Il fût un temps où nous avions encore le choix de regarder, de participer à un événement sportif. Aujourd'hui, que nous le voulions ou non, nous ne pouvons pas ignorer la présence des jeux olympiques : à la télévision, à la radio, sur les panneaux publicitaires, devant votre mairie, dans le programme scolaire du trimestre de vos enfants, sur votre application de compte bancaire, sur les panneaux d'affichage autoroutier, dans les transports en commun, sur les produits alimentaires, sur l'intranet de votre entreprise, même sur le bitume de l'autoroute ! Cette injonction au bonheur collectif du sport-compétition aux dimensions pharaoniques nous oblige à être immergé, impliqué, dans le Grand Spectacle. Il attire notre attention en permanence, nous hypnotise, au point de ne plus voir autre chose... Cela me rappelle une technique de magicien : la diversion. Nous sommes divertis par des artifices, des paillettes, du bruit autour des anneaux olympiques. Ce tour de passe-passe contribue à nous détourner d'une réalité morose certes, mais surtout nous rendre spectateur impassible et docile, plus que acteur en rébellion contre toutes mesures antisociales et liberticides de notre pays. Ce sont les mauvais tours qui se jouent derrière le tissu soyeux de la veste du prestidigitateur. Qui sont les manipulateurs, les saltimbanques alors ? Inutile de chercher bien loin, il suffit de prendre du recul, de lire la presse indépendante comme Mediapart ; ou alors de se promener à pied à Aubervilliers dont les jardins de potirons ont été remplacés par du béton, ou devant l'hôpital Delafontaine de Saint Denis devenu un centre d'hébergement d'urgence à l'initiative de sages-femmes pour les sans abris, les indésirables... La liste est longue comme une course de fond et le temps me manque pour énumérer d'autres exemples de "nettoyage social" comme l'appellent certaines associations.

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Ces JO sont aussi l'incompréhension et l'incohérence des décisions prises par les organisateurs, ceux qui disent la main sur la ceinture Louis Vuitton "c'est qui qui rentre, c'est qui qui rentre pas" : les videurs. Mais pas les videurs du Folies de Pigalle, les valideurs au cols blancs qui selon des intérêts qui nous dépassent, choisissent quel pays peut prétendre à présenter ses athlètes pour porter la flamme à travers la campagne française, (pour les départements qui voudront bien mettre la main au portefeuille pour y sortir un gros billet de 180 000 euros). La Russie, ou Cuba s'étonneront-ils de la présence d'Israël ? On marche sur la tête !
J'en arriverai presque à cautionner Miranda, cette influenceuse Tik-Tok qui dissuade les (riches) étrangers de venir à Paris pour les jeux cet été. "Ça va être un spectacle de merde", dit-elle, tout en dénonçant la condition des travailleurs sur les chantiers, l'augmentation des prix, etc. Si j'avais un compte sur ce genre de réseau social, j'aurai rajouté : "Venez nombreux aux jeux populaires de Grenoble, au programme : Jeux intergénérationnels, stands éco-foot, olympiade culturelle, recyclerie sportive !"
La semaine dernière j'ai rêvé que des tracteurs géants venus des quatre coins de la France, s'étaient réunis à Paris pour y déverser quelques tonnes de compost sur lesquels fleurirent instantanément des pieds de tomates immenses dont les gourmands étranglaient les feux tricolores des Grands boulevards pour recouvrir la malle géante - que dis-je - le sarcophage Louis Vuitton des Champs Elysées... (ça va, c'est qu'un rêve...)
Pour terminer, j'ai quand même espoir qu'il y ait une retombée économique chez les petits commerçants, qu'il y ait une prise de conscience de certains élus qui auront renfloué les caisses pour mener à terme des projets sociaux et environnementaux profitant aux nécessiteux. J'ai espoir de lire un article dans Mediapart d'ici un an, qui aura réalisé une brillante enquête d'un bilan positif pour les "basses classes" comme on dit au Québec. Pour l'heure, je m'efforcerai de porter un regard respectueux des athlètes de tous pays que je regarderai d'un œil distrait entre deux écrans d'un bar tabac, tout en pensant particulièrement aux sportifs paralympiques qui peinent - eux aussi - à se financer pour les jeux.