30 janvier 1933
J'ouvre la fenêtre
Plak plak plak
La rue noire de monde
Des lumières dansent
Plak plak plak
Je n'ai pas compris
Je ne voulais pas
Une invasion
Une métamorphose
Irréversible
Je ne voulais pas.
Plak plak plak
Régularité inhumaine
Rangs serrés
Le coeur ne sait pas marcher au pas.
Je referme la fenêtre
Plak plak plak
Dans ma tête
Plak plak plak.
Je m'approche de ma toile
Elle attend
Imperturbable
Je sais qu'elle peut m'entendre
Je sais qu'elle peut l'entendre.
Je baisse les yeux
Mes pinceaux soudain énormes
Les larmes exagèrent tout.
Tu sais
Il y avait un monde fou
Fou
Fou.
Partout
Dans ma rue
Là-bas
Ailleurs
Partout.
Je vais le dire
Calmement
Je vais te le dire
Et je n'aurai plus peur.
Vu d'ici
On dirait des fourmis
Nombreux
Silencieux
Inoffensifs?
Les fourmis oui.
Plak plak plak
C'est pour nous impressionner
Mais moi je n'ai rien fait
Je ne crois pas
Rien de mal en tous cas
Peindre j'ai le droit
Je crois.
Ce qui m'inquiète tu vois
C'est qu'ils ont l'air sérieux
Très sérieux.
Au carnaval
On se déguise
On fait du bruit
Mais on rit, non?
Ce qui m'inquiète tu vois
C'est qu'ils ne m'aiment pas je crois.
Ils ne me connaissent pas.
Je ne comprends pas.
Ce soir j'ai froid
Je veux de la chaleur
entre toi et moi.
Couleur feu
Je n'ai plus peur
Couleur feu
Dans les rangs serrés
Que leur sang s'affole
Que leur coeur marque le pas.
Toi qui regarde ma toile
Regarde
Je n'avais pas peur.
La colère,
la nausée,
la dignité.
Malgré les plak plak plak
Mon pinceau ne pâlira jamais.