Il faut appeler un chat un chat : la France n'a pas, n'a jamais eu, sauf dans la parenthèse de 1848, un régime présidentiel. Car un régime présidentiel est un régime qui organise très sévèrement la limitation réciproque des pouvoirs l'un par l'autre. Pas de dissolution possible, pas de renversement possible du Gouvernement par le Parlement, pas de Premier Ministre. Bref, un mariage sans divorce possible et la recherche permanente du compromis. La constitution de 1958, même révisée en 1962, reste une constitution parlementaire, dans laquelle le Chef de l'Etat arbitre (article 5) mais ne décide pas. Il revient au Gouvernement, dirigé par le Premier ministre (articles 20 et 21) de déterminer et de conduire, sous le contrôle du Parlement, la politique de la Nation. En s'appuyant sur l'élection présidentielle au suffrage universel direct, les différents Présidents ont complètement dévié du schéma constitutionnel, et instauré un monstre, le présidentialisme, concentrant la réalité des pouvoirs entre les mains d'un Président bénéficiant du soutien godillot de sa majorité au Parlement. Donc, il est théoriquement très simple de remédier à cet abus: il suffirait d'appliquer complètement la Constitution, rien que la constitution, toute la constitution. La preuve en avait été établie pendant les 5 ans du Gouvernement Jospin. Mais celui-ci, soucieux de mimer un mitterrandisme rétrograde, a préféré casser toute possibilité de retour au régime parlementaire. Il s'y est tué. Et avec lui, il a emporté nos espoirs. En toute modestie, j'avais été un des rares, dans un article paru dans Le Monde en Février 2002, à envisager le désastre rendu possible par cette gymnastique renversant le calendrier électoral.
Que François Hollande s'en tienne à sa Maison, qu'il incarne la France dans l'Europe et redonne au Parlement et au Gouvernement la liberté d'établir un projet efficace restaurant la confiance. C'est tellement simple, que l'on refuse de le voir et même d'y penser.