En 1937, à la fin de sa vie, Freud écrivait : « Il semble que la psychanalyse soit le 3èmede ces métiers « impossibles » où l’on peut d’avance être sûr d’un succès insuffisant, les deux autres, depuis bien longtemps connus, étant l’art d’éduquer et l’art de gouverner ». (Analyse sans fin et analyse avec fin)
Cette conscience des limites de l’action humaine a guidé et guide encore, heureusement, nombre de médecins, psychiatres, psychanalystes, psychothérapeutes, éducateurs, pédagogues, enseignants (et peut-être même quelques chefs d’état !) de ceux qui décident de se lancer, malgré tout, dans ces métiers impossibles.
Mais les tenants de la nouvelle psychiatrie « basée sur les preuves » (dont la fondation FondaMental, est un des fleurons), les adeptes d’une pédagogie s’appuyant sur les neurosciences (soutenus par le ministre de l’Education Nationale, J.M. Blanquer) n’ont pas cette sagesse : soigner et éduquer sont, pour eux, des missions qui ne relèvent pas de l’art mais de la Science, et la Science étant forcément infaillible, ils sont sûrs de leur réussite.
Une prétention insupportable à standardiser le vivant.
Depuis quelques années, pour mener à bien son projet, la fondation FondaMental a créé des centres dits « experts » spécialisés dans «l’évaluation diagnostique ». Avec le soutien des autorités de santé, ces centres se multiplient et tendent à remplacer les lieux de soin.
Dans ces centres, on propose d’identifier« pour chaque patient les anomalies biologiques à l’origine de sa maladie, afin de poser un diagnostic précis à partir d’une simple prise de sang, d’une imagerie cérébrale... » . Car, « après avoir fait ses preuves dans le cancer, la médecine personnalisée émerge en santé mentale... » «Spécialisées par pathologie, ces centres utilisent tous les mêmes standards d’évaluation et s’attachent à faire bénéficier les patients des approches diagnostiques et thérapeutiques les plus innovantes… » (Bilan des centres experts publié par la Fondation en 2018)
La Fondation a sélectionné parmi les pathologies psychiatriques, celles qui vont mériter d’être diagnostiquées, étudiées (et accessoirement soignées) et constituer ainsi son « fond de commerce » : « la dépression résistante, la schizophrénie, le trouble bipolaire et l'autisme de haut niveau… » Pourquoi précisément celles-ci ? On ne le dit pas, mais on sait que ce sont des maladies mentales où le traitement médicamenteux est central (dans la conception du soin des « FondaMentalistes »)
Ces plateformes de diagnostic sont « spécialisée par pathologie ». Je suppose donc qu’avant d’être envoyé vers la plateforme qui lui correspond, le patient, doit être « pré-diagnostiqué » : il ne faudrait pas qu’un expert en troubles bipolaires se retrouve à devoir diagnostiquer une schizophrénie ! Ses « approches diagnostiques innovantes » ne lui seraient d’aucun secours…Car l’expert ne doit pas être surpris, dérouté, étonné par un patient dont le comportement et le discours ne seraient pas conformes à ses attentes. L’expert évite de se confronter à l’inconnu, au jamais vu, il n’est formé qu’au prévisible.
En pédopsychiatrie, le même système de pré-sélection des maladies est mis en place. A Robert Debré, par exemple, vous pouvez consulter si vous souffrez de :
- Autisme
- Trouble envahissant du développement
- Syndrome d’asperger
- Anorexie mentale pré-pubère
- Déficit de l’attention / hyperactivité (Concernant ces symptômes ils ont été regroupés artificiellement, pour définir une soi-disant « maladie neuro-développementale », la TDAH et le site de l’Education Nationale fournit gratuitement aux parents un descriptif complet des symptômes, pour leur permettre de faire eux-mêmes un « auto-diagnostic ».)
-Troubles anxieux, troubles obsessionnels compulsifs (TOC) et syndrome de Gilles de la Tourette
-Addiction
- Obésité.
Par contre, si votre enfant souffre d’un autre mal, inconnu, innommable, il faut aller voir ailleurs…
Pour en revenir au travail des experts de la fondation FondaMental, j’ai beau relire leur bilan, je n’y trouve aucune analyse de ce qui se passe réellement au cours de leur rencontre avec le patient psychiatrique.
Le mot « rencontre » d’ailleurs n’apparaît pas.
Rien n’y est dit sur la difficulté d’établir le contact avec le patient, de le faire sortir de son mutisme, de désamorcer son agressivité, de le laisser dériver ou pas dans son délire, de se faire une opinion clinique à visée diagnostique, mais surtout de créer un espace thérapeutique en trouvant les mots justes (l’interprétation qui saura apaiser tout en ouvrant une question, nouer un transfert et permettre d’entamer un soin.)
L’expert n’a pas cette préoccupation : d’une part, il intervient souvent, alors que le patient est déjà « stabilisé », précise-t-on plus loin ; de plus, il n’est pas là pour accueillir et soigner une personne, il est là pour « l’orienter vers des approches thérapeutiques innovantes ».
Il ne navigue pas comme nous en eaux troubles. Tout est clair pour lui, limpide ; les « entretiens standards d’évaluation » qu’il utilise, labellisés par FondaMental, lui épargnent tout sentiment d’inquiétude: ce sont des «machines» à effacer la subjectivité qui permettent de faire taire le patient, en résumant sa plainte, sa révolte, sa protestation d’existence… à une liste de symptômes dûment répertoriés ; l’expert fait entrer dans cette «machine» un discours singulier, il le brasse, le malaxe, le tord pour le faire coller à sa liste d’items préconçus, et il en sort triomphalement le diagnostic que le patient attendait : le portrait anonyme, et interchangeable d’une personne réduite à sa pathologie.
Cette personne en sera peut-être, pour un temps, rassurée : sa mystérieuse et perturbante intimité, son identité fluctuante seront enfin fixées, l’expert sait ce qui la trouble, il peut lui révéler qui elle est : « vous avez eu raison, Madame, Monsieur, d’être venu me voir moi, spécialiste du syndrome d’Asperger, parce que justement, je le confirme: « vous êtes Asperger » !
Dans le domaine de la pédagogie, Stanislas Dehaene, psychologue cognitiviste et neuroscientifique dont les travaux « inspirent » notre ministre de l’Education Nationale, nous explique, grâce aux IRM, que « la remarquable plasticité du cerveau humain le rend habile, à tout âge, à apprendre. Encore faut-il savoir en tirer parti. C’est ici que les neurosciences ont leur mot à dire ».
Il nous vante avec emphase les « potentialités immenses de notre cerveau » et des capacités du petit d’homme à s’en servir, mais nous savons ce que nous devons à notre cerveau, le cerveau d’Homo Sapiens qui a permis à l’Humanité d’être ce qu’elle est.
Grâce à lui, nous avons accès au langage et à la pensée, nous nous souvenons et nous nous projetons dans l’avenir, nous nous savons fragiles et mortels, nous sommes curieux de connaître et nous transmettons ce que nous avons appris aux cours des siècles, nous vivons dans des sociétés qui ont une histoire…
Le langage est au cœur de notre particularité humaine et son apprentissage par l’enfant est le secret de son "humanisation"
On sait par les neurosciences que le cerveau immature du nourrisson possède d’immenses potentialités (il est constitué de 100 milliard de neurones capables d’établir chacun jusqu’à 10 000 connexions. Le nombre de connexions potentielles est donc astronomique : 1 million de milliards.)
On sait aussi par les neurosciences que ce sont les stimulations sensorielles et psycho-socio-langagières qui permettent la « programmation » personnalisée du cerveau. Pas de langage, si le cerveau du bébé n’est pas « stimulé » par des voix humaines: en l’absence de ces « stimulations » langagières, les neurones de l’aire du langage ne se développent pas (on connaît la fameuse tentative de Louis II, roi de Sicile -1377-1417 : il fit isoler dix enfants avec interdiction de leur parler, pour savoir en quelle langue ils parleraient spontanément - en hébreu, en latin ou en grec- ils moururent tous.) La zone cérébrale qui s’active dans la reconnaissance des visages est proche de celle qui s’active quand on parle, ce qui confirme le lien entre relations et cognition : c’est parce qu’il regarde avec amour les visages de ses proches que l’enfant se met à parler…
Ainsi nos cerveaux, à priori tous identiques à la naissance, se construisent et se développent différemment pour chacun, de manière imprévisible, pour et par le langage. Ce langage nous impose aussi un rapport particulier au monde : nous ne connaissons pas le réel directement, nous avons besoin, pour l’appréhender, le cerner, « l’apprivoiser », de passer à la fois par nos sens et par les mots.
Ainsi se crée, pour chacun de nous, un monde interne, imaginaire et symbolique, unique, qui nous individualise, nous sépare des autres, nous renvoie à notre solitude, mais en même temps, par le langage et à la pensée, nous relie à eux.
Est-ce en découpant nos cerveaux en tranches que l’on peut explorer ce monde là ?
En nous répétant à l’envi que "la maladie mentale est une maladie comme les autres », les tenants de cette psychiatrie «coupeuse de têtes» se fourvoient totalement, ignorent la spécificité de la folie, un trouble de la psyché « qui menace l’homme dans son humanité » (Henri Ey), une aliénation, terme apparu au XVIIIème siècle quand Pinel bouleversait notre regard sur ces malades particuliers, les délivraient de leurs chaînes, et préconisait « le traitement moral » pour les comprendre et les soigner.
En 1899, Freud publie un livre fondateur pour la psychanalyse « L’interprétation des rêves ». Pour l’écrire il travaille, à la fois, sur les rêves de ses patients et sur les siens, sur ses fantasmes, pensées, angoisses, obsessions, inhibitions… et sur les leurs. Il révèle ainsi les invariants universels du psychisme humain et sa dimension inconsciente.
Contrairement aux experts de la Fondation FondaMental qui croient dur comme fer qu’il y a une différence visible, repérable, radicale, essentielle, entre le malade mental et « l’humain standard » (différence dont ils cherchent la trace dans nos cerveaux), Freud a rendu ainsi moins stigmatisante la barrière entre le normal et le pathologique.
En 1886, la psychanalyse a commencé de s’inventer quand il a montré que l’hystérie n’est pas une maladie neurologique…
Après un stage chez Charcot à la Salpêtrière, il se lance, en clinicien, dans l’étude de cette maladie mentale, et plus particulièrement des paralysies dont souffraient les femmes hystériques à cette époque.
Il découvre alors que ces paralysies n’ont pas de cause neurologique (qui serait aujourd’hui visualisable sur l’IRM) car leurs caractères cliniques sont incompatibles avec ce type de détermination (la zone anatomique des paralysies ne correspondant pas à celle d’un nerf).
Il comprend que la zone paralysée est une zone psychiquement construite, qu’elle correspond à une fonction, à un geste (marcher, se tenir debout, bouger un bras) geste que le patient refuse d’accomplir (et que la paralysie rend impossible.) Il en déduit que le patient a «trouvé» un langage corporel pour adresser un message psychique, et qu’il a utilisé les symptômes reconnus et classifiés à son époque pour le «traduire» en termes médicaux (ce qui explique que la symptomatologie de l’hystérie va évoluer avec l’histoire de la médecine) .
En faisant ainsi l’hypothèse d’une «conversion» inconsciente du dysfonctionnement psychique en dysfonctionnement organique, Freud postule qu’une représentation mentale peut être à l’origine d’un trouble physique et que ce symptôme est produit par un sujet.
Plus tard, réfléchissant sur les conséquences de la « prématuration » du bébé humain, sur sa fragilité et sa dépendance première à l’ «Autre», il continuera d’explorer le lien complexe entre corps et psyché : un enfant ne peut pas survivre s’il n’est pas nourri, soigné, porté… par des personnes qui lui apportent leur aide. Cet adulte, il en faut au moins un, Freud le nomme "Nebenmensch", personne proche. La tâche de cette Nebenmensch c'est d’accueillir le nouveau né et de l’intégrer au monde humain : elle prend soin de son corps bien sûr, mais elle noue aussi avec lui (par projection, identification) une relation de parole et de désir. Pendant et après la tétée, elle échange avec l’enfant des regards, des sourires, des mots, des caresses, elle l’écoute babiller et lui répond, le berce, lui chante une chanson, lui fait rencontrer ses grands parents, le met dans les bras de ses frères et sœurs… Et c’est avec son corps, sa bouche, ses yeux, ses oreilles, sa peau… que le bébé « connaît » le monde des personnes qui lui sont proches et communique activement avec elles. Ainsi ses pulsions , ses désirs s’étayent sur ses besoins primordiaux…
Freud concevant l’idée de conversion hystérique, d’oralité, d’analité, de sexualité infantile, la notion de pulsion de vie ou d’identification, Lacan décrivant le stade du miroir, Dolto parlant d’ « image inconsciente du corps » ou de castrations symboligènes, voilà des psychanalystes qui tentent d’élaborer des raisonnements et des concepts visant à éclairer l’articulation du corps et de l’esprit, pour tenter de comprendre comment l’histoire relationnelle singulière inscrit sa trace dans la chair. Contrairement aux neuroscientifiques, ils ne plaquent pas des théories toutes faites sur du vivant, ils partent du vaste champ de la clinique du sujet (en particulier de l’expérience de la cure analytique) pour tenter d’en saisir les ressorts.
Scientisme et politique
Ces adeptes de la standardisation oublient aussi que les humains vivent en société, et que les structures économiques, politiques, sociales de ces sociétés évoluent. On n’a pas affaire au même type d’organisation du travail, aux mêmes rapports de domination, aux mêmes savoirs techniques, scientifiques, aux mêmes lois, discours, pratiques culturelles, croyances… selon les lieux et les époques. Il n’existe pas d’« humain standard », alors que Virgile et Maurice Maeterlinck, lorsqu’ils décrivent la vie des abeilles, ont, à peu de choses près, le même objet d’étude sous les yeux à 20 siècles d’intervalle.
En refusant d’admettre que chaque personne s’inscrit dans une histoire sociale et individuelle, réelle et symbolique, les tenants d’une psychiatrie bio-génétique font table rase du passé de l’humanité. En prétendant tout connaître des pathologies mentales grâce aux sciences « dures », en éliminant toutes les autres approches, ils occultent non seulement les apports de la psychiatrie psycho-dynamique et de la psychanalyse, mais aussi ceux de la sociologie, de l’anthropologie, de la philosophie, de l’histoire, de la poésie, de la littérature, du théâtre, du cinéma, de la peinture…
La définition de la déviance est aussi variable selon les époques. Rappelons-nous que l’homosexualité a été considérée comme une maladie, répertoriée dans le DSM jusqu’en 1973. Parmi les traitements proposés aux USA: la castration chimique ou chirurgicale, la lobotomie frontale, ou les électrochocs… La « thérapie par aversion » visait à provoquer un effet désagréable devant un stimulus sensé être agréable, et à le supprimer: les sujets visionnaient des images de porno gay et en cas d’érection recevaient des électrochocs. Il y a là l’alliance inquiétante de la médecine du corps et du comportementalisme que nous connaissons bien. C’est le mouvement militant homosexuel qui a obtenu que cette «maladie » soit supprimé du DSM en 1973. L’homosexualité a été dépénalisée en France en 1982…
Ces mauvais traitements s’accompagnent toujours de stigmatisations des patients utilisées à des fins politiques. Le psychiatre martiniquais Franz Fanon, devenu en 1953 médecin chef de l’Hôpital psychiatrique de Blida, en Algérie (où il introduira la psychothérapie institutionnelle) montrera comment les thèses de l’Ecole algérienne de psychiatrie d’Antoine Porot, dont voici un exemple, sont totalement calquées sur le discours colonialiste : « Hâbleur, menteur, voleur et fainéant, le Nord-Africain musulman se définit comme un débile hystérique, sujet, de surcroît, à des impulsions homicides imprévisibles »…« L’indigène nord-africain, dont le cortex cérébral est peu évolué, est un être primitif dont la vie essentiellement végétative et instinctive est surtout réglée par le diencéphale » … « L’Algérien n’a pas de cortex, ou, pour être plus précis, il est dominé, comme chez les vertébrés inférieurs, par l’activité du diencéphale »…
Et on pourrait multiplier de tels exemples…
Dans ces moments noirs de l’histoire de la psychiatrie, « la Science » est érigée en divinité toute puissante, et elle autorise l’inhumanité.
Aujourd’hui, les tenants de la nouvelle psychiatrie « basée sur les preuves » agissent aussi au nom d’un « savoir » médical et scientifique qu’ils croient supérieur et incontestable ; ils se disent capables de détecter dans le corps les stigmates de la maladie mentale, et de concevoir des traitements pour les éradiquer : ils n’ont aucun doute là dessus, ils vont trouver (oserait-on dire) « la solution finale »…
Ce délire a une fonction politique : nier la violence faite à l’humain dans nos sociétés ultra-libérales.
« Médicaliser l’existence » c’est refuser de chercher ailleurs que dans le corps les causes de nos souffrances (ou, comme le font les «psychologues positivistes », complices de ce déni, refuser d’incriminer la société, en culpabilisant l’individu : un individu isolé de son contexte socio affectif qui serait le seul responsable de son bonheur, quels que soientles traumatismes subis)
Pourtant les recherches abondent qui montrent le rôle central des inégalités sociales dans le malheur humain.
Par exemple, celles des sociologues de l’éducation qui nous apprennent que la réussite scolaire est totalement corrélée au niveau socio-culturel des parents. C’est ainsi que les pédopsychiatres, qui diagnostiquent le TDAH, opèrent sans le savoir (et sans le vouloir) un tri social qui va aboutir à l’étiquetage, la stigmatisation, la mise sous ritaline des enfants des classes défavorisés, en priorité.
Pourtant nous voyons se multiplier les symptômes qui signent un immense « malaise dans la civilisation ».
Salariés précarisés, maltraités, isolés ; management agressif, destruction des équipes, mise en concurrence des individus, injonction à travailler vite, sans projet qui ait du sens… Dépressions, burn out, suicides au travail…
Sentiment d’abandon, d’injustice des populations dans les régions désertifiées où les entreprises ferment, les services publics, les hôpitaux, les commerces, les lieux de culture disparaissent.
Argent-roi et pauvreté honteuse, problèmes pour manger à sa faim, sortir, partir en vacances. Et comment se nourrir, comment respirer, quand les sols et l’eau sont pollués par les pesticides, l’air par les particules fines ? Sentiments de méfiance, de peur, on nous empoisonne, glyphosate, amiante, diesel, les instances de l’état, de l’Europe, gangrénées par les lobbies, ne nous protègent plus, théories du complot, paranoïa…
Sentiment d’impuissance du citoyen : c’est l’oligarchie politique, économique et financière mondialisée qui décide de notre destin ; indignation, colère devant l’absence de morale de ces « élites », leur refus du débat, leur déni de la démocratie, leurs politiques de dumping social et fiscal dans une Europe créée « pour construire la paix » ; haine de l’étranger, agressions racistes, antisémites, sexistes ; violence des politiques sécuritaires, guerrières, chasse aux migrants, honte, culpabilité …
Impossible d’arrêter la machine infernale qui nous entraîne vers notre fin, la fin du vivant sur notre planète, diminution dramatique du nombre des insectes pollinisateurs, des poissons dans l’océan envahi par les plastics, réchauffement climatique, sentiments d’angoisse, désespoir .
Et partout des écrans, des machines, plus personne derrière les guichets de la Poste, de Pôle Emploi, des Caisses de retraite, dans les gares, les administrations, plus personne au bout du fil, faites le 1, faites le 2, le 3, prenez rendez vous par internet, pour obtenir votre passeport, pour vous soigner, le diagnostic sera fait grâce aux résultats d’examens biologiques, les radios consultées sur écran, l’ordonnance envoyée par mail, plus personne pour vous examiner, vous toucher, vous regarder dans les yeux, vous tenir la main et, « plus la consultation est courte, plus l’ordonnance est longue », dépendance, addictions, alcoolisme, et rien non plus, pour aider les plus fragiles, quand ils craquent, vacillent, s’effondrent, eux que nous savions accueillir et accompagner, dans nos consultations, nos CMP, nos hôpitaux psychiatriques de secteur, eux que nous allions voir à domicile, à l’appel de leur famille, les voilà seuls, livrés à eux mêmes, à leurs sentiments de désêtre, à la rue, ou enfermés chez eux avec un traitement neuroleptique retard, recevant, une fois par mois, la visite d’une équipe mobile, jamais les mêmes infirmiers, le même médecin, jamais une personne connue, reconnue et qui vous reconnaît, une personne de confiance, avec laquelle renouer du lien à chaque visite, communiquer, parler, se consoler, plus de personne proche, plus d’actuel « Nebenmensh », juste des machines à scruter nos cerveaux…