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Billet de blog 26 mars 2025

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Ma scolarité… teintée d’injustice

Mon texte offre mon point de vue trop peu connu, celui d’une jeune lycéenne française contrainte de retirer son voile à la grille de son établissement.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Ma scolarité ne sera jamais celle de mes camarades.

Dire que je suis une élève moyenne vous ennuierait, et vous avez de la chance, car ce n’est pas de cela dont je veux parler pour évoquer ma scolarité.

Je suis allée nue à l’école. L’école de la République m’a ordonné de me déshabiller tous les jours. Je venais pourtant habillée, mais on m’a demandé de retirer mon vêtement. Tous les autres avaient le droit d’être vêtu, sauf moi. J’ai vécu cette humiliation toute ma scolarité ; je n’ai pas été défendue, ni rhabillée par les autres.

La routine a voulu que je trouve cela normal, mais elle n’a pas réussi. Je me suis toujours sentie mal, sentie sale, sentie nue. En étant de force, dépossédée de ma pudeur, arrachée à mon vêtement le plus précieux.

À la grille de mon établissement, que je traversais tous les jours. Me dirigeant vers l’apprentissage, on ne m’a jamais traitée comme les autres. Pas une seule fois on ne m’a parlé comme une élève normale. Au contraire, on me parlait comme on parle à une délinquante, défiant l’autorité, défiant la loi.

Mais quelle loi ? Une loi qui me force à me déshabiller ! Mais pourquoi ? Pour ne pas influencer. Influencer qui ? Pour ne pas se faire remarquer. Remarquer par qui ? Et pourquoi dois-je cacher qui je suis ? Ce en quoi je crois ? Pourquoi on ne crie pas sur les autres ? Pourquoi crie-t-on seulement sur moi à la grille ? Les autres, eux, peuvent passer avec leur identité entière. Pourquoi ce serait à moi de laisser une partie de moi-même ? Pourquoi est-ce que je pose problème et pas les autres ? Qu’est-ce qui change ? Ah oui, le signe. Leurs signes sont plus discrets ? Elles, elles ne portent qu’un collier, ce n’est rien. Mais toi, ça se voit, on sait, et ça dérange.

Comment expliquer cela à une jeune fille qui ne demande qu’à être elle-même ? Comment oser ôter une partie de l’identité d’une si jeune personne ? Et vous la traitez tous les jours comme un problème, vous lui criez devant tout le monde « Retirez-le ! » afin que tous le monde voient, entendent et soient sûr qu’elle est hors la loi.

Cette humiliation quotidienne est dure à vivre au début ; on est frustré, on ne comprend pas. Au final, on ne comprend toujours pas, mais on se résigne, et on baisse la tête. Face à l’autorité et au chantage avec son avenir, on baisse vite la tête. On troque son identité contre sa scolarité. On ne comprendra jamais pourquoi.

Si vous comprenez, cela signifie qu'ils ont réussi à vous posséder. Mais si vous restez indigné, c’est que vous savez ce que signifie la liberté et l’égalité.

Je n’aurai jamais la même scolarité que les autres. Les autres ont eu une scolarité remplie de rires, de pleurs, de colères, de confusions, de remises en question, de conflits, de révélations, de déceptions, d’espoir, de motivation, d’échecs et de réussites. La mienne aussi, mais avec une touche d’injustice.

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