L'utilisation presque simultanée, par Mélenchon et Montebourg, de la référence à Cincinnatus pour justifier leur rapport écliptique au pouvoir, ne peut que surprendre désagréablement. En effet, toute la légende iconographique bien pensante ne peut faire oublier que Cincinnatus était un patricien ultra conservateur, dont l'essentiel de l'action a consisté à réprimer la révolte d'esclaves et à s'opposer aux revendications de la plèbe. Quant à son retour à la terre, il fera sourire lorsqu'on saura que ses domaines, cultivés par ses "clients", étaient situés aux portes de Rome sur la rive droite du Tibre (l'ager vaticanus) : distance beaucoup moins grande que de Paris à Montret...
On était en droit d'espérer l'invocation d'un homme exemplaire, désintéressé du pouvoir, soucieux de lutter contres les inégalités et partisan de la démocratie. Cet homme a existé et sans légende. Il s'agit de Solon, Législateur athénien qui, en moins d'un an, a réformé en profondeur, socialement, économiquement et politiquement, la cité alors en pleine crise. Puis, la tâche accomplie, il abandonna sa fonction d'archonte et partit en voyage au loin. Solon avait supprimé la dette publique, réduit les dettes privées, aboli l'esclavage pour dettes, et cassé le monopole du pouvoir de la classe dominante. Dans une Athènes où les riches devenaient toujours plus riches et les pauvres toujours plus pauvres, il a jeté les bases de la démocratie, ouvrant les fonctions publiques à toutes les catégories de citoyens (notamment en instaurant le tirage au sort pour l'exercice des principales fonctions administratives et judiciaires !).
Encore un effort, Camarades, pour renoncer aux métaphores douteuses et finalement peu flatteuses : il n'y pas d'honneur à être un Kid de Cincinnatus. Soyons vrais !