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Billet de blog 5 février 2021

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Fragment de réalité d’un coup d’état

Dans nos sociétés, il y a les parties qu’on ne voit pas, qui se déroulent en interne, on en reçoit des bribes écrites parsemées sur nos écrans. Il y a ce que l'on ne voit pas et qui nous laisse imaginer. Il y a ce que l’on croit voir par le prisme des réseaux sociaux et des médias. Et il y a ce que l’on voit à l’instant T et qui nous donne le fragment d’une réalité ...

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Voilà ce que j'ai vu à Yangon ce matin du 3 février 2021.


Appel d’un taxi. Avant de quitter l’appartement je décide de prendre mon appareil photo, direction deux commerces proches de mon lieu d’habitation. Comme tous les matins dans la grande rue d’Inya Lake qui longe les terrains militaires, les workers s’affairent à rénover les trottoirs. L’atmosphère semble normale, les véhicules s’entrecroisent. Le taxi s’engage sur le grand boulevard du Myanmar Plaza. Ici aussi tout semble normal.

Je décide de changer mon plan et demande au Taximan s’il veut bien m’emmener Downtown.  Il acquiesce sans hésiter. Tout au long du trajet je m’attends à voir des éléments me rappelant qu’on est sous la contrainte d’un coup d’état : l’omniprésence de l’armée, des militaires. Rien, pas une once de blindés, treillis ou rangers à l’horizon. Nous roulons tranquillement, j’observe la banalité des images d’un quotidien où rien ne laisse filtrer le fragment d’une réalité plus sombre qui se joue au même instant. Les gens attendent le bus, les travailleurs entretiennent le parc d’Inya Lake qui borde la grande avenue de Kabar Aye Pagoda Road. Assis sur les trottoirs, des vendeurs confectionnent leurs guirlandes de fleurs. Tout semble normal. Peu à peu la faible appréhension que j'ai ressenti, disparaît.

Nous sommes à mi-chemin du centre-ville. Je prends quelques clichés à travers les fenêtres du taxi. Voiture à l’arrêt, le driver interpelle un vendeur et achète un brin de Jasmin et l’accroche délicatement au rétroviseur, le parfum enivrant du Jasmin se diffuse dans l’habitacle.

Nous approchons de Downtown. Je veux juste faire un tour en voiture.

Arrivé près de Sule Pagoda, de l’hôtel de ville et du parc de l’indépendance, l’un des points stratégiques de la ville, je décide d'aller marcher. Dans les rues, les vendeurs ambulants ont installé leurs étals, les petits commerces sont ouverts. Devant leurs boutiques, nonchalamment assis, certains vendeurs regardent leurs portables, d’autres arpentent les rues en hélant les clients pour vendre des balais aux couleurs vives.

Des clients discutent sur les trottoirs encombrés. Des femmes, des hommes partent travailler, d’autres attendent pour se faire tester.

Vu de l’extérieur, dans cette danse urbaine, tout paraît normal. Il règne une atmosphère sereine, aucune tension, on en oublie le paradoxe de cette autre réalité qu’on appelle un coup d’état, tout est étrangement calme.

 Je m’aventure vers l’hôtel de ville. À l’intérieur, quelques militaires, 4 camions vides.

Quelques clichés, je regagne le taxi, direction les courses, pas de signe de tension, de cohue, de caddies surchargés, tout est calme. Je fais mes achats, rentre chez moi.

 Fragment de réalité d’un coup d’état.

 D.R

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