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Billet de blog 9 avril 2012

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Petit cours d'histoire, mais pas toujours rigoureux...

Dans les temps anciens, le pays était dirigé par des monarques se repassant l’affaire de père en fils. Suite à un processus complexe, où entraient pêle-mêle des idées généreuses et des intérêts commerciaux sordides, la population renversa le pouvoir et mit en place un gouvernement dont le principe de base était que la décision finale serait entre les mains de nombreuses personnes plutôt que d’une seule.

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Dans les temps anciens, le pays était dirigé par des monarques se repassant l’affaire de père en fils. Suite à un processus complexe, où entraient pêle-mêle des idées généreuses et des intérêts commerciaux sordides, la population renversa le pouvoir et mit en place un gouvernement dont le principe de base était que la décision finale serait entre les mains de nombreuses personnes plutôt que d’une seule.

Pour cela, on se mit en devoir d’élire une assemblée législative appelée « Chambre des Dépités ». Pourquoi « dépités » ? Parce que c’est au sein de cette assemblée qu’on choisissait ceux qui allaient constituer l’assemblée exécutive, dont les membres se nommaient les « Egaux ».

Vint un temps où le président du Conseil des Egaux voulut faire plus que distribuer la parole autour de la table et inaugurer des monuments. Il fit modifier la Constitution de manière à y jouir de pouvoirs accrus, et surtout, il demanda à être élu directement par la population lors de cérémonies distrayantes et cocasses. C’est ainsi que ce pays en revint de fait à la monarchie. Monarchie élective tout de même (comme chez les anciens vikings) mais les pouvoirs du Président étaient tels qu’il pouvait faire élire qui il voulait à sa suite.

Les cérémonies électives étaient l’occasion de fêtes populaires très attendues, préparées de nombreux mois à l’avance. On réunissait tous les candidats dans une maison fermée et ils intervenaient tous les soirs pour essayer de se mettre en valeur auprès de la population. Chaque semaine, chacun devait pousser la chansonnette et le corps électoral votait. On éliminait celui ou celle qui avait obtenu le moins de suffrages. Ainsi de suite jusqu’à ce qu’il n’en reste qu’un qui devenait le Président.
Dans cette nouvelle Constitution, les « Egaux » du gouvernement gardèrent leur nom mais on en changea l’orthographe ce qui donna le Conseil des Ego, plus court, plus moderne, plus frappant et mieux adapté. On parlait aussi de « Conseil des Sinistres » car ils ne servaient plus à grand-chose en réalité.

Les choses continuèrent ainsi de nombreuses années avec une succession de « Monarques-présidents » :

- De Gueulasse le Grand : un général (ça commençait fort) qui avait donc préféré ce système monarchique parce que le système précédent lui faisait perdre trop de temps en discussions alors qu’il avait de toute façon à chaque fois raison ;

- Pompe Hideux le Joufflu, fidèle continuateur du premier mais en version civile. Il parvint à asseoir son autorité grâce à son teint rubicond et sa bonhomie proverbiale ;

- Valéry Déteint le Raide, étrange nobliau à l’accent incompréhensible qui se rendit célèbre, au début de son règne, en jouant de l’accordéon les fesses intensément serrées ;

- Errant le Fourbe, ainsi nommé parce qu’il avait défendu toutes les idées du monde avant d’arriver à ce poste et qu’il était doté d’une redoutable habileté ;

- Cric-Crac le Jap, qui a beaucoup aimé le soleil levant et les femmes couchées mais savait se faire discret ;

- Sakropan le Petit, un mystère de même niveau que l’ « Homme au masque de fer » : on ne sait toujours pas s’il s’agissait d’un véritable être humain ou d’une poupée animée (essentiellement de tics).

Sakropan le Petit était parvenu à tenir en haleine l’ensemble de la population grâce à sa maîtrise de l’information. Tous les jours, il trouvait un nouveau sujet permettant à la foule de s’esbaudir. Il envoyait des messagers à cheval – les « petites lucarnes » - dans tout le pays pour y colporter la nouvelle du jour : le bonheur du Président, le divorce du Président, la montre du président, les amis très riches du Président, le jogging du Président, le mariage du Président, la femme du Président, le procès du Président etc. Dès que la population s’irritait de telle ou telle décision (toujours défavorable au plus grand nombre), Sakropan le Petit lançait ses « lucarnes » pour distraire les foules et les calmer.
Il fut ainsi élu trois fois de suite ce qui permit à son fils d’accéder au pouvoir quand il eut enfin terminé ses études, à 35 ans.

Nous sommes donc aujourd’hui, en 2022, sous le règne de Sakropan II le Joli.

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