Je reprends le billet écrit il y a une dizaine de jours en raison de fautes d'édition et de manque de précision . Je l'avoue dès ma plus tendre enfance , il y a bien longtemps , je n'ai jamais pris le moindre plaisir à assister à une rencontre de foot , de rugby ou de n'importe quel jeu . Je pense ne pas être une exception . Ce qui m'a révolté au lendemain de la victoire du 15 juillet c'est le caractère démesuré des commentaires selon lesquels c'était la France , toutes classes confondues , qui reprenait le moral et la confiance en l'avenir . Contrairement à ce qu’on voudrait nous faire croire , tous les français n’ont pas suivi religieusement le match de dimanche . Il y a beaucoup de gens qui ne sont tout simplement pas intéressés à ce genre de compétition . Une remarque : avant d’être fédérateur le foot est bien souvent le prétexte à des affrontements entre villages qui se terminent par des pugilats . Les lendemains du triomphe de 1998 devraient donner à réfléchir , avant d’entonner les trompettes de l’unité et de la fraternité . Les scènes de délire collectif dont toutes les télévisions nous ont assommés peuvent difficilement passer pour des démonstrations d’unité populaire toutes classes sociales unies dans la même vénération du drapeau en braillant la marseillaise .
Cette façon de voir est la même que celle qui voudrait que les différences de classe , dans les pubs en Angleterre , disparaissent ou plutôt s’évaporent en même temps que monte le degré d’alcool . Pas plus que la Guinness le foot n’est un ciment entre les classes .
Même si l’alcool peut y jouer un rôle important on peut difficilement trouver une explication aux scènes d’hystérie collective que les média nous ont montrées avec insistance .
Sans aucune prétention à la psychologie ou à la psychanalyse je pense qu’elles cachent beaucoup de refoulements et de frustrations , comme tout besoin de transcendance ou d’idole .Ce n’est pas pour autant qu’il n’existent pas d’étroits rapports entre le sport en général , et particulièrement pour le foot , et l’utilisation politique qui en ai faite . Il y a d’abord la récupération la plus grossière qui consiste à évoquer la nécessaire unité du peuple vainqueur . Elle prolonge le ni droite ni gauche du candidat Macron ( qui s’est très vite transformé en tout pour la droite , tout pour les plus riches ) . Plus sérieusement le foot , que de vrais amateurs comme Bernard Pivot , considèrent avant tout comme une forme d’art ,se trouve de plus en plus réduit à la seule compétition . Ce qui importe le plus c’est de gagner . C’est dans la droite ligne de ce qu’affirmait un Président qui affirmait qu’il y a d’un côté ceux qui réussissent et de l’autre ceux qui ne sont rien . Et c’est la leçon qu’a bien retenue Didier Deschamps qui s’est vanté de ne pas demander aux joueurs de faire un beau match , mais uniquement de battre l’adversaire . Cette philosophie du sport , si l’on peut dire , est à l’opposé de l’esprit sportif . C’est l’application de la doctrine néolibérale au jeu de ballon et à tous les sports de compétition . C’est le triomphe de la volonté de puissance . Prétendre donner aux enfants ce modèle , cet état d’esprit , est non seulement antipédagogique , mais humainement dangereux . D’un point de vue sportif l’accueil réservé à leur équipe par les admirateurs croates était bien plus admirable que les démonstrations plus ou moins réussies aux Champs Elysées et au palais présidentiel . Chez lui aussi l’actuel locataire de l’Elysée a bien montré
qu’il savait faire la différence entre les vainqueurs , que l’on reçoit à part , et les gens sans importance .
Au lendemain du match final l’économiste néolibéral de service sur France Inter , après avoir constaté que ce genre de compétition était favorable aux affaires , a voulu saluer une victoire qui pour lui transcendait les luttes de classe . Cette évocation d’une transcendance me rappelle malheureusement le titre donné au film des jeux olympiques de 1936 par Leni Riefenstahl , cinéaste admirée par Hitler , « les dieux du stade » . Mettre en avant le culte des dieux ou des héros est toujours dangereux et de nombreux politiciens en abusent . Ce ne sont pas ces mythes qui conviennent à l’admiration des enfants , mais simplement les gens qui font bien et même très bien ce qu’ils ont à faire . Et ce sont eux qu’il faut donner en exemple .
A ce propos , comme le montre la dérive de son proche conseiller Benalla , Emmanuel Macron devrait se montrer un peu plus regardant dans le choix des personnes de confiance . Ce qui parait évident c'est , par delà les parcours différents , la similitude de stratégie et d'ambition entre les deux hommes . Le faire savoir importe plus que le savoir faire . Ce qui compte c'est de réussir . Mais pour combien de temps ?