Je vais me pencher sur ceux qui professent à son égard une haine solide teintée de mépris - Le reproche qu'on lui fait le plus souvent est d'être dépassé. On dit qu'il a pu avoir, jadis, un certain intérêt. Mais, voilà, les années ont passé, et l'apport de Guillemin, s'il y en a jamais eu un, est complètement obsolète. Passé de mode. Vieilli. Défraîchi. Tout juste bon à dormir sur un rayon inaccessible d'une bibliothèque. On dit aussi que les historiens ont découvert d'autres documents, ils ont une manière différente de faire de l'histoire. Un homme du passé, Guillemin, tout empêtré dans des catégories qui n'ont plus d'usage - classes dominantes, classes dominées, lutte des classes. Du balai. Passons à autre chose. D'ailleurs, injure suprême, il n'est même pas historien.
Mais, justement, Guillemin ne passe pas, il reste bien là ! Il continue, c'était déjà le cas de son vivant, à rester en travers de la gorge de beaucoup. Toujours les mêmes, d'ailleurs, plutôt du côté des nantis que des pauvres gens. Difficiles pour eux d'avaler ses portraits au vitriol des héros de notre roman national, difficiles à digérer ses coups de gueule contre les mensonges intéressés, difficiles à accepter les réhabilitations de ceux qu'on nous a toujours présentés comme d'affreux ennemis de l'ordre et de la nation.
Et, du même coup, autant il ne passe pas, autant il apparaît même d'une modernité salutaire, en un autre sens qui suscite la colère de tous les tenants de l'histoire officielle. On le lit toujours, on le regarde toujours . On a plus que jamais besoin de crever un certain nombre de baudruches du passé, comme du présent ; on a toujours besoin de ne pas accepter, les yeux fermés, les discours intéressés des défenseurs de l'ordre social. Car ,oui, il n'a pas pris une ride. Pas fané, le Guillemin, pas passé, toujours haut en couleurs !
Je rappelle que sont nombreux les jeunes historiens qui, loin de mépriser le travail de Guillemin, le créditent d'un certain nombre d'intuitions qu'ils peuvent reprendre à leur compte, développer selon le cas, enrichir de points de vue différents, de découvertes. Alors que la vieille garde des Sorbonnards le poursuit toujours de sa vindicte.
Dans un commentaire posté sur un des premiers billets du blog Colloque Henri Guillemin, quelqu'un affirmait avec un sérieux inimitable que jamais au grand jamais Guillemin n'avait découvert quoi que ce soit, qu'il n'avait jamais mis son nez dans des Archives, qu'il ne faisait que se laisser guider par ses partis-pris.
Donnons donc cette information à propos de la guerre de 1870 : "Ce ne sont pas les ouvrages sérieux qui manquent sur le sujet et je crois bien avoir tout lu. Mais pourquoi n'a-t-on pas scruté, ligne à ligne, ce document extraordinaire que constituent les six volumes où sont consignées les dépositions des témoins convoqués en 1871 et 1872 par les deux commissions parlementaires d'enquête, la "commission du 4 septembre" et celle "du 18 mars" ? (...) Et il y a, en outre, bien entendu, ce recueil, indispensable, des Dépêches Télégraphiques Officielles, et tous ces éléments d'information, souvent sans prix, que sont les correspondances, les souvenirs, les mémoires (...)" (cf. texte liminaire à Cette curieuse guerre de 1870 -Thiers - Trochu - Bazaine, Utovie/h.g.)
On voudrait bien que tous aient le même sérieux. Entre autres objectifs, le colloque du 19 novembre prochain sur la Commune, permettra de découvrir toute l'importance que revêt aujourd'hui l'engagement d'Henri Guillemin en histoire politique.
Pour s'inscrire au colloque "Henri Guillemin et la Commune" dès maintenant et connaître le programme, c'est sur www.henriguillemin.org. Toutes les informations sur le colloque sont en page d'accueil.
Patrick Rödel
Association Les Ami(e)s d'Henri Guillemin (LAHG)