Depuis une modification législative du code de santé publique en 2007 ayant introduit un « notamment » dans la liste des personnes autorisées à saisir le conseil de l'ordre des médecins (COM), les employeurs se sont mis à contester fréquemment devant le COM les certificats médicaux qui font état de pathologies en lien avec le travail (1)(2).
Ces certificats leur parviennent quand le patient les produit dans des procédures aux prud'hommes ou en justice ou en cas d'intervention de la médecine du travail.
Le conseil de l'ordre des médecins instruit le plus souvent ces plaintes, sous prétexte qu'« il est interdit au médecin d'attester une relation causale entre les difficultés familiales et professionnelles, et l'état de santé présenté par le patient » (rapport d'octobre 2006 du COM sur la rédaction des certificats médicaux).
Une conciliation est organisée par le conseil de l'ordre départemental au cours de laquelle le médecin est sommé de se dédire sous peine d'être envoyé au conseil régional pour jugement. Cette intimidation fonctionne hélas très souvent et les médecins modifient leurs certificats.
Ceux qui refusent sont donc jugés par la chambre régionale du conseil de l'ordre des médecins et souvent condamnés à un avertissement et une amende.
Ce fut le cas en 2017 du docteur Dominique Huez (2) médecin du travail, qui a été attaqué par une entreprise privée pour avoir fait un certificat reliant les pathologies d'un salarié à ses conditions de travail.
Ce dernier a pu faire valoir ses droits aux Prud'hommes et l'entreprise a été déboutée.
Mais le docteur Huez a été condamné par le conseil de l'ordre, peine confirmée en appel au niveau national et l'entreprise a pris prétexte de cette condamnation pour demander au Docteur Huez des dommages et intérêts !
Dans ce domaine comme dans d'autre le rôle du conseil de l'ordre des médecins va à l'encontre de la santé publique et des droits des patients.
Le conseil de l’ordre doit être dépossédé de ces prérogatives et arrêter d'accepter ces plaintes.
Les employeurs pourront faire appel auprès de la justice qui pourra rechercher la réalité des faits et instruire de manière contradictoire le contentieux.
Il est sans doute plus simple pour eux de se plaindre auprès du conseil de l'ordre des médecins où l'instruction n'est ni publique ni contradictoire et ou ne seront pas évoqués les éventuels manquements à leurs obligations de santé et de sécurité des salariés.
Face aux nombreux dysfonctionnements de l'ordre des médecins, nous réclamons donc sa dissolution mais nous ne réclamons pas une dérégulation complète de l’exercice médical, ce qui serait préjudiciable à la santé publique. Nous demandons en revanche un contrôle plus démocratique et plus juste du pouvoir médical. Il existe déjà des institutions et organismes publics pouvant assurer ces missions, sous réserve de leur donner les moyens humains et financiers à la hauteur.
Nous appelons soignant.e.s et habitant.e.s à se joindre à nous pour demander la dissolution de l’ordre des médecins (4) et le transfert des missions ordinales actuelles à des institutions publiques.
1) Alain Carré, Soutien aux lanceurs d’alerte , Revue Pratiques , janvier 2017 , N° 76 : https://pratiques.fr/Soutien-aux-medecins-lanceurs-d
2)Association santé et médecine du travail ( ASMT) : analyse des décisions des instances disciplinaires et l’ordre des médecins : de graves dysfonctionnements liés à leur statut de juridiction d’exception : http://www.a-smt.org/2018/2018-07-AC-Analyse.des.decisions.CO.pdf
3) Dominique Huez, Instruire et attester du lien santé-travail Revue Pratiques , mai 2015 N° 69 : https://pratiques.fr/Instruire-et-attester-du-lien-sante-travail
4) Pétition « Dissolution de l’ordre des médecins » : https://www.change.org/p/emmanuel-macron-dissolution-de-l-ordre-des-m%C3%A9decins