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Billet de blog 4 décembre 2024

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"Leurs enfants après eux" : la Warner tient le bon produit

L’adaptation du livre de Nicolas Mathieu avec Paul Kircher, Angelina Woreth et Sayyid El Alami suit trois jeunes et leurs parents dans les années 90, sur fond de lutte des classes affadie.

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Dans la famille tous ensemble du film français événement, les frères Boukherma font feu de tout bois. Ils ont foncé adapter Leurs enfants après eux car le livre de Nicolas Mathieu offrait un menu de gala : splendide saga sociale, France des périphéries, années 90 (cerise sur le gâteau : coupe du monde 98), teen spirit exacerbé. À ceci près que la fin du XXe siècle quelque part dans l’Est de la France, les jeunes de la désindustrialisation, les usines en déshérence dressées au loin, tout ça justement commence à faire loin. Il convient donc de rendre le produit familier pour le citoyen 2024. Avant sa mise sur le marché, l’expérience singulière et marquante de l’écrivain lorrain est transformée, au sens industriel du terme. La mise en scène est une mise aux normes audiovisuelles. Les personnages sont incarnés par des comédiens qui les organisent en les embourgeoisant. Le matériau conflictuel est arrondi, aplati. Le social policé, muséifié, patrimonial - comme chez Nakache & Toledano. Les personnages qui fâchent sont sacrifiés. Le personnage de Hacine, trop situé, trop clivant, n’y est pas vraiment - tout juste quelques répliques au milieu d’accès de violence permettant à l’ordre narratif d'avancer. La forme propre de Leurs enfants après eux domestique la bête littéraire qui tempêtait contre l’état des choses. Elle anéantit l’historicité que son marketing a mis en avant, promettant une ambiance nineties comme une friperie promet des vêtements vintage. Leurs enfants après eux chante une morale suffisamment brumeuse pour ne fâcher personne - haine de l’injustice, mais aussi révolte, mais aussi rêve d’un monde meilleur, comme ce dernier plan d’Anthony sourire aux lèvres cheveux au vent serpentant à moto sur une route bucolique -, et noie la lutte des classes dans une mare d’abstractions consensuelles.

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