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D Magada

Journaliste (ex-Reuters-c'est mon pédigrée), auteure indépendante et grande voyageuse, je vis dans plusieurs langues et cultures. En dehors de l'écriture personnelle qui avance lentement, je suis consultante pour l'ONU et je forme des journalistes à l'international. Ce que j'aime le plus, après mes enfants, c'est de me retrouver dans un endroit inconnu avec un carnet et un stylo.

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Billet de blog 18 mai 2023

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Le grand écart alimentaire

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Dimanche dernier, je me suis retrouvée dans un quartier de Rome où je ne m'aventure jamais, le quartier de Casalotti dans la banlieue nord-ouest. Une périphérie développée dans les années 1960 et 1970 lors d'une grande phase d'expansion urbaine de la capitale italienne. L'architecture en témoigne avec ses solides immeubles résidentiels à cinq étages et aux multiples balcons (un pour chaque appartement), de ceux, typiques de Rome, que l'on peut voir dans tous les quartiers de la seconde moitié du vingtième siècle.

 Sans être aisée, Casalotti a la réputation d'être une banlieue plutôt confortable aux confins de la campagne romaine, éloignée du centre mais pleine de verdure. J'y emmenais mon fils pour un match de basket que son club jouait contre une équipe locale. Rien d'extraordinaire, un moment anodin de la vie quotidienne à Rome où le weekend, les jeunes sportifs s'affrontent dans des matchs amicaux.

 En regardant le match, j'ai été frappée par la différence physique entre les deux équipes, classe 2008. D'un côté, de jeunes adolescents agiles et sains, de l'autre, des joueurs en surpoids qui peinaient avec les accélérations soudaines et les envols pour saisir la balle.

 Pourquoi cette différence ? La malbouffe. Car en Italie aussi, un pays pourtant réputé pour la qualité de son régime alimentaire, on achète de plus en plus de produits agro-industriels ultra transformés et de moins en moins de produits frais à cause de la cherté de la vie.

Beaucoup de familles en Italie n'ont pas le luxe des aliments frais, malgré l'énorme production maraichère du pays. Les grands écarts de salaire en sont la cause principale avec un salaire minimum parmi les plus bas en Europe occidentale contre une rémunération parmi les plus élevées pour les députés italiens. A cela s'ajoute le manque de temps pour faire son marché le matin et cuisiner pour le diner ; pour des parents qui travaillent dix heures par jour en dehors de la maison, il est plus facile d'avoir des surgelés prêts à passer au micro-onde de retour le soir. L'industrie agro-alimentaire se charge bien d'y rajouter du sucre pour les rendre addictifs.

Dans les siècles précédents, les plus aisés montraient leur richesse par l'embonpoint, aujourd'hui c'est le contraire. Un corps mince et sportif est gage de statut social élevé grâce à une nourriture saine et équilibrée, riche en nutriments. Les différences de classe sociale et économique se voient toujours dans l'assiette, et au-delà sur la santé, mais plus avec les mêmes critères.

 Dans des articles rédigés il y a presque vingt ans, j'avais souligné cette tendance en France, c'est au tour de l'Italie, grand exportateur de produits alimentaires, d'y succomber.  https://www.telegraph.co.uk/expat/4194181/Quelle-horreur-is-it-true-that-the-French-cant-boil-an-egg-these-days.html

Ce nouveau fléau de la malnutrition par la surconsommation de produits transformés, devenu un phénomène de classe, se retrouve à l'échelle globale. Dans un projet sur lequel je travaille pour la FAO (en coopération avec le centre français de recherche, Cirad), des diagnostics ont été réalisés sur les systèmes alimentaires dans plus de 50 pays sur quatre continents. Les résultats sont flagrants. Dans tous les pays on retrouve le même schéma : une population urbaine aux moyens limités qui se nourrit de fast-food par manque d'argent et de temps, avec comme corolaire une montée des maladies chroniques liées à l'alimentation, tels que le diabète, l'obésité et les maladies cardio-vasculaires. Les frontières tombent. Au niveau mondial, une nouvelle répartition économique et sociale se met en place distinguant la minorité qui peut se nourrir sainement (dont je fais partie si j'ai du temps à consacrer à écrire cette chronique) du reste de la population.

https://www.fao.org/support-to-investment/our-work/projects/evaluation-des-systemes-alimentaires/fr/

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