DEMOCRYPTE

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Billet de blog 3 avril 2011

DEMOCRYPTE

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VIE DE CESAR SARKOMINUS VI

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Chapitre VI Où l’on apprend tout à la fois la véritable raison du voyage de Démocrite dans le pays de Droite et la véritable histoire de l’enfance de Sarkominus

Résumé des épisodes précédents : Le jeune esclave Protagoras raconte le séjour du sage Démocrite dans la petite colonie grecque de cap negriti, passablement affolée depuis l’élection, par les barbares des environs, d’un nouveau César, nommé Sarkominus. Une complicité commence à naître entre le jeune homme et le sage. Au cours de la nuit, Protagoras a introduit dans la colonie un mystérieux visiteur qui s’est longuement entretenu avec le sage.

1. Où l’on découvre que le mystérieux visiteur de la nuit n’était autre que Guainoïus.


Au petit matin, en traversant l’artère principale de notre petite colonie, je tressaillis à la lecture d’une inscription peinte sur un mur : « Démocrite = blablabla. » Je fis encore quelques pas, et je lu sur une palissade : « Démocrite = vendu ». Un peu plus loin, un autre graffiti était encore plus explicite : « Démocrite = sarkominusiste honteux » Je couru affolé jusqu’à la chambre de Démocrite, où je le trouvais à faire ses bagages.
« - Tu tombes bien, me dit-il. Veux-tu bien appeler ton maître Théodotos. Je dois lui présenter mes remerciements pour son accueil. »
« - Vous avez vu les graffitis ? », demandais-je.
« - Oui, répondit-il. Il faut croire que mon visiteur n’aura pas été aussi discret que je l’aurais souhaité… »
« - Vous êtes vraiment un vendu ? Un traitre ? », ai-je demandé désolé.
Démocrite me sourit.
« - J’expliquerais tout cela au Conseil, répondit-il. Va me chercher Théodotos. »
Je revins bientôt, accompagné de Théodotos et de plusieurs membres du Conseil de la colonie. Ils avaient la mine grave et gênée. Démocrite les invita à s’asseoir, ce qu’ils firent en silence.
« Je sais qu’il n’est pas d’homme, dans votre colonie, mieux informé que vous, affirma Démocrite à l’adresse de Théodotos. Il serait puéril, de ma part, de dissimuler un fait qui éclatera au grand jour. Et puis, je suis trop vieux pour craindre de me perdre de réputation ! Aussi porterais-je à votre connaissance tous les détails de l’affaire. Vous en avez sans doute eu vent, - mais peut-être vous refusez-vous à le croire -, mais j’ai reçu, hier soir, ce Gainoïus, que Xénophon vous a abondamment dépeint*. Il m’a proposé de rallier Sarkominus. J’ai évidemment demandé un délai de réflexion. J’insiste sur le fait que le terme de « ralliement » est de toute manière inapproprié : je n’ai accepté qu’une mission ponctuelle. Je dois par égard pour votre amicale hospitalité vous expliquer ma décision et vous relater en détail mon entretien avec Gainoïus.
Je cru d’abord que Guainoïus avait le dessein de m’intimider, car il entama notre conversation en me demandant si je craignais Sarkominus. J’ai répondu avec aplomb : « Evidemment, non. »
« - A moi, il me fait peur, murmura-t-il alors en s’approchant de moi. Puis, après avoir inspecté du regard les recoins de la chambre, il ajouta en utilisant par prudence le dialecte atlantidéen : « Gainoïus tou Démocrite : Sarkominus iz oveur côntrol ! Mai dai ! Aï ripit : Sarkominus iz oveur côntrol ! Mai dai ! »
« - oveur ? » fis-je surpris.
Gainoïus hocha de la tête. A son air désespéré je vis qu’il ne mentait pas. Il ajouta : « Its âne amerdjanssi ! Mai dai ! Aï ripit : its âne amerdjanssi !  Mai dai ! »
 
Comme il était très nerveux et couvert de sueur, je l’ai invité à s’asseoir et à m’exposer la situation détail.
« - Au début tout allait bien, raconta Gainoïus. On a bien eu quelques soucis avec les caisses du Palais, mais cela ne nous a pas affecté. Sarkominus a même augmenté ses émoluments de 172% (1) ! Il est ensuite parti faire un séjour à l’Internationale des ploutocrates**... Tout baignait ! A son retour, Sarkominus nous a dit : « Lorsque je suis allé chez mon kiné pour me faire masser, il m’a dit que j’avais les muscles bien détendu. Et il m’a expliqué pourquoi : c’est l’effet de ne plus avoir le stress de celui du dessous. Quand on a quelqu’un au dessus de soi, c’est stressant, ça tend les muscles. Mais il m’a dit que maintenant que je n’ai plus personne au dessus de moi je suis tout à fait détendu et je peux donc continuer à être présent partout. » (2). Vous devinez la suite ? »
« - Non, pas vraiment », fis-je.
« - Avoir un chef au dessus de lui, m’expliqua Gainoïus, ça le bloquait. Et maintenant qu’il n’a plus Chiracus au dessus de lui, il s’est débloqué... Imaginez un ressort qui aurait été tendu et retendu pendant des années… Et puis, d’un coup, vous relâchez ! »
« - Et donc ? » demandais-je curieux.
« - Et bien il se met à courir, sans pouvoir s’arrêter !, répondit-il sans dissimuler son affliction. Il lui arrive de faire des pauses. Mais à tout moment, il peut se relever et se remettre à courir et nous, ses conseillers, devons le suivre. Nous, lui demandons : « Et là, t’es parti pour où ? » ; et lui, il nous répond : « je suis en retard, je dois être partout. » On s’est organisé avec Fillonus, Hortefeucus et Guéantus pour faire des relais, mais nous ne tiendrons pas longtemps. »
« - Je suppose, fis-je avec une pointe d’impatience, que vous n’avez pas demandé audience au plus grand sage de la Grèce pour parler courses pédestres. »
« - En effet, admit-il. Vous devez d’ailleurs vous douter des raisons de ma présence… »
Je pris un air idiot.
« - Voyons, Démocrite, reprit-il, je suis venu pour LA LETTRE D’AUGUSTE COMTUS ! »
« - Ah oui ?, me suis-je exclamé, où avais-je la tête ? »
« - Nous en avons besoin ! Donnez là moi !, intima-t-il. Cette lettre contient des prédictions sur le règne de Sarkominus. Et grâce à elles, nous espérons bien tracer une perspective à son règne et canaliser son énergie dans une direction précise. »
Je pris un air dubitatif. « Cette lettre contient des phrases obscures. A l’image d’Auguste Comtus, personnage étrange et fantasque. Je ne l’ai rencontré qu’une fois, à sa demande, parce qu’il voulait m’exposer ses théories pleines d’idéalismes. Je l’ai d’ailleurs rapidement orienté vers Platon, mieux à même d’accueillir ses élucubrations. Je m’étonne encore d’avoir été le destinataire de cette lettre. Mais je m’étonne plus encore que Sarkominus y prête le moindre intérêt. Car - dois-je le rappeler ?-, Sarkominus a assassiné Auguste Comtus, alors qu’il était pour lui, une sorte de précepteur et peut-être même une sorte de père. »
« - Sarkominus est le premier à regretter ce geste impulsif ! s’exclama Gainoïus. S’il est un évènement dont il se repent sincèrement, c’est bien de ce meurtre qu’il commit dans l’innocence de l’enfance. Il était tout petit. Il ne se rendait pas compte. Chaque fois qu’il évoque son ancien précepteur, on le dirait harcelés par les Erinyes. A cette évocation, sa souffrance est telle, qu’il ne peut s’empêcher de prendre quantité de mesures qui toutes visent à mettre les enfants hors d’état de commettre ce genre de crimes. N’a-t-il pas créé, par soucis de prévention, un commissariat aux questions enfantines, chargé :
- de ficher tous les enfants du pays ;
- d’informer en temps réel les préfets de ville si d’aventure l’un d’eux tire la langue à son professeur ou fait l’école buissonnière ;
- de les conduire devant les préfets de la milice impériale s’ils récidivent ;
- de créer des prisons spéciale pour les accueillir (3).
Nous ne désespérons pas non plus de créer un corps de devins spécialement chargés de visiter les femmes en couche pour prédire le mal que leurs enfants s’apprêtent à commettre (4). Vous conviendrez que ces mesures de prévention, témoigne de son désir de réparer, autant que possible, les tords qu’il fit à son précepteur. »
« - C’est une curieuse manière de se repentir », fis-je observer.
« - Vous avez raison ! Mais c’est la sienne ! », répliqua Gainoïus.
« - Vous savez, repris-je en me levant et en déambulant dans la chambre, cette histoire de lettre est bien ancienne. Je l’ai reçu il y a plusieurs dizaines d’années. »
Gainoyus se leva à son tour et marcha à mes côtés.
« - Décidemment que vous connaissez vos classiques !, me dit-il. C’est une vieille ruse que de poser en évidence ce que l’on veut dissimuler ! Ce document posé sur la cheminée n’est-ce pas la lettre testamentaire d’Auguste Comtus ? »
« - Ah ! Non ! Pas du tout !, répliquais-je, c’est une facture. Je les pose toujours en évidence sur ma cheminée. Sans doute pour ne pas y penser. »
« - Mais la lettre de Comtus, vous la possédez bien ? », me demanda Gainoïus, les yeux brillants.
« - Oui », ai-je répondu. Comme ma sandale était défaite, je me suis accroupi pour la remettre en état.
« - Ce document précieux, me demanda Gainoïus, peut-être le portez-vous, sur vous-même, en permanence ? »
« - Oh ! n… », allais-je répondre lorsqu’un bruit métallique retentit sur le sol. Juste à côté de mon pied droit, un couteau venait de chuter.
« - Comme je suis maladroit ! », s’exclama Gainoïus.
« - Faites attention ! Si vous n’y prenez garde, un jour vous assassinerez quelqu’un ! » lui dis-je en lui tendant, rieur, son couteau. Bon ! Je rencontrerais Sarkominus et je vous apporterais la lettre d’Auguste Comtus. Qu’il soit clair que je n’accepte de vous rendre ce service qu’à seule fin de satisfaire ma curiosité : la divination est un art qui m’a toujours laissé dubitatif, mais je ne voudrais pas mourir sans avoir examiné à fond la question des prémonitions. »
Gainoïus afficha un sourire radieux et me remercia. Il m’a remit une tablette m’autorisant à circuler dans le pays de Droite en me conjurant de ne jamais m’en départir, les « sans-tablettes » étant expulsés sans ménagement. Je lui donnais rendez-vous dans une quinzaine de jours, le temps pour moi de me rendre jusqu’à Lutèce, en précisant que je souhaitais faire ce voyage par mes propres moyens.

2. Où l’on découvre la lettre et les prédictions d’Auguste Comtus


Voilà, Théodotos, la relation précise de mon entretien avec Gainoïus. Je dois pour être exhaustif vous donner à présent lecture de la lettre testamentaire d’Auguste Comtus :
« Au plus grand sage de la Grèce,
Je meurs de la main de l’être que j’aimais le plus. Tu trouveras ci-après mes prédictions concernant mon fils chéri - et pardonné -, Sarkominus, en espérant quelles t’aideront à théoriser la question du destin et de la divination.
Voici mes prédictions :
Dans le Repaire du Cyrnosien, il découvrira le secret de la puissance qui perdure. Mais il trahira le Cyrnosien pernicieux, afin de rallier le Père des Repaires.
Il formera une paire performante, mais trahira de manière peu pertinente le Père des Repaires, en se faisant compère d’un pair de trente ans.
Par des repères lumineux, il ne se perdra pas, et sauvera ses pairs de la fureur du père des Repaires.
César, il ne lui sera jamais permit d’endosser la toge paternelle des Césars, plus perfide que la tunique de Nessus.
Premier parmi ses pairs puissants, les peuples de la terre le salueront d’un : « Salut petit Père Vert ! »
Mais, à force de se démultiplier il rencontrera son double.
Et, lancé à la poursuite de l’Atlantide, le pays de Droite semblable à une immense galère dans un monde qui est devenu un village (5), prendra l’eau de toute part.
Avant que ses péroraisons ne l’obligent à se percher sur le mont du Père des hommes et des dieux, un vieillard à l’esprit tortueux fera trembler le Palais en révélant ce que l’astucieux sophiste au cœur gonflé d’amertume a caché à Hermès. Le vieillard me rejoindra aux enfers, s’il veut une certitude.
Auguste Comtus. »
« - Je rejoins donc Sarkominus, conclut Démocrite, car c’est, dans le laps de temps qui me reste à vivre, ma seule chance d’élucider la question de la divination. Vous comprenez bien que si je dois découvrir que le mot « destin » désigne autre chose qu’une ineptie, alors je devrais reconnaître que la Nécessité gouverne seule le monde et que la Justice n’y prend aucune part***. Toutes mes théories, ou peu s’en faut, s’effondreraient !  »
Les membres du Conseil comprirent son projet et lui proposèrent de faciliter son voyage. Démocrite fit alors une requête qui bouleversa mon existence. Comme il avait besoin d’un serviteur pour porter son sac et l’accompagner, il proposa à Théodotos de me racheter. Théodotos accepta. Puis, le sage me demanda si je consentais, pour prix de mon affranchissement, de l’accompagner jusqu’au Palais de Sarkominus. J’acceptais, bien évidemment.

3. Où l’on découvre l’enfance malheureuse de Sarkominus


Mon lecteur attend sans doute des éclaircissements sur le personnage d’Auguste Comtus et le rôle qu’il joua dans le développement personnel du jeune Sarkominus.
Les biographes de Sarkominus ont largement commenté cette confidence touchante de Sarkominus : « Rien ne m’a été donné, je me suis beaucoup battu pour arriver où j’en suis. » (6) Et ils s’insurgent contre les médisants qui présentent ce César comme un héritier, protecteurs des héritiers. Ses biographes conviennent que l’on ne vit rarement d’enfance plus malheureuse que celle de Sarkominus et que l’on ne connait guère d’exemple d’homme qui, parti de la strate la plus basse de la société, aura réussit à s’élever si haut. Voici ce que ces biographes nous rapportent sur ses premières années.
Son père, Paulus Sarkominus, est un Boii de Pannonie, dont la famille avait prêté allégeance aux Teutons, et qui du fuir sa patrie, lorsque les Scythes l’envahirent. Il s’installa dans le pays de Droite, où il excella, à en croire les biographes de Sarkominus, grâce ses talents de peintre en fresques murales. L’artiste se distinguait en outre par sa beauté apollonienne. Invité à décorer la villa des Mallahus, une des filles de la maison en tomba éperdument amoureuse. Ils se marièrent. Les goûts d’esthète de Paulus et la richesse des Mallahus, permis au couple de partager une existence calme, luxueuse et voluptueuse. C’est avec des larmes de joies, que les jeunes époux accueillir la venue d’un premier enfant, qui renforça leur tendre attachement. Puis, l’épouse eut un deuxième fils, Sarkominus.
Suivant la coutume du vitae necisque potestas (7), elle le déposa au pied de son époux pour qu’il l’agrée et le reconnaisse. Paulus, ravis, baisa le front de son épouse, puis se pencha sur le nourrisson.
Il se redressa aussitôt dans un mouvement de stupéfaction. Puis, tremblant, il posa un regard interrogatif sur son épouse. Il affecta un sourire, puis il se pencha de nouveau sur le nourrisson, qu’il observa longuement, la bouche ballante. Puis, la mort dans l’âme, Paulus se redressa et s’éloigna de l’enfant qui restait à terre.
Comme son épouse lui lançait des regards effrayés, il se fit très explicite : « Madame, pourquoi m’avoir bâclé cet enfant ? Moi, tous les jours, je réalise des œuvres d’art qui réjouissent l’âme de mes prochains. Et vous, vous me fabriquez un être chétif, mal proportionné, disgracieux ! Mangerions-nous tous les jours, si je bâclais de même mon ouvrage ? Madame, reprenez-vous ! Notre entente, je vous le rappelle, repose sur un goût partagé de l’harmonie et de la perfection. Je vous en supplie, à l’avenir, ne me heurtez plus avec des procréations déplacées. »
Paulus n’osait se l’avouer, mais à cet instant l’amour qu’il éprouvait pour sa femme s’était irrémédiablement altéré. Non pas qu’il l’eut soupçonné d’adultère. Homme cultivé, il savait par Empédocle, que « les fantasia des femmes au moment de la conception influent sur la conformation de leurs fruits ; celles qui sont tombées amoureuses de statues ou d’images donnent fréquemment naissance à des enfants qui leur ressemblent. » (8) Il connaissait Galien, éminent médecin, qui rapportait « qu’un grand de ce monde, qui n’était pas beau, mais voulait avoir un bel enfant, fit peindre sur une tablette de bois un jeune homme différent de lui et que, tandis qu’il s’unissait à sa femme, il lui disait de regarder cette figure du tableau. » (9) Paulus éprouvait une sorte de honte au point qu’il hésitait à croiser le regard de son épouse, de peur de découvrir, dans quelques brillances de l’oeil, ou bien dans son sourire, la part obscure de cette femme dont l’imagination fabriquait des fantasia capables d’engendrer un tel enfant. Il se demandait même si le goût pour l’art et pour le beau, qu’elle professait avec tant de véhémence, n’était pas tout bonnement simulé.
L’épouse, désespérée, se jeta au pied de Paulus. Elle demanda pardon et implora grâce pour l’enfant. Comme Paulus restait muet, elle se mit à pousser des hurlements désespérés.
« Madame, j’ai du travail, s’exclama-t-il, j’ai une œuvre à réaliser. A l’instant même de jeunes figurantes m’attendent dans mon atelier pour servir de modèle dans ma fresque sur le « choix de Pâris ». Ne me harcelez plus ! Mon travail, vous le savez, m’oblige à l’étude méticuleuse des corps, ce qui requiert toute mon énergie et toutes mes facultés. » Comme elle restait agrippée et hurlait de plus belle, il consenti à ce que l’enfant vive et à ce qu’il fusse exposé, pour être recueilli ou réduit en esclavage par le passant qui voudrait l’emporter. L’épouse baisa les pieds de son époux et le remercia pour sa générosité.
Il ne serait pas honnête de dissimuler à ce point du récit que la mère de Sarkominus était juive par son père, et que son obstination s’explique sans doute par le fait que pour les Juifs, comme l’a noté à sa grande stupéfaction Tacite, « c’est un sacrilège de tuer tout enfant qui vient en surnombre » (10).
Les biographes ne manquent pas de rappeler, à l’attention de tous ceux qui n’auraient pas été frappés par l’analogie, que cet épisode permet d’inscrire Sarkominus dans une longue lignée de héros qui, en subissant l’exposition, eurent à connaître un début difficile dans la vie. On songe bien évidemment à Rémus et Romulus, fils de Mars et de Rhéa Sylvia, à Persée, fils de Zeus et Danaé, à Dionysos, fils de Zeus et de Sémélé, à Cypsélos, fils d’Aétos et Labda ou encore à Œdipe, fils de Laïos et Jocaste.
La mère empressée de sauver sa progéniture traversa Neuillus-sur-Sequana pour rejoindre la villa d’un ploutocrate nommé Lagarderus, homme richissime qui cherchait désespérément à adopter un garçons, car de sombres augures lui avaient prédit que l’enfant de son sang serait « trop incompétent pour être malhonnête. » (11) Elle déposa le petit Sarkominus dans un recoin très proche de la demeure du fameux ploutocrate. Le nourrisson resta exposé des heures durant. Les quelques passants qui l’examinèrent passèrent leur chemin, l’enfant n’intéressant ni les riches, qui aiment être servis par des esclaves d’agréable physionomie, ni les pauvres, qui le trouvait trop chétif pour faire un honnête travailleur.
Soudain, une silhouette bienveillante s’approcha. Silhouette aimable, mais répugnante : celle d’un faune. Le monstre hybride observa l’enfant et s’émut. Il prit le petit Sarkominus dans ses bras et le contemplant, il s’exclama : « Oh ! Comme il est mignon ! Et regardez-moi cette jolie chevelure ondulée, qui dégage bien les lobes fronteaux pour accueillir la poussée des cornes ! Et avec ces petites jambes bien robustes, bientôt tu pourras gambader avec papa ! ».
Les biographes ne manquent pas de rappeler, à l’attention de tous ceux qui n’auraient pas été frappés par l’analogie, que cet épisode fait de Sarkominus l’égal d’Achille, qui fut recueillis et élevé par Chiron « le Centaure agreste, plein d’amour pour les hommes. » (12)
Le faune s’appelait Auguste Comtus. Il vivait à deux pas de Neuillus-sur-Sequana, dans un bois appelé Boulognus. Il consacrait une part de son temps à la philosophie et l’autre à l’entretien d’un jardin botanique où fleurissaient des plantes qu’il avait collectées de par le monde, toutes soigneusement sélectionnées pour la puissance et la subtilité de leurs parfums. Le jardin combinait tant d’attrait que les promeneuses qui s’en approchaient, s’y engageaient enthousiastes, pour s’y enfoncer fébrilement, puis sans pouvoir se soustraire à l’envoûtement que produisait la combinaison des senteurs enivrantes, des couleurs chamarrées et des formes charnues. Elles finissaient toujours, prises de vertiges, par se rouler alanguies dans le manteau chatouillant de la verdure, et s’abandonnaient, éprises d’un sommeil peuplé de songes musicaux. Comtus en profitait pour faire ce qu’un faune fait, en pareilles circonstances. Le jardin botanique de Comtus a aujourd’hui disparu, mais on assure que les végétaux qu’il y a plantés produisent encore leurs effets, et que l’on rencontre encore dans ce bois de nombreuses promeneuses d’allure lascive, errantes et fort déshabillées…
Comtus fit de Sarkominus un fleuriste accompli (13), comme l’a attesté Balkanus. Sa petite taille le rendait tout à fait adapté aux travaux de désherbages. Mais le faune l’initia aussi à la philosophie, ou plutôt à sa philosophie.
« - Mon fils, lui dit-il, tu es bien chanceux d’être un homme »
« - Je ne croix pas, mon papa chéri, répondit le petit Sarkominus. Les hommes sont si méchants, je préférerais mille fois être un faune comme toi ! Et puis, toi, papa, tu comptes quand même parmi les créatures divines. »
« - Tu dis cela, parce que tu ne connais pas dieu !, répondit en riant Comtus. Car s’il est sur cette terre des êtres méchants ce sont bien les dieux. Et puis, tendre enfant, il est mille fois préférable d’être, tel un homme, le premier des animaux, que d’être, tel un faune, le dernier des dieux. Je ne puis rien rêver pour moi-même puisque je suis le plus méprisable des dieux. Je peux par contre t’aider à devenir le premier parmi les hommes. Si tu désires ce destin hors du commun, il te faudra m’obéir et te soumettre à la sévère discipline qu’exige la philosophie »
Le petit Sarkominus applaudit de joie, baisa les mains de son maître et promit de lui obéir en tout.
Comtus lui dévoila l’avenir :
« - Les dieux s’éclipsent, mon fils. Depuis que les hommes ont reçu de Prométhée la science positive, les dieux n’ont plus rien de substantiel à offrir ! Leur inutilité est patente. Mais raisonnons : si les dieux venaient à disparaitre, mon fils, qu’adviendrait-il, selon toi ? »
« - Ce serait le bor… » répondit Sarkominus, interrompu dans son élan par une bonne taloche.
« - Non, mon fils, si les dieux disparaissaient, il resterait aux hommes l’essentiel, à savoir la religion, affirma Comtus. Qu’est-ce que la religion, sinon l’Ordre et l’Unité que les hommes ont perçus dans le phénomène divin ? L’idée de l’Ordre, c’est ce qui a poussé les hommes à imaginer l’Olympe sous l’aspect d’une maisonnée patriarcale, bien ordonnée sous la direction de Zeus. L’idée de l’Unité, c’est ce qui les a poussés à imaginer que Zeus était, à la fois, le père des dieux et le père des hommes. Bientôt réduit à l’inutilité par la science, les dieux périront ne laissant subsister que la religion comme faculté à percevoir l’Ordre et l’Unité ! »
« - Mais comment une religion pourrait-elle subsister sans dieux ? » demanda Sarkominus.
« - Si les dieux meurent, mon enfant, reprit Comtus, la faculté à percevoir l’Ordre et l’Unité, se portera tout naturellement sur un nouvel objet. Si bien que la mort des dieux donnera naissance à la religion de l’Humanité, une religion dont l’objet sacré sera l’Humanité unifiée et ordonnée. Cette religion nouvelle, j’en suis l’annonciateur. Et il te reviendra de la révéler. Me comprends-tu ? »
« - Pas très bien » répondit Sarkominus.
« - Il est vrai qu’à vivre confiné dans ce bois, tu ignores presque tout du monde extérieur, marmonna Auguste Comtus. Tu as sept ans, il est grand temps que je te le fasse découvrir. Le monde n’a rien à voir avec mon jardin, il est très désuni et très désordonné. Tu te rendras vite compte qu’il y aura beaucoup de travail à accomplir. Mais notre religion enseignera aux hommes que l’unification et l’ordonnancement du monde est nécessaire pour qu’ils approche ce Grand Être qu’est l’Humanité. Tu me suis ? »
« - Je comprend un petit peu, mon papa chéri, répondit Sarkominus. Mais c’est qui ce Grand Être de l’Humanité ? »
« - Evidemment, c’est un peu compliqué à comprendre pour un petit enfant comme toi, dit Comtus en passant sa main dans la chevelure du garçonnet. Le Grand Être de l’Humanité est invisible, mais il se manifestera sous une forme humaine, c’est-à-dire à travers toi. Les hommes voudront vivre pour toi, pour que tu les guides vers un monde ordonné et unifié, où l’Homme enfin pourra s’adorer Lui-Même. Tu la guideras et l’Humanité sera heureuse de te servir. Car vivre pour autrui n’est pas seulement la loi du devoir, c’est aussi la loi du bonheur ! Aimer et se dévouer, c’est tout un. »
« - Mais, vous disiez que les hommes sont méchants, eux aussi... », fit remarquer Sarkominus.
« - Sans doute !, s’exclama Comtus. Mais quand ils comprendront que tu les guideras vers un monde parfait, unifié et ordonné, où ils n’auront plus rien à faire, sinon s’adorer eux-mêmes, alors ils se rempliront d’amour. Nous bénéficierons pour cette oeuvre de l’appui des femmes, qui sont supérieures aux hommes par l’amour, car mieux disposées à toujours subordonner l’intelligence et l’activité au sentiment. »
L’enfant le regardait avec de grands yeux brillants. Auguste Comtus resta un instant silencieux.
« - Mon tendre enfant, reprit-il, quand nous visiterons le monde, probablement entendras-tu des gens malintentionnés colporter des ragots sur mon compte. C’est relatif à mon dispositif botanique qui me permet d’attirer les promeneuses… Ah ! Cette réputation que les hommes et les dieux m’ont faite, est la chose la plus blessante qui soit… Tu n’imagines pas, ce qu’est la calomnie ! »
« - Oh ! Vous pleurez mon papa chéri ! » s’écria Sarkominus en serrant le faune dans ses bras.
« - Toi, mon petit, gémit-il, tu sais que je n’attire ses promeneuses qu’à seule fin les étudier et de parfaire mon système philosophique. Il nous faut saisir l’être de la femme et comprendre pourquoi elles sont ainsi faites pour aimer. On me reproche de profiter de leur sommeil pour coucher avec elles, mais, les appétits sexuels n’ont d’autre destination que de produire, chez le mâle, les impulsions propres à développer chez lui la tendresse qui est la première marche vers l’amour de l’Humanité. Diotime dit de l’Amour qu’il « est un grand daimôn, et tout daimôn tient le milieu entre les dieux et les hommes » (14). Les femmes sont à leur manière des daimôn, des êtres intermédiaires entre Grand Être de l’Humanité et les hommes. Les hommes ne s’accompliront comme l’Homme s’adorant lui-même que sous l’influence des femmes, aussi doit-on convenir qu’ils sont beaucoup plus les fils de leurs mères que de leurs pères. »
« - Moi je suis votre fils et sais que vous êtes le plus gentil des papas ! », hurla l’enfant en se blottissant contre le faune.

4. Où l’on apprend comment Sarkominus assassina Auguste Comtus

La leçon au jardin botanique. Auguste Comtus et son disciple Sarkominus, fresque, Pompéi

Le petit Sarkominus se tenait à l’orée du bois de Boulognus, pour quelques travaux ordonnés par Auguste Comtus. Une femme, qui n’était plus tout à fait jeune, mais qui demeurait fort belle s’approcha. Elle porta sur lui un regard aussi appuyé qu’inquiet. Soudain sa belle silhouette chavira vers lui, et la femme lui tendit ses bras en murmurant « mon enfant…, mon enfant… » Sarkominus trembla de tout son être. Comtus lui avait interdit d’approcher les promeneuses. La femme tremblait elle aussi de tout son être, et elle accourait vers lui en déchirant sa robe dans les ronces et les branches. Plus elle s’approchait, plus elle devait s’avouer qu’il avait retrouvé l’enfant qu’elle recherchait depuis tant d’année.
Parvenue tout près du garçon, elle s’exclama : « Mon enfant ! Vous êtes mon enfant ! Venez dans mes bras pour que je vous embrasse. » Sarkominus fut étreint par un sentiment de terreur. « Les femmes sont des daimôn ! » se souvint-il. Il se mit à courir dans le bois, et comme la femme le poursuivait, il se retourna plusieurs fois pour pousser des cris horrifiants et lui jeter des pierres. Il ne voulait pas qu’elle le suive, sachant trop bien ce qu’il adviendrait d’elle si elle pénétrait le jardin botanique. La femme, dont les yeux étaient remplis de larmes, n’en persévérait pas moins dans sa poursuite, et la malheureuse finit par franchir la clôture invisible du jardin. Les vagues d’effluves odoriférantes heurtèrent subitement ses narines, les couleurs infiniment variées fascinèrent son regard, les arabesques des plantes bombées désorientèrent ses sens. Bientôt, elle vacilla et tomba à terre, sous les yeux de Sarkominus, qui s’approcha hébété.
Un fracas de branches le fit se jeter à terre et se rouler en boule sous les arbustes. Lorsqu’il osa relever la tête, il vit le faune qui avançait, un bâton à la main. Il s’arrêta pour observer la femme. Elle hoquetait, faisait des efforts désespérés pour s’arracher au sommeil. Elle ouvrit les yeux et prononça, dans un râle, ces mots : « Vous ! Pendant cette nuit d’étreinte ! Vous m’épiiez ! A ma fenêtre… C’était vous... votre visage ! » Puis elle sombra dans l’inconscience.
La fureur se déversait dans le cœur de Sarkominus. Il avait sur lui, une serpette, confiée pour l’exécution des travaux du jardin. Il s’en saisit et rampa pour s’approcher du faune qui s’était couché sur la femme. Mu par une énergie inconnue, Sarkominus bondit et planta dix fois, ou peut-être cent fois, ou peut-être mille fois, la serpette dans le dos d’Auguste Comtus. Il resta ensuite un long moment hébété à contempler la chair ensanglantée du faune. Puis, il se ressaisit et parvint à libérer la femme et à la traîner hors du jardin botanique.
C’est ainsi, que Sarkominus retrouva sa mère, qu’il quitta le bois de Boulognus et entra dans le monde des êtres humains.

5. Où l’on apprend l’avis de Démocrite sur la nature prétendument étrange d’Auguste Comtus


Démocrite n’a jamais admis qu’Auguste Comtus fut un faune. Après avoir étudié scientifiquement la question avec Hippocrate, il a conclu qu’Auguste Comtus était seulement un homme étrange. Ce que certain tienne pour un front cornu est sans doute la conséquence d’une hydrocéphalie bénigne fort bien décrite par le chirurgien Paul d’Egine : « L’hydrocéphalie prend son nom de la nature propre de l’humeur qui la forme, laquelle est aqueuse. Elle vient aux enfants ou parce que au moment de l’accouchement, les sages-femmes leur compriment maladroitement la tête, ou par une cause latente, ou par suite d’une rupture d’un ou plusieurs vaisseaux (quand le sang qui en découle se change en humeur inutile), ou par un relâchement qui permet à la matière de transsuder et de se répandre entre la peau et le crâne. » Ceux qui prétendait qu’il avait des sabots en guise de pieds se sont à l’évidence laissé abusé. Ils s’agissaient à l’évidence de pieds-bots, pathologie abondamment étudiés par Hippocrate : « Il n’y a pas une espèce de pied bot, il y en a plusieurs. La plupart sont non pas des luxations complètes, mais des déviation du pied en dedans, retenu par une force quelconque dans une attitude constante. » Quand à l’extrême pilosité de son corps et à l’extravagance de son membre viril, elles ne nous étonnera pas non plus, ces caractéristiques pouvant se trouver exacerbé chez certains individus, mais parfois chez tout un peuple, comme en témoigne l’ethnologue Ctésias : « Il y a au milieu de l'Inde des hommes noirs, qu'on appelle Pygmées. Ils parlent la même langue que les Indiens, et sont très petits. Leur chevelure est très longue; elle leur descend jusqu'aux genoux et même encore plus bas. Ils ont la barbe plus grande que tous les autres hommes ; quand elle a pris toute sa croissance, ils ne se servent plus de vêtements, leurs cheveux et leur barbe leur en tiennent lieu. Lorsqu'ils ont ainsi tout le corps couvert de poils ils se le ceignent d'une ceinture, et n'ont pas besoin par conséquent de vêtements. Ils ont le membre viril long et gros ; il leur descend à la cheville des pieds. » (15)
* Pour le portrait de Gainoïus, voir Vie de César Sarkominus II, 2.
** Pour le voyage de Sarkominus à l'Internationale des ploutocrates, voir Vie de César Sarkominus IV, 5
*** Sur la philosophie de Démocrite et l'interaction entre Nécessite et Justice, voir Vie de César Sarkominus III, 3

Notes :


(1) En 2007, l'indemnité mensuelle du Président de la république était de 7 084 euros. Sarkozy l’a fera passer, en 2008, à 19 331 euros. Le budget de l'Elysée n'a pas été en reste. De 31 millions d’euros en 2007, il est passé à 113,182 millions d'euros en 2008, puis à 114,287 millions d'euros en 2009. L'Elysée explique cette hausse par le rapatriement de toutes les dépenses auparavant effectuées par les ministères pour le compte de l'Elysée. Mais le Canard Enchaîné révèle dans son édition du 20 mai 2009 que les autres ministères continuent à payer certaines dépenses de l'Elysée, et le député R. Dosière confirmera la continuité de cette pratique et constatera même que France Télécom met gracieusement à disposition de l'Elysée un standard avec vingt personnes.
(2) Confidence de Nicolas Sarkozy lors de la garden party élyséenne du 23 janvier 2008, rapportée par le Canard Enchaîné du 30 janvier 2008
(3) N. Sarkozy, ministre de l'Intérieur de Chirac, puis président, à multiplier les lois répressives en direction de la jeunesse. La loi n°2002-1138 du 9 septembre 2002, loi d’orientation et de programmation pour la Justice pour les années 2003 à 2007, loi dite Perben, mais largement écrite par N. Sarkozy, ministre de l'intérieur, prévoit l’abaissement à dix ans de la majorité pénale, contre treize ans jusqu’alors. La loi prévoit en outre la création centres éducatifs fermés. A propos de ces centres, dans une recommandation du 1er décembre 2010 (J.O. du 8-12-10), Jean-Marie Delarue, contrôleur général des lieux de privation de liberté, y constate des dysfonctionnements et des recours abusifs à la force et à la contraintes. La loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance à son article 12 modifie le Code de l'éducation (art. L131-6), en autorisant les maires à mettre en place un fichier informatique recensant les élèves de leurs communes, pour contrôler l’assiduité scolaire. La loi sur la violence en bandes et à l'école, adoptée par le Parlement le 11 février 2010, prévoit de manière très évasive dans son article1 que « le fait pour une personne de participer sciemment à un groupement, même formé de façon temporaire, en vue de la préparation (...) de violences volontaires contre les personnes ou de destruction ou dégradation de biens est puni d'un an d'emprisonnement et de 15.000 euros d'amende ». L'article 13 réprime l'intrusion de personnes non autorisées dans un établissement scolaire, ce qui constitue un délit puni d'un an d'emprisonnement et 7.500 euros d'amende. Le décret 2004-162 du 19 février 2004 instaure une amende de 750 euros pour défaut d’assiduité scolaire. La suppression des allocations familiales pour défaut d’assiduité scolaire, disposition qui existe légalement depuis longtemps (le versement de l’allocation est soumis à l’assiduité scolaire) mais qu’aucune procédure n’organisait clairement est réorganisée. L’exécution en est confiée aux préfets sur la base de l’article 48 de la loi sur l’égalité des chances du 31 mars 2006. Votée en décembre 2010, la loi loopsi 2 prévoit que les préfets puissent décréter un couvre-feu entre 23 heures et 6 heures du matin pour les moins de 13 ans, dans les cas où "leur présence sur la voie publique durant la nuit (...) les exposerait à un risque manifeste pour leur santé, leur sécurité, leur éducation ou leur moralité". La Loppsi 2 fait ressembler la justice des mineurs à celle des adultes. Un mineur récidiviste gardé à vue pourra ainsi être envoyé devant le tribunal pour enfants sans passer par le bureau du juge des enfants. Bertrand Rothé, dans « Lebrac trois ans de prison » (le Seuil) a montré que les jeunes protagonistes de la guerre des boutons finiraient aujourd’hui devant les tribunaux.
(4) Une expertise collective de l’INSERM publiée le 22 septembre 2005 préconisait de rechercher chez l’enfant, dès l’âge de trois-quatre ans, de signes « prédictifs » d’une possible entrée dans des conduites délinquantes. Dans la même lignée, lors d'un entretien à PHILOSOPHIE MAG N°8 (mars 2007), Sarkozy déclare : « J'inclinerais, pour ma part, à penser qu'on naît pédophile, et c'est d'ailleurs un problème que nous ne sachions soigner cette pathologie. Il y a 1200 ou 1300 jeunes qui se suicident en France chaque année, ce n'est pas parce que leurs parents s'en sont mal occupés ! Mais parce que, génétiquement, ils avaient une fragilité, une douleur préalable. Prenez les fumeurs : certains développent un cancer, d'autres non. Les premiers ont une faiblesse physiologique héréditaire. Les circonstances ne font pas tout, la part de l'inné est immense. »
(5) Déclaration surréaliste de N. Sarkozy : «La France, c’est un immense paquebot, dans un monde qui est devenu un village» TF1, Paroles de Français, le 10.02.11
(6) Déclaration de N Sarkozy lors de l’émission "A vous de juger", sur France2, le 9 mars 2007
(7) Le « pouvoir de vie et de mort. » Sous la République romaine, si un enfant n'était pas désiré, le pater familias avait le pouvoir d'ordonner qu'il soit mis à mort (en le déposant par terre ; si, par contre, il prend l'enfant dans ses bras c'est qu'il le reconnait et l'accepte). Il avait le pouvoir de vendre ses enfants en tant qu'esclaves ainsi que de les faire adopter par autrui.
(8) Empédocle, DK, 31A 81, 20-22
(9) Galien, Thériaque à Pison, 11.
(10) Tacite, Histoires, V, 5
(11) En avril 2006, Arnaud Lagardère, surnommé le « frère » de N. Sarkozy, cède à l'Etat la moitié de ses parts dans la société d’aviation EADS, revendant 32 euros l’action pour en retirer 890 millions d’euros de plus-values. Quelques semaines plus tard, le 14 juin 2006, on "découvre" de graves problèmes techniques qui compromettent la sortie en tant voulu d'un nouvel Airbus, et le titre perd 26 % en une journée, et continue encore à descendre les jours suivants. Soupçonné d'avoir été au courant des difficultés, Arnaud Lagardère répond dans une interview au Monde du 15 juin 2006 : « J’ai le choix de passer pour quelqu’un de malhonnête ou d’incompétent qui ne sait pas ce qui se passe dans ses usines. J’assume cette deuxième version. »
(12) Pindare, Pythique, III
(13) Invité de l'émission de Thierry Ardisson, le 13 juin 2009, dans l’émission « salut les terriens » (Canal +), Patrick Balkany déclare : « Pour payer ses études, il travaillait le samedi chez le fleuriste, le dimanche, il vendait les glaces, il se démenait pour le RPR, il faisait ses études de droit, Sciences Po et il habitait dans sa chambre de bonne à Neuilly. »  Interrogée sur ce fils délaissé, la mère de Sarkozy aura ce commentaire : il « vivait dans un hôtel particulier dans le 17e avec un grand-père chirurgien et une mère avocat, c’était tout de même pas l’horreur. Dans le cour le plus chic de Paris, c’était pas vraiment le drame, faut pas exagérer. »
(14) Platon, Le banquet, 202d-202e
(15) Paul d’Egine, Chirurgie, 6, 74 ; Hippocrate, Articulations, 62 ; Ctésias, Histoire de l'Inde, XI.

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