Dans ses conférences données à l’Université Populaire de Caen intitulées « Contre-Histoire de la philosophie », Michel Onfray nous fait savoir, à propos de Henri David Thoreau que celui-ci , comme Diogène de Sinope, « s’inscrit dans la philosophie de la nature comme un individu qui nous dit : la culture c’est l’art de retrouver ce que nous enseigne la nature ».
En effet, selon Thoreau, il n’y a pas de culture qui nous permette de nous éloigner de la nature et Diogène, rappelle Michel Onfray, nous dit que toute culture digne de ce nom est une culture qui nous invite à prendre des leçons de la nature, ce qui veut dire qu’ on l’écoute, on regarde ce qu’elle nous dit et ce qu’elle nous enseigne et elle va nous permettre cette nature là de voir ce qu’il faut faire ou ne pas faire.
Jean-Marie Pelt au cours de toute son œuvre nous invite à observer la nature et à découvrir les leçons qu’elle recèle.
En particulier les notions de solidarité, de coopération, de compétition, qui nous enseignent à respecter, voire à protéger ou imiter les comportements des différentes espèces animales ou végétales.
Ces notions de coopération et de complémentarité au sein de la biodiversité, Jean-Marie Pelt les a illustrées avec un grand talent de conteur notamment dans l’histoire de la grive, de la fauvette et de la mésange. (1)
Les végétaux eux aussi sont semble-t-il capables d’une pareille sagesse., ainsi que le montre le récit concernant « le trio que forment sur les sols calcaires du pourtour méditerranéen
La pâquerette, la chicorée et l’ail sauvage. (2)
L’ail a l’art de déblayer le terrain : c’est une espèce dite télétoxique : elle empoisonne le sol ; De ce point de vue elle est très « méchante » pour les autres espèces qui poussent dans son environnement proche et finit toujours par les éliminer. Dans un jardin cela ne se voit pas, parce que l’ail n’est pas planté près d’une autre plante, car les plantes ne se touchent pas et sont séparées par des plates-bandes. Ici au contraire, dans la nature, on voit ce qui se passe lorsque ces trois espèces vivent en proximité immédiate comme c’est le cas sur les collines qui dominent Marseille.
Si une pâquerette vient à vouloir germer auprès de l’ail, curieusement il ne se passe rien. En revanche si la chicorée germe au pied de l’ail, l’ail l’élimine et elle meurt tout de suite. Il en résulte donc qu’à la différence de la chicorée, la pâquerette peut supporter la toxicité de l’ail. Mieux que cela, la pâquerette neutralise la toxicité de l’ail. De sorte que si la pâquerette est présente, la chicorée peut alors se développer. La pâquerette lui rend ainsi le service de désintoxiquer le sol « pollué » par l’ail et par là même lui permet de se développer.
Nous avons donc là un trio que l’on pourrait appeler « de l’aide sociale chez la pâquerette ». La pâquerette fait de l’aide sociale pour d’autres plantes, comme ici pour la chicorée. Doit-on en déduire que l’ail est très « méchant, pas pour tout le monde. Pour un champignon comme le Sclérodium, non seulement l’ail n’est pas méchant, mais il est nécessaire à sa vie. Et le Sclérodium ne se développera bien que s’il est très proche de l’ail. Cet ail est donc en sympathie avec le Sclérodium et en antipathie avec la chicorée, alors qu’il est en relation neutre avec la pâquerette. Voilà encore une fois comment s’organise le jeu des compétitions et des coopérations ».
Notes :
(2) Extraits du livre de Jean-Marie Pelt Quelle écologie pour demain ? Editions L’Esprit du temps, 2010, pages 38 à 41