
Jeudi 22 septembre, le rectorat de Versailles a annoncé à Kai Terada sa “mutation dans l’intérêt du service”. Après Caroline et Sabine du collège République en 2019, après Hélène de l’école Marie Curie de Bobigny en 2021, après les 6 collègues de l’école Pasteur de Saint-Denis en 2022, c’est donc à Kai, professeur de mathématiques au lycée Joliot-Curie de Nanterre, co-secrétaire général de Sud Education 92, militant de RESF, de faire les frais de cette mutation forcée, qui n’est qu’une sanction déguisée.
Cette généralisation des “mutations dans l’intérêt du service” à l’encontre de militants et militantes, investi.es dans leurs établissements pour défendre une école égalitaire et émancipatrice, a de quoi inquiéter. Pour déplacer celles et ceux qui la dérangent, l’administration ne s’embarrasse plus de conseils de discipline, où elle n’obtenait jamais la majorité et devait user de sa voix prépondérante pour sanctionner, comme pour Sylvie à Melle ou pour Edouard à Rennes. Avec cette mutation forcée, nul besoin de motiver sa décision par des faits circonstanciés, des témoignages précis, il suffit d’arguer que “la mutation dans l’intérêt du service apparaît nécessaire pour permettre un retour à un fonctionnement serein de l’établissement”, l’Education Nationale étant seule juge de ce fameux “intérêt du service”. D’ailleurs l’enquête à 360° sur laquelle le rectorat disait s’appuyer ne semble plus au cœur de la procédure : lors de l’audience du mercredi 21 septembre au ministère, les représentants du ministère ont laissé entendre qu’il n’y avait pas de rapport, mais seulement des “préconisations”. Et le 23 septembre, au lendemain de la remise de son arrêté de mutation à Kai Terada, l’Inspecteur Général Vie Scolaire et la rectrice de Versailles, recevant en audience les élu-e-s au CA du lycée Joliot-Curie, ont déclaré qu’aucun nom n’avait été remonté lors de cette enquête.
Il faut dénoncer haut et fort cette dérive dont le but évident est de faire tomber des têtes, d’éloigner les militants et militantes de leurs équipes, de décourager les collègues réprimé.e.s, car la répression injuste et aveugle est source d’indignation, mais aussi de souffrance.
Inquiétant, cet arrêté de mutation l’est aussi lorsqu’il évoque une activité de Monsieur Terada “en dehors des instances de dialogue social de l’établissement ou de l’exercice normal d’une activité syndicale” : remettant en cause une liberté fondamentale, le rectorat prétend donc définir ce qui relève de « l’exercice normal d’une activité syndicale ». Inquiétant, cet arrêté l’est encore lorsqu’il affirme que “le lycée Joliot-Curie connaît une situation préoccupante (...) en ce qui concerne (...) la continuité du service public d’éducation”. S’il s’agit là de s’indigner des absences non remplacées d’enseignants ou de personnels médico-sociaux, c’est bien à ce même rectorat qu’en incombe la responsabilité. Mais derrière “la continuité du service public d’éducation”, c’est indéniablement au droit de grève que s’attaque le rectorat de Versailles.
Si la vague répressive de ces dernières années laissait peu de doutes sur la volonté ministérielle de faire taire les militants et militantes qui dénoncent la casse du service public d’éducation, le rectorat de Versailles confirme avec certitude, comme le rectorat d'Orléans-Tours en engageant une procédure disciplinaire à l'encontre de Christophe et d'Olivier de Montargis, que Pap Ndiaye, dans la lignée de Blanquer, cherche lui aussi à museler la contestation.
Seule une mobilisation d’ampleur pourra arrêter ce rouleau compresseur ! C’est pourquoi nous, réprimé.e.s de l’éducation, syndiqué.e.s à Sud Education, à la CGT, à la FSU, appelons d'urgence à une journée nationale de grève contre la répression et pour la réintégration de Kai au lycée Joliot-Curie de Nanterre.
Communiqué du collectif des réprimé.es de l’éducation nationale du 28 septembre 2022