.

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Dans l’esprit de ses promoteurs, la légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté serait un inéluctable « progrès » et les motivations de ses opposants ne seraient fondées que sur des convictions religieuses ou sur une forme de corporatisme médical. Le débat en cours au Royaume-Uni vient battre en brèche ce poncif.

Les parlementaires de la Chambre des communes doivent se prononcer vendredi sur une proposition de loi légalisant le suicide assisté. Le dispositif proposé est bien plus encadré que ce que prévoyait le gouvernement français en avril dernier, tant dans les critères d’éligibilité que dans la procédure.

Pour autant, malgré ces précautions, de nombreuses voix s’élèvent au sein même de la majorité de gauche pour dénoncer ce texte. D’après The Telegraph (22 novembre), un tiers des membres du gouvernement Starmer (dont la vice-première ministre) s’apprêtent à voter contre la proposition de loi. Des personnalités travaillistes de premier plan expriment leurs inquiétudes quant aux conséquences de la légalisation du suicide assisté sur les plus vulnérables, sur la relation de soin ou encore sur le système de santé.

Une loi qui menace les plus vulnérables 

La première motivation de l’opposition travailliste au texte se fonde sur des préoccupations éthiques de protection des plus vulnérables. La charge la plus lourde vient de l’ancien Premier ministre Gordon Brown qui, dans une tribune publiée le 22 novembre dans The Guardian, a déclaré : « Une loi sur l'euthanasie, même bien intentionnée, modifierait l'attitude de la société envers les personnes âgées, gravement malades et handicapées ». En 2015, le chef du Labour Jeremy Corbyn déclarait également : « Je ne pense pas que nous devrions parler d'aide à la mort tant que nos systèmes d'aide sociale et de soins de santé n'auront pas été suffisamment améliorés, en mettant l'accent sur les malades et les personnes âgées »


Plusieurs voix de gauche telles que la secrétaire à la Justice Shabana Mahmood dénoncent un « service public de la mort » qui, même involontairement, pourrait encourager certaines personnes à choisir la mort en raison de pressions économiques et sociales. Jane Campell (membre de la Chambre des Lords et militante pour les droits des personnes handicapées) et Liz Carr (actrice et militante anti-validiste) alertent particulièrement sur les dangers d’une légalisation sur les personnes handicapées. La championne paralympique et membre de la Chambre des Lords Tanni Grey-Thompson a demandé « instamment » aux parlementaires de prendre en compte le « virage considérable » qui serait pris dans « notre conception de la prise en charge des personnes les plus vulnérables. »

Des inévitables dérives

D’ailleurs, les opposants pointent les nombreuses extensions des législations étrangères. Le ministre de la Santé évoque une « pente glissante qui fait froid dans le dos ». Dans une tribune commune, la travailliste Diane Abbott (première femme noire élue à la Chambre des communes) et le conservateur Edward Leigh, respectivement doyenne et doyen de la Chambre, soulignent qu' « aucune garantie ne peut empêcher les abus d’une loi sur l'aide médicale à mourir ». En effet, « les pays qui ont légalisé cette pratique ont constaté une augmentation des morts administrées, y compris chez des personnes souffrant de troubles mentaux ou de handicaps ».

Un système de santé en crise

Enfin, ces voix de gauche redoutent les conséquences de la légalisation sur le système de santé. Le ministre de la Santé Wes Streeting a affirmé ainsi sa ferme opposition au texte : « je détesterais que des gens optent pour l'aide à mourir parce qu'ils pensent qu'ils font économiser de l'argent à quelqu'un quelque part, qu'il s'agisse de leurs proches ou du NHS (National Health Service) ». Gordon Brown s’inquiète également « d'une législation qui impose à un médecin, dont le rôle a toujours été de préserver et de prolonger la vie, d'administrer la mort comme l'acte final d'une procédure bureaucratique ». Selon un sondage récent, seuls 31 % des Britanniques pensent que le gouvernement sera en mesure de financer leurs soins en fin de vie à l'avenir et 53 % des personnes estiment qu'étant donné l'état du système de santé public, la légalisation de l'aide à mourir pousserait les gens à y recourir.

La pression des activistes pro-euthanasie

Le Premier ministre Keir Starmer a garanti une « liberté de conscience » à sa majorité sur ce texte. Il n’a d’ailleurs pas précisé la teneur de son vote. Pour autant, les pressions s’intensifient sur les parlementaires indécis. The Times a révélé qu’une « opération matraquage » était en cours, avec une très forte pression sur les élus Labour, menacés de « perdre leur siège » s’ils votaient contre cette loi. L’organisation Dignity in Dying (l’équivalent britannique de l’ADMD) a dépensé plus de 200 000€ en publicités Facebook et Instagram durant les 90 derniers jours. Dans ces conditions, les parlementaires seront-ils vraiment libres de leur vote ?

L’issue du scrutin de vendredi apparaît incertaine. Il y a fort à parier que les intenses pressions auront réduit au silence les réticences de certains parlementaires. Toujours est-il que le débat britannique aura eu le mérite de nous montrer que la question de la mort provoquée transcende largement le clivage droite-gauche.

Qui sommes-nous ?

Collectif Jusqu'au bout Solidaires: Nous, soignants, militants et citoyens engagés, affirmons que ces pratiques ne représentent pas un progrès social, mais un abandon des principes de solidarité et d'humanité.

Nous refusons de voir l'euthanasie et le suicide assisté comme des solutions au manque de soins et de soutien. Nous appelons à un renforcement du service public de santé, à la mise en place de mesures favorisant l'accompagnement digne des personnes en fin de vie, et à une réflexion collective sur les valeurs qui doivent guider notre société. La solidarité, l'entraide et l'humanité doivent rester au cœur de notre engagement. L'euthanasie n'est pas un progrès social ; elle est un symptôme de l'abandon des plus fragiles. Opposons-lui la solidarité et la vie.

https://collectif-jabs.fr/manifesto.html

Collectif Lutte et Handicaps pour l'Egalité et l'Emancipation (CLHEE): 

Nous sommes un groupe de militants et d’activistes directement concernés par le handicap. Nous faisons l’amer constat qu’en France aucun mouvement militant, activiste et autonome de défense des personnes handicapées n’a pu voir le jour et s’installer durablement dans le paysage des luttes d’émancipation. Force est, en effet, de constater qu’aucune organisation politique, y compris à gauche, ne s’est montrée jusqu’ici capable de se départir d’une vision humanitaire, compassionnelle, voire caritative du handicap, pour l’envisager comme un sujet politique et social à part entière, et élaborer des propositions à la hauteur des enjeux en présence.

https://clhee.org/

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