Rémunération des enseignants : « monter un escalator qui descend »

Malgré les annonces récentes, 70 % des enseignants verront leur pouvoir d’achat diminuer en décembre 2023 par rapport à décembre 2022.

C'est le résultat choc de notre dernière étude sur la rémunération des enseignants : « monter un escalator qui descend ». 

On vous explique. 

Travail de fourmi depuis un an et demi, nous avons reconstitué intégralement la carrière de Sophie, Nadia et Maxime, enseignants du secondaire.

Cette étude, publiée aujourd'hui, est très riche d'enseignements sur l'évolution de leur rémunération... et sur les annonces récentes. 

En principe, à mesure qu’ils gagnent en expérience, les professeurs progressent dans leur grille. Ils franchissent des échelons censés leur apporter des revalorisations salariales. En réalité, une fois passées les 3 premières années, leur pouvoir d’achat tend à stagner. 

En effet, à partir de 2000, la valeur du point d’indice a été sous-indexée par rapport à l'inflation. Il a même été gelé depuis 2010. Ce décrochage de la valeur du point touche l'intégralité des fonctionnaires. Dont Sophie, Nadia et Maxime, les trois enseignants de notre étude. 

Ainsi, avec respectivement 8 et 16 ans d’ancienneté comme profs certifiés, Maxime et Nadia disposent en 2023 d’un pouvoir d’achat équivalent à celui de leur 1ère année d'enseignement. Agrégée en poste depuis 2000, Sophie gagne à 46 ans un pouvoir d’achat égal à celui de 2015. 

En cumulé, la sous-indexation chronique du point d’indice depuis le début 2000 a conduit des pertes massives de pouvoir d'achat pour les enseignants. Pour Sophie, Nadia et Maxime, entre 8 et 23 ans d'expérience, ces pertes sont comprises entre 18 000€... et 70 000€.

Au fond, la sous-indexation du point conduit à remettre en cause le principe même d'augmentation salariale selon l’expérience professionnelle.

Les promotions d’échelons ont pour principal effet de stabiliser le salaire réel. Les enseignants "montent un escalator qui descend".

C'est dans ce contexte, qu'il faut analyser les récentes annonces sur la rémunération des enseignants : les mesures se situent en effet dans le prolongement des évolutions salariales depuis 2017 : des augmentations forfaitaires, concentrées sur les débuts de carrière.

Pour Maxime et les 30% des professeurs les + jeunes, ces augmentations amélioreront le pouvoir d'achat... en 2023. Cette hausse sera temporaire : - la prime d'attractivité diminuera quand ils passeront les échelons - la hausse de la prime ISOE sera grignotée par le gel du point. 

Pour Nadia, Sophie et 70% des enseignants (plus de 15 ans d'ancienneté), la revalorisation de 92€ promise ne neutralisera même pas les effets de l’inflation 2023.

Ainsi, même avec l’effet des annonces, leur pouvoir d’achat sera inférieur fin 2023 à ce qu’il était en décembre 2022. 

Dans un contexte de crise d’attractivité du métier, les annonces ne constituent pas une "revalorisation" : elles conduiront principalement à limiter la baisse du pouvoir d'achat des enseignants.

Pas sûr que cela aide beaucoup à redonner du sens à leurs missions ? A suivre.

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La note intégrale est accessible sur le site du collectif Nos services publics : https://nosservicespublics.fr

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