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Billet de blog 17 décembre 2023

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Le logement : un état d'urgence pour les familles monoparentales

Non relogement des familles précaires dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville ; feu vert du gouvernement pour une hausse des loyers pouvant aller jusqu’à 3.5% ; expulsions, mal-logement, surendettement… Chronique d’une noyade assurée pour les familles monoparentales !

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Quand le mal-logement devient le lot quotidien des foyers monoparentaux 

Selon une enquête du Défenseur des droits, une famille monoparentale est deux fois plus exposée à la discrimination dans la recherche d’un logement qu’une famille biparentale[1]. La monoparentalité est une question genrée, qui touche à 83% des mères[2]. Si aujourd’hui 25% des familles françaises sont des familles monoparentales, 55% de ces familles sont pauvres et 40.5% d’entre elles vivent en dessous du seuil de pauvreté[3]. Ces mères isolées et leurs enfants sont-ils condamnés à la précarité ?

L’accès à la propriété est pour ces foyers monoparentaux une gageure (seuls 20% d’entre eux accèdent à la propriété, contre 48% des foyers traditionnels). En conséquence, 39% des familles monoparentales sont locataires d’un logement social (contre 14% des familles traditionnelles). 21% d’entre elles sont touchées par le mal-logement[4]. Ces familles sont surreprésentées dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, ainsi que dans les hébergements d’urgence. L’hébergement d’urgence est-il une solution ?

Les services d’urgence sont saturés. On dénombre, à titre d’exemple en Seine-Saint-Denis, seulement 8 établissements d’accueil mère-enfant sur 165 à l’échelle de la France (autant qu’en Creuse). Les moyens d’accompagnement social donnés sont largement insuffisants au regard de problématiques toujours plus nombreuses, invisibilisées et minorisées attenantes à la monoparentalité.

Des politiques de la ville qui accroissent les inégalités

La monoparentalité est une réalité exponentielle qui n’est que rarement prise en compte par les politiques de la ville menées actuellement. En outre, les logiques de « gentrification » dans certaines zones péri-urbaines vont à l’encontre des nouvelles politiques de l’ENRU qui obligent à un quota de 25% de logement sociaux. L’Etat en sus a autorisé une hausse des loyers pouvant aller jusqu’à 3.5%. Le bailleur social Plaine Commune Habitat à Saint-Denis vient à titre d’exemple d’entériner une hausse maximale de 3.5%. Jusqu’où ira la hausse des prix ?

Hausse des prix du logement : un gouffre budgétaire pour les familles monoparentales.

La hausse du coût de l’énergie, chiffrée selon le rapport de l’IRES[5] à + 41.9% de 2014 à 2022, a fait exploser le coût des dépenses logement. A cela il faut ajouter une hausse de 17.7% des charges d’assurances et une hausse de 14% des charges d’immeuble.

Cette étude qui met en regard les chiffres de l’ONPES établis en 2014 et ceux de 2022 pose l’inflation comme étant le noyau de nombre de problématiques rencontrées par les français qui ne parviennent de fait plus à se loger décemment. Les familles monoparentales s’en trouvent très lourdement impactées.

Le poste budgétaire logement représente entre 24% et 40% des dépenses selon la configuration des foyers. Les prix du parc locatif conduisent nombre de familles monoparentales à des situations de surendettement. De plus les problématiques liées à la monoparentalité obligent souvent les mères isolées à des temps partiels subis (pour 42% d’entre elles), à des CDD (pour 20% d’entre elles)[6], voire à un abandon de carrière forcé, qui mènent inévitablement à l’impasse : la rue.

Faut-il répondre par toujours plus de fermeté ? NON à la double punition, OUI à nos propositions.

À l’heure où Elisabeth Borne vient d’annoncer que les préfets devaient cesser d’attribuer des logements aux plus précaires afin de favoriser la « mixité sociale » dans les quartiers prioritaires, il semblerait au contraire urgent d’enrayer ce continuum des violences économiques, sociales et politiques dont les mères isolées et leurs enfants sont inlassablement victimes.

La Collective des Mères Isolées a donc remis entre les mains du gouvernement une Proposition de loi[7] qui demande en premier lieu la création d’un statut de parent isolé et décline 10 propositions en vue de la reconnaissance des droits les plus fondamentaux afférant en matière de santé, d’éducation, de culture et notamment de logement.

En matière de logement, la Collective des Mères Isolées demande que les parents isolés puissent bénéficier d’une majoration des prêts à taux zéro pour leur permettre d’acquérir plus facilement un logement en prévision de leurs retraites précaires. Elle demande que la situation des parents isolés, qui sont en grande majorité des femmes aux carrières professionnelles tronquées, soit prise en compte également de façon prioritaire dans les critères d’attribution des logements sociaux.

Enfin, puisque 80% des femmes victimes de violences sont des mères[8], il semble indispensable que ces situations soient prises en compte prioritairement en matière de logement ou de relogement et que les moyens alloués à l’hébergement d’urgence soient repensés.

C’est une question d’égalité femmes/hommes, autant qu’une question d’égalité des chances pour 4 millions d’enfants. Les inégalités de traitement en France en matière d’accès au logement sont avérées et caractérisées, créant des disparités territoriales marquées, impactant plus particulièrement les mères isolées et les enfants issus des territoires ruraux, de banlieue et des DOM TOM.

Aussi nous saluons la coalition transpartisane sénatoriale et parlementaire qui fait front autour de cette proposition de loi afin de donner de la voix à celleux qui n’en ont pas.

[1] Rapport du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge, Panorama des familles d’aujourd’hui, 28 septembre 2021, p.71 (https://www.hcfea.fr/IMG/pdf/rapport_-_le_panorama_des_familles_2021.pdf)

[2] Rapport du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge, Panorama des Familles d’aujourd’hui, 28 septembre 2021, p.64

[3] Étude publiée par l’Institut de Recherches Economiques et Sociales, publication n°24 de novembre 2022

[4] Étude publiée par l’Observatoire National de la Pauvreté et de l’Exclusion Sociale en 2014-2015 (https://onpes.gouv.fr/IMG/pdf/WEB_Rapport_2014_2015.pdf)

[5] Étude de l’ONPES rapportée par l’IRES, publication 24 de novembre 2022.

[6] https://www.insee.fr/fr/statistiques/5422681

[7] Consultable sur le blog Médiapart de l’association : https://blogs.mediapart.fr/collective-des-meres-isolees/blog/110923/proposition-de-loi-pour-la-creation-dun-statut-de-parent-isole

[8] https://www.vie-publique.fr/rapport/269827-etude-nationale-sur-les-morts-violentes-au-sein-du-couple-2018

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