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Maire de Saint Médard en Jalles VP Bordeaux Métropole député suppléant 6 eme de Gironde et Militant de Gauche.

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Billet de blog 31 juillet 2024

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La gauche face à ses responsabilités

On le voit le blocage est aujourd’hui plus politique qu’arithmétique. La composition actuelle de l’assemblée nationale n’est pas la cause du blocage politique elle en est le résultat. Face à un Président de la République qui s’entête et a perdu son crédit politique la responsabilité de la gauche est immense.

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Ainsi, trois semaines après le second tour des élections législatives, voici notre pays toujours sans gouvernement. L’idée avancée par Emmanuel Macron d’une trêve olympique se heurte à trois objections majeures. En décidant, seul, d’une dissolution inopportune et dangereuse pour notre démocratie il ne pouvait ignorer qu’en effet,  il lui faudrait changer de gouvernement dans ce moment particulier. 

L’organisation des JO 2024 était si avancée, qu’il n’y avait aucun risque à ce que de nouveaux ministres prennent le relais avec un COJO et une administration parfaitement prêts pour l’événement. 

Aucun gouvernement chargé d’expédier les affaires courantes n’avait duré plus de huit jours jusqu’alors. Enfin, rien dans notre constitution ne lui attribue ce pouvoir de prolonger outre mesure la durée de vie d’un gouvernement démissionnaire. 

Reste l’argument d’une absence de majorité claire issue des urnes le 7 juillet. Remarquons d’abord qu’il s’agit du choix du peuple français et de sa réponse à la question qu’il lui avait lui même posé. 


Qu’il s’en trouve embarrassé n’est ni un argument politique ni un attribut constitutionnel. La tradition républicaine comme la logique de nos institutions aurait exigé qu’il nomme la, ou le premier ministre désigné par le groupe parlementaire le plus nombreux. Charge au Premier Ministre de faire la démonstration qu’il pouvait gouverner, en réunissant des majorités à géométrie variable,  ou d’empêcher une motion de censure. En tout cas, ce n’est en rien le rôle du Président qui n’est pas chef de la majorité, mais bien chef de l’État. 

Pour comprendre cette situation de blocage, il faut donc regarder autre chose que l’arithmétique parlementaire. 

Cette dissolution et ses résultats, qui ont fait craindre l’arrivée de l’extrême droite au pouvoir, viennent au bout d’un processus de sept années en forme d’échec radical du macronisme. En 2017, il gagne sur deux promesses : changer la démocratie en profondeur et gouverner en même temps à gauche et à droite. Le bilan qui a conduit à la dissolution sept ans après : la pratique d’un pouvoir plus vertical et solitaire que jamais, le mépris de tous les corps intermédiaires et des mouvements sociaux. Et un en même temps devenu à droite toute. C’est d’ailleurs un cas d’école inédit qu’un Président élu par la gauche, grâce au crash de François Hollande et François Fillon , puis réélu par une partie de la gauche contre Le Pen, soit désormais soutenu par l’électorat traditionnel de la droite orléaniste. 

Il ne s’agit pas ici de faire le bilan exhaustif de ce septennat raté. Rappelons simplement avec quelle violence le mouvement des gilets jaunes fut traité dans la rue, nié dans ses aspirations et comment Mr Macron a imposé en force aux français une réforme des retraites dont ils ne voulaient pas. La poursuite d’une politique libérale de réduction des services publics, injuste fiscalement, sans accompagnement social digne de ce nom et mitigée dans ses résultats ne fut elle jamais remise en question malgré l’explosion de la pauvreté et des inégalités. 

La colère de nos concitoyens rencontrant une forte préoccupation sécuritaire post attentats, l’offensive médiatique redoutable des relais de l’extrême-droite ne pouvait conduire dans ces conditions qu’à une explosion du vote RN, autre élément majeur du bilan de Mr Macron . 

Dans cette période post-électorale le rôle du Président eut été de donner corps et vie au Front Républicain qui s’est levé pour empêcher une victoire du RN. Cela supposait un changement de gouvernement, de pratique du pouvoir , de méthode démocratique et de politique économique et sociale. C’était manifestement trop lui demander. Emmanuel Macron a pour le moment pris l’exact contre-pied de ce que le résultat des urnes exigeait de lui pour : contester politiquement le résultat, se tourner plus encore vers la droite, souligner une nouvelle fois qu’il décide selon son bon vouloir, maintenir le cap des politiques conduites depuis sept ans, et enfin remettre en cause le Front Républicain en excluant à nouveau, dés l’élection passée, une partie de la gauche de son périmètre. 

On le voit, le blocage est aujourd’hui plus politique qu’arithmétique. La composition actuelle de l’assemblée nationale n’est pas la cause du blocage politique elle en est le résultat. Face à un Président de la République qui s’entête et a perdu son crédit politique, la responsabilité de la gauche est immense. Disposant du nombre de députés le plus important, il lui appartient de trouver les moyens de répondre aux attentes sociales, démocratiques et écologiques de son électorat et plus largement, bien sûr, du pays. 

Pour ce faire, elle doit renoncer aux postures pseudos radicales qui ne visent qu’à préparer en réalité 2027 pour proposer à la France une voie nouvelle. 

Une nouvelle méthode de gouvernement s’appuyant sur la négociation avec acteurs sociaux et les élus locaux et bien entendu sur le Parlement en acceptant de regarder la situation telle qu’elle est pour donner un contenu et un débouché au Front Républicain autour de quelques idées forces, le reste étant renvoyé au choix de nos concitoyens en 2027 . Un plan d’urgence pour nos services publics, la souveraineté industrielle, la transition écologique, des mesures fortes en faveur du pouvoir d’achat, l’abandon de la réforme des retraites, le retour d’une police de proximité, le soutien à l’Ukraine, l’engagement fort pour un cessez le feu immédiat à Gaza avec libération des otages et retour aux négociations pour une solution à deux états, l’instauration de la proportionnelle, une nouvelle étape de décentralisation pour faire confiance aux territoires, tout ceci devrait pouvoir rassembler à condition d’accepter de négocier et de construire. À condition de s’occuper du pays et des françaises et des français ici et maintenant plutôt que de s’occuper de sa petite entreprise pour 2027. 

La cérémonie d’ouverture des JO a envoyé un message fort au monde. Celui d’un peuple divers, qui sait faire de grandes choses quand il se rassemble pour regarder l’avenir. A défaut d’un Président de la République capable de se placer à ce niveau, il appartient à la gauche d’assumer ses responsabilités pour le pays.

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