Les écologistes n'étant pas pour nous des vaches sacrées, on va se permettre de leur couper un peu d'herbe sous les pieds, et particulièrement celle de la pampa argentine et des montagnes chiliennes. Délégué général d'Agir pour l'environnement, Stéphen Kerckhove est soucieux de l'avenir de la Planète.
Une inquiétude que partagent Comédies humaines et bien d'autres. Cette fois ça y est, on a retrouvé l'ennemi de la Terre. C'est le Dakar! L'ex-rallye raid africain, qui a posé ses bivouacs en Amérique latine pour cause d'Al Qaida au Maghreb, est une fois de plus dénoncé pour pollution et nuisances diverses. Aggravées cette fois de crime d'hypocrisie.
On s'était promis de ne pas polémiquer... Mais il est vrai que le réquisitoire du délégué général, assisté de deux autres officiers supérieurs de l'Armée Verte, Philippe Colomb, président de Vélorution et Olivier Louchard, directeur du Réseau action climat France, sur Rue89, offre toutes les garanties d'équilibre accusation-défense d'un tribunal aux Armées.
Première salve: le Dakar veut "communiquer vert en roulant gris". Jolie formule, qui précède un tir d'artillerie assez lourde: "Depuis plus de trente ans, Le Dakar, ex Paris-Dakar, entretient l'illusion de son utilité sociale ou environnementale. Alors que les fondateurs du Dakar installaient des pompes à eau devant les caméras et micros conviés pour l'occasion, les organisateurs actuels font feu de tout bois pour vanter les mérites écologiques de ce rallye-raid."
Pis encore: les organisateurs on promis de compenser les 42 800 tonnes de CO2 rejetées par le rallye, "soit le déplacement annuel moyen en voiture de 20 000 Français". Ce qui, volontairement ou non, évoque dans notre imaginaire un nuage de type Tchernobyl planant au-dessus des troupeaux de lamas andins. Et ils ont même poussé le cynisme jusqu'à verser, tenez vous bien, "100 000 euros à une structure œuvrant contre la déforestation", ce qui, à l'évidence leur permet de s'acheter "dans un même geste une conscience et le droit à polluer."
La cause est entendue. Au poteau, le Dakar! Sauf que... le coup des pompes à eau et des médias ne date pas d'hier. Dans les années 80, la belle voix de Philippe Noiret avait prononcé à peu près le même réquisitoire. A tort. Même s'il est vrai que Thierry Sabine, le charismatique barbu fondateur du Dakar (mort en hélicoptère sur le rallye) n'avait pas son pareil pour attirer Nikon et caméras, il est encore plus vrai que des concurrents retournaient au Niger ou au Mali pour aider à creuser des puits, développer l'aide scolaire, les dispensaires, comme les deux frères Marot et bien d'autres. Ou comme ce directeur de journal qui avait entrepris de faire construire une maison à Agadès pour participer à des actions et être plus près de son pote Mano à l'heure du thé à la menthe. Tout ça par simple passion pour l'Afrique. Où nombre de concurrents et organisateurs avaient des amis. Dans l'anonymat le plus total. Incroyable, non?
Tant il est vrai également que rien n'est tout vert ou tout gris. Et voilà comment, tel un Richard Virenque à l'insu de son plein gré, Stéphen Kerckhove fait son entrée par la grande porte au club- très fashion dans le pouvoir actuel- des interdiseurs de tout, partout et à tout le monde. Surtout quand ça ne dérange pas des intérets majeurs. Interdisons le Dakar pour toutes les raisons qui précèdent. Otons les cigarettes de la bouche de nos acteurs favoris sur les photos... Mais laissons des labos faire du lobbying pour des médicaments dangereux.
Et on verra bien si l'herbe est plus verte.
Jean-Pierre Robert.