Le gouvernement s’occupe de la maternelle : casse en perspective !
Sur les Notes du Conseil Supérieur des Programmes avant de modifier ceux de la maternelle et poursuivre les réformes Blanquer
Rendre la scolarité obligatoire dès l’âge de 3 ans est un motif pour rapprocher la maternelle de l’élémentaire. Les Notes produites par le CSP vont dans ce sens qui sont destinées à modifier le programme actuel de la maternelle qui date de 2015. Elles annoncent des changements profonds. Et il est important de noter que dans leur contenu, rien de ce qu’a dit ou fait Blanquer n’est remis en cause. Ainsi les Assises de la Maternelle de 2018 et le décret qui s’en est suivi qui a introduit les nouvelles missions pédagogiques pour les ATSEM restent d’actualité. Les Notes préparent les esprits à une redistribution des rôles et des missions, à la suite de ce qui se passe en élémentaire, au collège et au lycée. Les pièces du puzzle des réformes s’assemblent en maternelle maintenant. Il est important de préciser, les notes ne le disent pas, qu’est prévu le fichage de l’élève, avec l’attribution d’un numéro d’identité scolaire, dès 3 ans. Dans les notes, comme pour les autres niveaux scolaires, il est question de confirmer la gestion managériale de la maternelle (contrôler les personnels), son entrepreneurisation (optimiser, rentabiliser les investissements, le budget), de viser plus d’économies de moyens, et de faire que la maternelle joue sa partition dans la soumission de l’EN aux exigences de l’économie (former la main d’œuvre en fonction de la demande).
À noter que parmi les auteurs de ces notes, il n’y a aucun enseignant de primaire.
L’entreprise école se construit sur la base de partenariats :
Avec les parents : Page 8, il est dit que « il convient de renforcer le lien entre l’institution scolaire et les parents. » Ce lien renforcé est déjà une réalité. Or il est porteur potentiel de 2 dangers : pour le professeur, celui de l’immixtion des parents dans le fait pédagogique ; et pour l’enfant, le danger que l’école ne soit plus le havre indispensable pour l’apprentissage, et qu’il ne soit plus non plus le rempart contre les problèmes familiaux (6 % des enfants en subiront avant la fin de leur scolarité), ce qui est d’autant plus grave pour les plus petits qui ne peuvent que peu s’exprimer.
Avec les élus et organismes en charge du péri ou extra-scolaire. Un partenariat, qui entraîne des missions supplémentaires de coordination/gestion pour les personnels enseignants. Ce sera la conséquence du fait que l’école maternelle (p8) « ... doit organiser et articuler les temps de l’école et les temps autour de l’école, les temps scolaires et les temps libres, les temps dévolus aux apprentissages formels et ceux où les enfants apprennent dans un cadre qui n’est pas explicitement structuré par l’enseignant. »
Les stades du développement de l’enfant ne sont pas une référence essentielle pour les programmes
Page 36 les Notes reconnaissent : « Des connaissances sur le développement cognitif et affectif du jeune enfant lui seront utiles » (à l’enseignant ndlr) ... et p 37, « Il convient d’avoir à l’esprit les différences importantes qui existent entre les enfants âgés de 3, 4 et 5 ans, s’agissant de la maîtrise du langage ». Plus loin, les Notes intiment l’enseignant à « tirer parti des capacités de l’enfant, innées ou développées de manière très précoce », à « distinguer ce que l’enfant comprend déjà, ce qu’il saisit intuitivement, mais qu’il ne peut exprimer, et l’aider à les « mathématiser » progressivement. ». Et p 44 il est dit « L’attention au détail et la pratique de la description s’exercent selon des modalités adaptées à l’âge et au degré de maturité des enfants. »
On le voit, les stades du développement de l’enfant n’ont pas la place privilégiée qu’ils devraient avoir.
De plus, leur étude n’est pas considérée comme devant faire partie d’une formation initiale. Selon les Notes, (p9) elle doit faire partie de la formation continue : « … dans le cadre de la formation continue des professeurs des écoles, de consacrer un nombre significatif d’heures aux spécificités de l’école maternelle ... ». Il serait pourtant très utile de maîtriser ces stades avant de débuter la carrière enseignante, car les niveaux de développement sont des repères essentiels pour les objectifs et les progressions programmatiques à tous les niveaux de la scolarité mais essentiellement en maternelle.
On ne peut que s’en étonner quand on sait que le gouvernement se gausse de baser toutes ses réformes sur la science et les neurosciences. Un rappel en est d’ailleurs fait dans les notes, un copié collé évident d’un autre rapport, pour rappel, et c’est tout.
Une re-configuration de la maternelle, de nouvelles missions pour les personnels
Page 10 il est dit : « il faut inviter chaque enseignant de maternelle à accompagner les enfants qui lui sont confiés, de leur entrée en petite section à la fin de leur scolarité maternelle en grande section. ». Ainsi, les enseignants maternelle suivraient leurs élèves, et changeraient de niveau tous les ans. Le danger serait, à terme le mélange permanent des 3 niveaux.
Cette réforme va contre le droit, pour le professeur, de pouvoir choisir le niveau enseigné selon ses préférences et les spécificités en lien avec ce niveau. Les notes optent pour l’enseignement par cycle en maternelle. Pour les PE, c’est plus de travail et des missions supplémentaires, car la réalité est qu’il faut plusieurs années pour maîtriser l’enseignement d’un seul niveau avec ses particularités. S’ajoute le fait qu’un niveau d’âge n’est jamais homogène. De plus, cette décision, de suivre une classe d’âge pendant 3 ans, va à l’encontre du travail d’équipe tant encensé par Blanquer. Ce suivi a pour effet également de supprimer un certain rite de passage pour l’enfant, un rite de passage de classe qui lui donne des repères, l’accompagne dans le changement et l’aide à grandir. Par contre, pour ce qui est de la notation de l’enseignant et de l’établissement, elle en sera facilitée.
Quant aux ATSEM, elles et ils deviennent, page 10, « les adultes de référence pour les enfants …; ils le sont aussi pour les parents ». (Depuis qu’elles et ils sont) ...« devenus agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles, (elles et ils) se sont vu peu à peu confier des missions éducatives ». Et ces nouvelles missions pédagogiques sont scellées par un décret paru en 2018 qui ne s’accompagnent d’aucune augmentation de salaires. On le voit il y a un glissement manifeste des missions de l’enseignant vers l’ATSEM. Et il faut se référer à des textes antérieurs (qui se succèdent à n’en plus finir), pour comprendre que la ou le PE pourrait devenir un chef d’ATSEM à qui il fournirait les tâches pédagogiques. Les Assises de la maternelle proposaient déjà que les ATSEM prennent en charge des groupes de 15 élèves, ce qui doit sans doute déjà être expérimenté ici ou là. En clair, les réformes se poursuivent, et les expérimentations aussi, comme l’a confirmé Macron au cours de ses vœux à la nation pour 2021.
La spécificité de tous les niveaux remise en cause, ce qui supprime le rite du passage et permet des économies
Sont en cours : l’élémentarisation de la maternelle, la secondarisation de l’école élémentaire de même qu’une élémentarisation du collège. Ces nouvelles orientations nient les stades de l’évolution de l’enfant mais aussi, nient, nous l’avons vu, l’importance des rites de passages qui, dans notre société, apprennent à l’enfant à franchir des caps, à grandir, ou le forcent parfois. Mais le cadre de l’Institution scolaire est là pour l’aider et le protéger.
Cette orientation vise bien sûr, à terme, des économies de moyens et de personnels dont les missions se croisent en se multipliant, d’où l’intérêt pour l’Institution : d’« oublier » les spécificité des différents niveaux; et ici de nier le caractère pré-scolaire de la maternelle, étape qui prépare à l’apprentissage collectif en socialisant l’enfant; de nier que lire et écrire passe par une première étape incontournable d’oralisation en lien avec la socialisation entre enfants et avec des adultes, un travail de longue haleine. L’institution a aussi intérêt à nier le caractère global de l’enseignement en primaire ce qui signifie que quand on fait des maths ou du français, on ne fait pas que des maths ou du français ; intérêt à nier que le primaire est un multi-apprentissage de tout à la fois, patient, permanent, qui a besoin de rites, répétitif, et continu et avec des dominantes ; intérêt à gommer le caractère disciplinaire de l’enseignement à l’école secondaire pour élémentariser le cycle 4. Le passage de l’apprentissage global à celui de disciplinaire, du CM2 à la 6ème, constitue pourtant un cap, un rite, dans notre société, à haute valeur ajoutée humaine, qui participe pleinement de la maturation chez l’enfant.
La conséquence de tout cela, sauter les étapes, ne pas prendre le temps, a pour effet de larguer les élèves les plus fragiles. Mais si certains resteront au bord du chemin, cela répond à la nouvelle doxa de l’EN, et donc pour le gouvernement, ce n’est pas un problème. Car l’enfant sera caractérisé et orienté en fonction de ses réussites comme de ses lacunes. Il s’agit juste d’exploiter au plan économique cet état de fait. Cela fait partie de la nouvelle fonction de tri et d’orientation de l’EN vers un emploi adapté aux capacités.
Des évaluations nationales qui remettent en cause l’expertise du professeur en tant que cadre
Elles sont conseillées pour chaque niveau (possiblement même 3 fois par année scolaire comme préconisées dans les « 21 mesures de Villani-Torosian » puisque qu’on élémentarise la maternelle). Quand même, dans la partie « langage », les auteurs des Notes avertissent que les rythmes d’apprentissage peuvent être différents. Des retards sont possibles qui entraîneront un enseignement différencié, l’essence de la doxa des réformes Blanquer. Un enseignant sait que, déjà dans un seul niveaux, chaque élève a un rythme de travail qui lui est propre. Un enseignant jongle en permanence avec cette réalité dans un seul niveau. Quand les niveaux sont mélangés, la remédiation est mission impossible.
Concernant l’utilité de l’évaluation, il n’est pas question ici de la nier. Il s’agit de pointer le danger concernant des évaluations nationales les mêmes pour tous, et tous en même temps. Car les progressions et les méthodes varient d’une classe à l’autre et d’un maître à l’autre. Et il est important que ce soit l’enseignant qui fasse ses évaluations en fonction de ses méthodes, ses attendus. C’est un des aspects de la liberté pédagogique individuelle inhérent au métier de prof comme nous l’expliquerons ci-après.
Or en maternelle, des évaluation nationales et à tous les niveaux ne peuvent être qu’extrêmement chronophages jusqu’à déstructurantes pour la classe, surtout en PS. Elles sont aussi une négation de l’expertise de l’enseignant, qui connaît le niveau de ses élèves. L’évaluation nationale systématique remet clairement en cause les spécificités de son statut d’enseignant. C’est l’objectif du gouvernement. Au travers de ces évaluations nationales, il veut en finir avec des spécificités comme la liberté pédagogique ou liberté de choisir ses méthodes. Le gouvernement transforme l’enseignant en ouvrier spécialisé, obéissant à une hiérarchie, les nouveaux cadres, et surtout le veut interchangeable. Son but est d’imposer de nouvelles méthodes d’enseignement, et pour cela exiger des comportements obéissants de la part de l’élève et du maître. À la clé, des économies d’échelle. À la clé également, faire rentrer tous les élèves dans des cases définies nationalement, et ce, dès la maternelle. Et pour cela le contrôle y est primordial.
Le remplacement de la liberté pédagogique individuelle par celle d’équipe en maternelle comme ailleurs
La liberté pédagogique d’équipe n’a rien d’une liberté. Elle s’avère être avant tout une stratégie, rarement définie, porteuse de contradictions, très positivée par le gouvernement, dont le vrai but est d’induire une pression de groupe sur l’individu. Le but du gouvernement est d’agir sur le comportement pour imposer et faire appliquer ses réformes sous la pression-contrôle de l’"Équipe-pédagogique-nouvelle-formule".
Or le statut d’enseignant est spécifique en cela qu’il doit s’adapter, se plier aux circonstances, et, par la force des choses à l’humain qu’il a devant lui, quand le but est de transmettre des connaissances, n’en déplaise à nos supérieurs hiérarchiques et à la société toute entière transformée en partenaire donc en juge. Et la liberté pédagogique individuelle, dans ce contexte, loin d’être accessoire, est une spécificité incontournable du statut de professeur. Elle est en est une composante intrinsèque, soigneusement évincée de la batterie des compétences exigées pour les candidats au nouveau concours. Sur la base de connaissances disciplinaires solides, la liberté pédagogique individuelle est le vecteur clé de transmission des connaissances à l’élève. La liberté pédagogique est à l’enseignant, ce que le marteau est au menuisier. Elle enfonce le clou. Consubstantielle au métier, elle doit le rester pour que la mission de transmission de connaissances soit menée à bien. Or cette mission fondamentale n’est plus de mise, remplacée par l’acquisition de compétences, et l’institution supprime donc la liberté pédagogique individuelle hors contrôle pour la substituer à celle d’équipe, plus contrôlable. Contrôler est essentiel pour soumettre l’Éducation Nationale, donc les profs, aux exigences de l’économie in fine.
Quant aux autres objectifs poursuivis derrière les évaluations
En maternelle comme partout, les évaluations nationales généralisées serviront donc à tout classer : élèves, enseignants et écoles/établissements. En ce qui concerne la Petite Section, des évaluations ont été publiées fin janvier qui évaluent majoritairement le comportement, et le caractère de l’élève. Les échéances électorales sont là. Aller très vite, très loin, tel est le but du gouvernement. Pour classer 12 millions d’élèves, des évaluations échantillons ne peuvent pas suffire. Et contrôler tout le système est indispensable.
Retour aux Notes. Quant à l’objectif déclaré de détecter les difficultés, p35, elles disent clairement que « Les évaluations ... (ont pour but) … d’identifier les besoins spécifiques de chaque élève et d’adapter en conséquence leur enseignement. » Au delà du fait que l’expertise du professeur est niée, il est important de considérer que les élèves, la classe et le prof seront victimes d’ "effets indésirables" tel que le caractère chronophage et inutile de cette nouvelle obligation d’évaluation, et seront soumis à de nouvelles injonctions, l’imposition de remédiations standardisées, probablement numérisées, aux fins de marchandisation, pour plaire à l’économie. En résumé, les évaluations sont utiles pour l’économie, inutiles pour l’enseignant, dangereuses pour l’élève, qui sera noté, classé, étiqueté de façon précoce. D’ailleurs p30, les auteurs des Notes eux mêmes émettent des « réserves sérieuses » quant aux résultats des évaluations. Ils admettent du bout des lèvres que (en maternelle ndlr), des élèves « réussissent par simple mimétisme et sans réellement comprendre ». Les auteurs des Notes rendent aussi compte des doutes des enseignants par après.
En conclusion, ces évaluations inscrivent les enfants, dès la maternelle, dans le grand centre-de-tri et d’orientation de l’Éducation Nationale.
La CP-isation de la maternelle : un danger pour l’élève et un moyen de pression pour l’enseignant.*
Les auteurs du CSP dans leurs Notes, préconisent un pré-apprentissage de la lecture et de l’écriture. Le problème des stades de développement de l’enfant est vite éludé, comme on l’a déjà vu. Pourtant, l’âge optimal pour l’apprentissage de la lecture, 6 ans, reste inchangé. Or les Notes introduisent avec force l’idée, que forcer les étapes d’apprentissage est possible. Ainsi p11, les notes définissent que c’est « en petite section, qu’il (l’élève) prend conscience de l’existence des mots. En moyenne section, il commence, grâce à des jeux de décomposition et de recomposition de mots qu’il connaît, à envisager les mots et les énoncés comme des objets,… crée des rimes ». P25, les Notes parlent de « découvrir l’organisation grammaticale des phrases » quelle réalité pour un élève de maternelle ? P26, alors que c’est une étape reconnue du CP, il est dit : « À la fin du premier cycle de la scolarité obligatoire, tous les enfants doivent être capables de distinguer et de manipuler les syllabes d’un mot, ».
Précisons qu’il est vrai que, individuellement, pour certains élèves, souvent sur-stimulés par ailleurs, c’est envisageable. Il est question ici de poser, dans le cadre de l’apprentissage collectif, et qui doit rester tel, le problème de forcer des acquisitions qui sont en décalage par rapport au stade de développement de l’enfant.
P37 et 38, pour résoudre un problème mathématiques, les Notes parlent de « formulation par un écrit figuratif ou symbolique …. d’utiliser le comptage en avant ou en arrière, ou encore de mener un raisonnement plus élaboré. … les enfants dessinent ». Il s’agit ici de la schématisation d’un problème qui s’acquiert au cours des trois premières années d’élémentaire. Encore une fois, exiger cela d’une classe d’âge de façon anticipée est dangereux pour l’enfant.
Et au-delà, on ne peut que s’inquiéter de cette préconisation d’imposer ces apprentissages car la conséquence directe est qu’elle se transforme en moyen de pression sur l’enseignant assez terrible.
Empêcher que la maternelle se transforme en course à l’échalote ! Le CP doit rester le temps de l’apprentissage de la lecture et de l’écriture !
À la page 15 des Notes, selon les évaluations des dernières années, aux résultats discutables mais instrumentalisés, il est dit qu’à l’entrée au CP « les élèves ont un niveau insuffisant dans le domaine de la connaissance des lettres … et des sons qu’elles produisent » et que « l’élève ne repère pas, cependant, la place de la lettre dans le mot et a du mal à fusionner deux sons. » On peut en déduire que ce n’est plus en CP que l’élève apprend les lettres, et que c’est en maternelle que la syllabique serait en voie d’acquisition. Alors qu’actuellement, la syllabique est un cap essentiel, déterminant, et que la très grande majorité des élèves ne peuvent passer qu’en CP. C’est pourquoi on ne peut d’aucune manière l’exiger de tous les élèves de maternelle. De plus, privilégier cet apprentissage, d’autant plus chronophage que les enfants sont petits, c’est le faire au détriment des autres fondamentaux en premier du langage oral et de la socialisation à travers le jeu. Cela conforte dans l’idée d’une course à l’échalote avec un début de sélection et un tri à la clé, lourd de conséquences, en prime, dès la maternelle.
Des objectifs qui relèvent du CP, ne doivent pas être généralisés en maternelle. C’est la conséquence de la volonté gouvernementale de rentabiliser le coût de la maternelle qu’il faut rejeter à tout prix. La maternelle doit rester pré-scolaire, comme elle s’est construite elle-même, à côté de l’élémentaire, peu à peu au travers des décennies. Le risque énorme de la surenchère des apprentissages trop tôt, est de mettre en danger toute la scolarité de beaucoup d’élèves. Pour cela, le CP doit continuer à s’attacher à l’apprentissage collectif, c’est à dire de tous, complet de la lecture et l’écriture car c’est l’âge reconnu optimal pour cet apprentissage.
Pendant que le virus détourne l’attention ! L’urgence de finir de réformer le mamouth de la maternelle à l’université !
P44 il est dit « À ce stade de la scolarité, (en maternelle ndlr) il est primordial de dispenser un enseignement polyvalent qui ne se plie pas aux partages disciplinaires ».
Les auteurs des Notes reconnaissent le caractère global, qu’elles appellent polyvalent, mais uniquement pour la maternelle ! Pour eux, l’élémentaire semble être un enseignement déjà entièrement disciplinaire, à l’instar du collège. Le paradoxe est que l’élémentaire est amené aujourd’hui à abandonner le disciplinaire au profit des seuls maths et français. Ambiguïté ou contradiction ? La meilleure explication vient sans doute du caractère mal ficelé de ces Notes du CSP. Mais seulement dans leur forme car leur contenu est efficace qui remet clairement en cause l’esprit maternelle. Les notes semble donc répondre à une urgence. L’urgence d’aller au bout des réformes.
Blanquer, en juillet dernier disait que le Cap Horn avait été franchi en ce qui concerne les réformes dans l’Éducation Nationale. Et les élections présidentielles se rapprochent. Macron a besoin que toutes les réformes surtout celles des services publics, le mamouth entre autres, soient bouclées avant l’année de la présidentielle pour pourvoir s’appuyer dessus comme candidat. La Covid 19 (désormais 21) est instrumentalisée et fournit une fenêtre de tir idéale pour les réformes qui doivent passer et vite. Celle du BAC qui est en train de passer en contrôle continu, celle de l’enseignement hybride qui sera instauré avec les nouveaux variants de la Covid, et surtout le contrôle resserré des établissements scolaires qui est mis sur pied. À la maternelle aussi, les personnels doivent être mis sous contrôle via la numérisation, et le mécanisme de tri doit être mis en place à l’aide du fichage généralisé. Les Notes y participent.
Supplément 1
Respecter la spécificité des niveaux pour résoudre la difficulté scolaire et combattre la main-mise de l’économie sur l’Éducation Nationale
Si le caractère global, spécifique de l’élémentaire, était imposé et respecté pendant les 5 ans qu’il dure, il pourrait être dépassé dès le début du collège, initiation à l’enseignement disciplinaire. Mais il est clair que le but actuel du ministère n’est pas de dépasser ce caractère global. Le disciplinaire est plus coûteux que le global, car il nécessite plus de professeurs, de locaux. Et une grande partie de l’économie capitaliste financiarisée n’en a pas besoin. Le but économique est donc de prolonger le global le plus longtemps possible. Le capitalisme néolibéral a passé commande : l’éducation Nationale doit fournir 30 % d’élèves qui ne doivent pas dépasser le niveau 3ème, niveau du DNB (Diplôme National du Brevet). Celui-ci doit remplacer le BAC dans l’esprit des élèves comme diplôme national à atteindre.
Supplément 2
Comment le caractère global de l’enseignement a disparu ? La photocopie tout azimut !
Une arme fatale a servi à faire oublier le caractère global inhérent à l’enseignement en primaire. Il s’agit de la photocopie. Dans un but économique d’abord, elle est devenue un substitut moins coûteux, voire misérable, du manuel scolaire et puis s’est généralisée partout. Ainsi, la photocopie supprime de fait le caractère global du travail scolaire en évacuant toutes les tâches scolaires annexes d’un objectif unique ciblé. Or, pour que l’enseignement reste global, les tâches annexes sont un apprentissage à elles seules et ne doivent pas être éludées. Au contraire, elles sont fondamentales car toutes les petites difficultés pratiques sont autant de problèmes à résoudre pour le jeune élève en classe et lui apprennent à affronter la complexité de la vie. Elles sont aussi importantes que l’objectif affiché. Ainsi en est-il de l’écriture, de la copie, de la présentation du travail dans un cahier, du soin, de la rapidité, de la compréhension fine des consignes, de la coopération, de la sociabilisation etc, etc. Toutes ces activités sont indispensables et s’acquièrent au cours d’années de pratique et d’affinage de la pratique. Quoique jamais évaluées, elles constituent le socle indispensable qui permettent les acquisitions des savoirs scolaires (orthographiques, grammaticales, mathématiques ...).
Supplément 3
Importance du temps et du jeu dans l’apprentissage, dans le cadre sécurisant de l’éducation nationale !
Avoir des objectifs, trop élevés, trop vite, trop tôt, entraîne des pressions énormes. Et une discipline trop sévère est antagonique avec la sérénité que requiert l’apprentissage, surtout chez le jeune enfant. L’Institution est là pour cadrer et sécuriser l’enfant dans son étape d’apprentissage. Ouverte à tous les partenariats, elle perd ces 2 caractéristiques et devient girouette où les acteurs ne sont plus que marionnettes. Dans ce cadre déjà délétère, une discipline trop rigide mène à tout sauf à l’autonomie. D’autre part, le temps n’est pas qu’un atout précieux. Le temps est une composante essentielle de l’apprentissage. Un proverbe chinois dit qu’il faut oublier 6 fois pour retenir pour la vie. De même, si l’enseignement scolaire est un long travail répétitif il se doit d’être varié au long d’années entières en lien avec un travail d’approche disciplinaire, qui doit rester approche. L’utilisation des nouveaux acquis dans des contextes les plus variés possibles est indispensable pour leur consolidation et pour les intégrer définitivement. Pour cela des activités considérées comme annexes sont au contraire fondamentales pour accompagner, diversifier l’acquisition. Si c’est vrai pour l’élémentaire, c’est encore plus vrai pour la maternelle. Pratiquer les arts, le sport, écouter et raconter des histoires, le passage à la bibliothèque, les jeux informels, jouer, jouer encore, jouer toujours entre autres activités, ne sont donc pas des pertes de temps pour l’enfant de la maternelle.