Au soir de son élection présidentielle, Nicolas Sarkozy annonçait avec éclat le « retour de la France en Europe ».
Depuis son vote négatif sur le traité constitutionnel en mai 2005, la France se sentait mise à l’écart du jeu européen après en avoir grippé la machine, son peuple ayant désavoué la marche en avant de la construction européenne.
L’accord des 27 en décembre dernier sur le Traité de Lisbonne et sa ratification rapide par le Parlement français marquent une volonté forte de reprendre la main sur le dossier institutionnel européen avant même que la France ne se retrouve au poste de commande pour 6 mois.
Tout se passe comme si ce retour vigoureux sur l’échiquier européen voulait effacer l’affront ou le lâchage politique de la majorité des citoyens français exaspérés par une dynamique européenne souvent incomprise et non maitrisée
La France et la Hollande étaient montrées du doigt comme les mauvais élèves en Europe, alors que nombre de pays européens auraient connu le même résultat s’ils avaient opté pour un référendum plutôt qu’une ratification parlementaire.
Toujours est-il que le rejet français du traité constitutionnel allait geler le volet institutionnel de la construction européenne pendant plus de deux ans.
Dans les semaines qui viennent, le « retour » de la France dans le jeu diplomatique européen, présidence française oblige, aura une signification particulière pour les citoyens français qui ne veulent pas que l’on fasse abstraction du signe important émis en 2005.
Ils seront attentifs à ce que ce « retour » dans le jeu européen va signifier pour eux et leur vie quotidienne.
Car il faut bien reconnaitre l’extrême difficulté qu’ont les gouvernants en France et en Europe à faire partager à leurs citoyens le projet européen en les associant autrement que par référendum ponctuel ou à travers l’élection des parlementaires européens tous les 5 ans.
Lors d’un colloque organisé récemment à l’Unesco sur « Une union pour la méditerranée pourquoi faire et comment ? », les dirigeants français ont clairement affirmé que l’enlisement européen de la question méditerranéenne lancée en 1995 à Barcelone a été le résultat du strict accaparement, du dossier par les instances étatiques des pays méditerranéens avec une Union européenne en position d’octroi conditionnel et non de réelle coopération.
Pour sortir de cet enlisement, il apparait indispensable d’associer les sociétés civiles au processus lui-même du développement en Méditerranée qui passe par l’élaboration de projets portés par les acteurs économique et sociaux avec l’appui de fonds méditerranéens.
Cet exemple de l’une des politiques majeures que l’Union européenne pourrait infléchir sous gouvernance française illustre bien ce que pourrait être un véritable « retour » de la France en Europe qui passe également par des mesures et instruments de réelle implication des citoyens et de l’ensemble des acteurs économiques aux politiques et projets mis en œuvre.
Dans cette optique, deux initiatives majeures et non révolutionnaires de la Présidence française pourraient accentuer l’engagement des citoyens dans les dynamiques démocratiques européennes : la première serait de donner au Parlement européen les mêmes prérogatives que la Commission européenne en termes d’initiatives et de propositions dans tous les domaines couverts par les politiques européennes.
L’autre initiative consisterait à faire en sorte qu’aux prochaines élections européennes de 2009, l’ensemble des listes politiques soient des listes européennes et non plus nationales.
La France donnerait un signe fort, et surtout historique, de son retour en Europe si elle donnait enfin à l’Union européenne les moyens de mieux associer les peuples européens à la définition, la mise en œuvre et la maîtrise de ses actions.