La reconduction de M. Lecornu dans les fonctions de Premier Ministre ne paraît pas de nature à sortir notre pays de la crise politique et institutionnelle dans laquelle l'a plongé le président Macron.
Nos institutions, celles de la Vème République, sont pourtant suffisamment solides et suffisamment souples -les deux à la fois- pour permettre une issue conforme aux principes de la démocratie.
Le Président de la République a été désavoué deux fois par le suffrage universel -une première fois lorsqu'il s'est engagé personnellement dans la bataille des élections européennes de 2024, une seconde fois, lorsque insatisfait du résultat de ces élections, il a procédé dans la foulée à la dissolution de l'Assemblée Nationale. Depuis lors, aucun des gouvernements qu'il a nommés n'a été en mesure de conduire une action cohérente et durable avec l'indispensable soutien d'une majorité de députés à l'Assemblée Nationale.
En fait, M. Macon n'a aujourd'hui que trois options.
Ou bien, il accepte le compromis. Le compromis c'est la formule qui fonctionne dans un grand nombre de démocraties européennes voisines. Il s'obtient, dans un régime purement parlementaire, par accord entre les chefs de partis. L'Allemagne en est un bon exemple. Dans un système dualiste -à la fois présidentiel et parlementaire- comme le nôtre, c'est le Président, garant des institutions, qui doit être à la manoeuvre. Ou il accepte de tenter une cohabitation, en confiant la charge d Premier Ministre au camp qui est arrivé en tête aux législatives, c'est-à-dire le Nouveau Front Populaire. Ou il confie à un Premier Ministre la charge de constituer un gouvernement largement ouvert, ce qui suppose de fortes concessions à ceux qui n'appartiennent pas à son camp, le bloc central.
Or, M. Macron ne veut apparemment ni l'une, ni l'autre de ces formules. Il préfère naviguer à vue en nommant une première fois M. Lecornu à la veille d'importantes manifestations, en le nommant une seconde fois pour tenter de présenter un semblant de budget dans les délais constitutionnels. Cette façon de faire, tout le monde s'en rend compte, n'est à la mesure ni des problèmes de notre pays, ni des enjeux de la situation internationale.
M. Macron va donc devoir choisir.
Ou bien, il demande un ultime verdict au suffrage universel. Or, il est clair qu'il ne veut pas d'une nouvelle dissolution qui, pas plus que la précédente, ne lui procurerait une majorité. On reviendrait en fait à la case départ après beaucoup de temps perdu et avec une forte exaspération de l'opinion.
Dès lors, il ne reste qu'une seule issue à M. Macron : tirer les conséquences de ses échecs et permettre par son retrait une élection présidentielle qui aura nécessairement un vainqueur. Il appartiendra alors au nouveau président de donner une direction au pays et de rechercher les compromis que M. Macron n'est pas capable de trouver.
Certains expriment de l'inquiétude sur une élection qui leur paraît comporter un risque, celui d'une éventuelle victoire des extrêmes. C'est là la vision singulière de prétendus démocrates qui ne font pas confiance au suffrage universel et à la capacité des Français à assumer des choix. Et ce serait privilégier un lent pourrissement de la vie publique plutôt que de se donner les chances d'un sursaut républicain.
Dans la situation que nous subissons, il ne peut plus y avoir de tergiversations. Il est urgent que M. Macron se retire.
Daniel Garrigue,
ancien député.