La particularité de la société industrielle est de chercher à toujours éliminer ce qui ne rapporte pas et à favoriser ce qui peut rapporter. Un Darwinisme mal placé qui fait du cost killer un héros des temps modernes. Mais au fond la question se pose de savoir si ce que nous considérons comme inutile l’est vraiment ? qu’est-ce que fait l’homme en s’arrogeant le droit se décider ce qui a le droit d’exister qui l’intéresse et de détruire ce qui ne l’intéresse pas. ? Grace aux insecticides grâce à l’énergie qui permet de détruire les forêts, grâce à la mutation génétique contrôlée, les antibiotiques, cette capacité de choisir qui a le droit de vivre et qui n’a pas le droit de vivre a eu un effet de stimulation de la croissance démographique.
Mais la société des hommes ne perçoit son intérêt que sur du court terme sans avoir les moyens d’en mesurer les conséquences. Personne n’aurait pu dans les premiers temps d’utilisation du DDT, imaginer son effet de leurre hormonal et les conséquences sur la fertilité des hommes.
Globalement ce qui est un problème ce n’est pas seulement que l’homme ait élaboré les moyens de produire toujours plus. Le problème est que la technologie moderne a donné les moyens aux hommes d’aller au bout de l’idéologie judéo-chrétienne qui se fonde sur deux principes : la terre appartient à l’homme puisque Dieu lui a donné la mission de la cultiver pour sa gloire et pour cela l’homme doit croitre et multiplier.
Cette autolégitimation qui a fait que les sociétés humaines occidentales se sont arrogé le droit de choisir ce qui doit vivre ou pas, a autorisé les sociétés à détruire indistinctement ce qui ne lui apparaissait pas utile selon ses critères. Si un paysan s’autorisait à détruire des parcelles de forêt il savait que jusqu’à un certain point des éléments de la nature même s’il ne lui était pas utile tout de suite, avait leur place à moyen long terme pour servir son intérêt. Le lombric ne me sert à rien immédiatement mais on sait son utilité à moyen/long terme. Ses capacités de destruction et ses critères de choix de ce qui devait survivre ne mettait pas en danger la chaine de ressourcement de la nature. La puissance de l’industrie et son incapacité à avoir d’autres critères de choix que des critères financiers met en danger la chaine de ressourcement de la nature.
On voit bien comment la chaine de ressourcement est mise en danger par le manque de critère de choix alternatifs avec la question des abeilles. Même avec les preuves les plus évidentes de ce danger de briser la chaine de ressourcement, les états sont incapables de remettre en cause un critère financier. Il reste plus juste de produire du mais moins chère que de laisser exister les abeilles. Ce n’est même pas une question de connaissance. C’est seulement une question de choix de critère.
QUAND UNE ECONOMIE DE PRODUCTION DEVIENT UNE ECONOMIE DE PREDATION.
LE NIVEAU 1 DE LA PREDATION
Pendant des siècles et des millénaires la nature a élaboré sur sa surface et dans la mer un terreau de vie constitué d’interaction entre des éléments en coopétition et dont la mort constituait le terreau de la vie suivante. Le tout était en équilibre dynamique dans une diversité toujours en mouvement. Les vivants se nourrissaient des produits de ce système tout en y contribuant avec ses déchets et ses morts. L’économie était une économie de prédation dans la mesure ou, par opposition à l’économie agricole, les etres vivants prélevaient sans se soucier de reproduire. Mais, la contribution du prédateur était incluse dans ce cycle, et cela ne représentait pas un risque. Dans un certain sens l’économie de prédation des chasseurs cueilleurs ne nécessitait pas qu’ils pensent produire. La prédation ne touchait pas la capacité du vivant à se régénérer. On pourrait dire que c’est une prédation de surface. Une prédation sur l’excédent : on prend le fruit sans couper l’arbre. On a ainsi opposé économie de prédation et économie de production. La production semblait alors un progrès par rapport à la prédation.
Mais en fait cette notion de production n’a été progrès que tant qu’elle ne mettait pas en danger les possibilités de ressourcement de la nature.
La prédation n’est pas un problème tant qu’elle ne prend que « ce qui dépasse » : les fruits pas l’arbre. L’agriculture n’est pas un problème tant qu’elle ne met pas en danger la possibilité de régénération de l’environnement.
LE NIVEAU 2 DE LA PREDATION:
La prédation de la diversité et de la reproductibilité
L’arrivée de l’agriculture a modifié ce processus. Cultiver c’était ne plus se contenter de prélever, mais produire. Noble intention ! Cultiver c’était se donner les moyens de développer des aliments choisis sans avoir besoin de les chercher et sans avoir besoin de se déplacer pour les trouver. L’agriculture a fait figure d’innovation protectrice de la nature puisque que cela évitaient la prédation. C’est encore un peu ce que l’on croit encore avec l’aquaculture quand on n’y regarde pas de trop près.
L’agriculture se servait de ce support élaboré pendant des millénaires pour sélectionner ce que les hommes choisissaient de consommer. La culture et la science naissante donnaient aux hommes la possibilité de faire des choix sans dépendre de la nature. Mais ils n’avaient pas encore les moyens de faire des choix contre la nature. Et dans une certaine mesure ils n’étaient pas assez puissants pour que leurs pratiques ne remettent en question leur contribution au cycle du maintient de ce terreau qui nourrit toute les vie. Les premières déforestations du moyen âge étaient un premier signe encore trop faible d’une pratique dangereuse.
Le pétrole a donné aux hommes une surpuissance qui leur a donné les moyens d’augmenter leur capacité à faire des choix, au début hors de la dépendance à la nature et puis ensuite contre la nature. La conséquence de cette puissance la prédation de surface est devenu une prédation sur le terreau, sur la source du vivant. La pollution des sols et de l’air, la déforestation des forets primaires, l’exploitation de la mer sont les images les plus visibles de cette prédation en profondeur. Nous devons considérer que nous ne sommes pas des civilisations de culture mais de prédation. Notre puissance technologique décuple cette capacité de prélever non plus les fruits mais la source de la vie. Les nouvelles technologies qui permettent d’exploiter le fond des mers et les micro organisme qui sont la base de la chaine alimentaire représente un risque majeur de prédation de niveau 2.
Jusqu’aujourd’hui nous n’avons pas d’outil de mesure qui permette de quantifier la limite à partir de laquelle la prédation est dangereuse. Le seuil à partir duquel ce qu’on prélève met en danger la source du prélèvement. Tant que nous n’avions pas la puissance nécessaire cela n’avait pas d’importance. Mais notre puissance nous condamne à inventer les outils qui nous donnent les limites que nous devons nous imposer. La limite est peut être la définition du degré de reproductibilité d’une ressource ? La valeur d’une ressource ne peut plus être défini par son cout de prélèvement et les lois du marché. A ces critères peuvent se rajouter une variable nécessaire, la reproductibilité : le pétrole met plusieurs millier d’années à se reproduire et donc sa valeur écologique doit être déterminée par ce seuil de reproductibilité. L’eau d’une nappe phréatique met des milliers d’année à se reproduire elle n’a donc pas la même valeur qu’une eau de surface qui se reproduit annuellement. On ne se contente plus de chasser les baleine on exploire de Krill qui est la condition de leur survie. On ne se contente plus de pecher des poissons, on détruit leur environnement de reproduction pour augmenter la rentabilité de la pêche.
On peut voir avec une telle démarche que se réajuste la valeur des choses, non plus d’un point de vue purement économiste primaire, mais plutôt d’un point de vue écologique.
Le prix de l’aluminium ne peut pas se contenter d’être seulement le prix de son extraction modulé par le prix du marché. Il doit être défini par le cout de sa production une fois qu’on s’est donné les moyens de ne pas influencer sur les fleuves les forets et plus généralement l’environnement. Du coup nos sociétés risques d’etre moins facilement nanties. (Ça va faire augmenter sacrément le prix de mes jantes alu tout ça !)
Cela nous obligerait à redéfinir nos valeurs et notamment ce qu’on appel la richesse.
RICHESSE MISERE ET PAUVRETE
La richesse produit de la misère parce que le désir d’accumuler pour se rassurer met les humains en compétition et donc les séparent.
Mais la pauvreté n’a pas cet effet là.
Plus on est riche, moins on est obligé d’avoir des relations de solidarité : Quand les paysans d’avant le 20ième siècle développaient des relations de solidarité pour les moissons ou pour tous les actes de la vie, ce n’était pas par bel esprit, mais parce qu’ils n’avaient pas le choix. Les relations inter-individuelles ne vont pas tant que cela de soi. La solidarité est une nécessité de population dépourvue de moyen. Quand le paysan a eu les moyens de se payer ses machines ce fût la fin des relations de solidarité et tous les rituels culturels qui s’étaient construit autour. La fin de la reproduction de ce terreau de la socialisation.
Aujourd’hui la baisse des ressource et le manque de moyen réintroduit la nécessité de la solidarité et oblige aux relations sociales. La pauvreté oblige à la relation solidaire. La frugalité dont parle Pierre Rabhi n’est pas seulement une jolie idée pour pratiquer l’esthétisme spirituel. Cela risque de devenir très vite une nécessité
Ce serait un peu la fin du gâchit et de la société de consommation mais comme elle ne nous a pas rendu heureux on devrait pouvoir s’en remettre.
Si la richesse créer de la misère et des inégalités, la pauvreté crée de la solidarité. Il est temps que nous cessions de nous glorifier d’etre des pays riches.