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Billet de blog 29 décembre 2016

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Livraisons d’armes américaines aux rebelles : «Fruit d’une volonté de pourrir encore

Frédéric Pichon est docteur en Histoire contemporaine et enseigne la Géopolitique. Auteur d’une thèse sur la Syrie, il est chercheur associé à l’équipe Monde Arabe et Méditerranée de l’Université François Rabelais de Tours. Il donne régulièrement des conférences sur des questions liées à la géopolitique du Moyen-Orient.

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29

Déc

2016

Livraisons d’armes américaines aux rebelles : «Fruit d’une volonté de pourrir encore la situation», par Frédéric Pichon

par Les-crises.fr DT dans Crise Géopolitique

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Source : Russia Today, Frédéric Pichon, 09-12-2016

Des combattants rebelles dans un quartier d’Alep encore sous leur contrôle le 8 décembre

Frédéric Pichon est docteur en Histoire contemporaine et enseigne la Géopolitique. Auteur d’une thèse sur la Syrie, il est chercheur associé à l’équipe Monde Arabe et Méditerranée de l’Université François Rabelais de Tours. Il donne régulièrement des conférences sur des questions liées à la géopolitique du Moyen-Orient.

La décision de Barack Obama de lever les restrictions sur l’aide militaire à l’opposition syrienne est un acte incompréhensible, car les Etats-Unis savent que les armes peuvent se retrouver dans des mains inconnues, selon l’analyste Frédéric Pichon.

RT France : Comment, à votre avis, la décision de Barack Obama de lever l’embargo sur la livraison des armes aux rebelles en Syrie va influencer la situation en Syrie ?

Frédéric Pichon (F. P.) : Cette décision est incompréhensible dans la mesure où les Etats-Unis savent très bien, avec le recul, que beaucoup d’armes livrées par les Etats-Unis ont fini en de mauvaises mains. Les leçons n’ont pas été tirées et ils continuent de vendre des armes dont on n’est pas sûr des destinations. Quand on voit l’échec cuisant du programme de formation des rebelles syriens qui a coûté 500 millions de dollars aux Etats-Unis pour avoir enfin des rebelles sûrs à qui on pourrait délivrer des armes sans risque, quand on voit qu’à la fin ils n’en ont formé probablement qu’une demi-douzaine, ce genre de décision est assez incompréhensible. Elle est compréhensible si l’on imagine que de la part de l’administration américaine il s’agit de prolonger cette guerre pour entraver en quelque sorte son dénouement, notamment par l’implication de la Russie dans un processus, en attendant peut-être aussi que Donald Trump prenne ses fonctions. Le dernier s’est déclaré plutôt favorable à ce que la Russie règle le problème syrien. A chacun son terrain de jeu, les Américains en Irak et la Syrie pour la Russie. C’est à la fois incompréhensible et en même temps, je pense que c’est le fruit d’une volonté de pourrir encore la situation, alors qu’elle est en train de se clarifier depuis la chute d’Alep Est.

Les Etats-Unis sont obligés d’avouer qu’ils ont échoué ou qu’ils n’ont jamais vraiment aidé cette rébellion

RT France : La décision de lever l’embargo sur l’aide militaire aux rebelles, pourrait-elle être provoquée par le succès de l’armée syrienne à Alep ?

F. P. : Oui, ce sont des gages donnés à certains alliés des Etats-Unis, ceux du Golfe en particulier, pour faire semblant de dire que l’Amérique n’abandonne pas le terrain à Bachar el-Assad, mais dans la réalité c’est ce qui est en train de se passer et les Etats-Unis sont obligés d’avouer qu’ils ont échoué ou qu’ils n’ont jamais vraiment aidé cette rébellion. A mon avis, c’est vraiment un gage donné aux Saoudiens et peut-être aux Turcs, car la Turquie reste dans l’OTAN et les Etats-Unis ne savent pas trop comment faire.

C’est un tournant en termes d’information, de réalité de ce qui se passe sur le terrain et c’est aussi un tournant politique

RT France : Pensez-vous que le fait qu’Alep soit progressivement libéré par l’armée syrienne puisse constituer un tournant dans la guerre syrienne ?

F. P. : Tout le monde s’en rend bien compte, d’abord parce que la libération d’Alep va permettre aussi et a déjà permis que soit dissipé un certain nombre de narratifs occidentaux. Prenez pour preuve la surestimation faite de la population qui vivait encore à Alep Est, on a entendu parler des 250 000 habitants, il est probable qu’on est à beaucoup moins de 100 000, même 50 000. Et puis, la qualité même des rebelles qui tenaient Alep, on nous a vendu une rébellion démocratique, elle est quand même dominée par les djihadistes du Front al-Nosra. C’est un tournant en termes d’information, de réalité de ce qui se passe sur le terrain et c’est aussi un tournant politique, vu le fait que ni les Etats-Unis, ni personne n’est venu au secours de ces fameux rebelles montre bien qu’il y a un consensus international, y compris américain, je crois, pour que Bachar el-Assad se maintienne au pouvoir. Pour ce dernier c’est une manière de prouver qu’il est là et qu’il n’abandonnera pas tout ce territoire utile de la Syrie à une rébellion qui n’a jamais été capable de se faire un contrepoids politique ou d’être compétente dans l’administration du territoire entier.

L’histoire jugera durement cette séquence diplomatique française

RT France : Pensez-vous que la coalition occidentale puisse parvenir à un accord avec la Russie concernant le consensus avec Bachar el-Assad ? Pourrait-on aboutir à un consensus entre tous les alliés, alors que la France tient une réunion ministérielle du groupe des pays affinitaires sur la Syrie demain ?

F. P. : La France c’est un cas à part. A la limite, les Etats-Unis sont plus réalistes que la France sur le dossier syrien. La réunion qu’organise Paris dans les jours qui viennent c’est la démonstration de cet aveuglement, acharnement à continuer à jouer un mauvais cheval et à s’enserrer dans une position qui est évidemment politiquement contre-productive et qui en réalité ne donnera rien, sinon l’impression de plus en plus croissante que nous avons aligné notre diplomatie sur celle des pays du Golfe. Je ne suis pas le seul à le dire, il y a des ouvrages qui sont sortis en France récemment qui le dénoncent et le disent. On donne encore une fois le spectacle de cette soumission étrange. L’histoire jugera durement cette séquence diplomatique française.

Source : Russia Today, Frédéric Pichon, 09-12-2016

4 réponses à Livraisons d’armes américaines aux rebelles : «Fruit d’une volonté de pourrir encore la situation», par Frédéric Pichon

  1. Louis Robert Le 29 décembre 2016 à 02h28

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    “La décision de Barack Obama de lever les restrictions sur l’aide militaire à l’opposition syrienne est un acte incompréhensible…”?

    *

    Pas du tout, puisqu’elle va dans le sens de la politique de l’Empire dont elle sert les intérêts, officielle et dûment documentée, bien qu’inavouée voire complètement tue depuis des décennies par les médias occidentaux. Un retour à la réalité des choses s’impose donc urgemment!

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  2. blue rider Le 29 décembre 2016 à 02h52

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    la France a toujours été à la pointe car elle a voulu faire comme les USA depuis septembre 2001, et ne pas se contenter de négocier des contrats gaziers, mais aller au delà et les accompagner de mesures militaires face aux récalcitrants. La prise de 18% de Rosneft par le Qatar, le déblocage de 8 milliards ‘euros d’investissements de TOTAL en Iran montrent que la diplomatie française est en roue libre, signant l’absolue médiocrité criminelle de Fabius, Ayrault, et autres Guigou, elle qui aurait dû être la courroie de transmission entre l’Assemblée et sa commission des affaires étrangères, et le quai d’Orsay, et qui n’aura été qu’une néo-conservatrice Kilntonienne déguisée en suffragette droitdelhommiste. Honte sur cette clique inféodée à l’oligarchie pétrolière, gazière et bancaire qui nous lie désormais au Qatar, qui lui a compris tandis que Sarkozy, l’ami du Qatar qui prenait son jet pour Doha comme nous le métro pour Pantin, est en train -enfin- de sombrer aux oubliettes (mais c’est pas sûr…).

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