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Billet de blog 26 avril 2013

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bras cassé

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Bras cassé

Il y a quelques temps de cela, le DRH d’un grand groupe me disait sur le ton de la plaisanterie: « si tu trouves le moyen de me débarrasser de tous les bras cassés qu’on se traîne dans l’entreprise je suis prêt à te payer très cher ! »

Derechef je lui ai inventé une très vieille histoire de sagesse orientale qui disait ceci :

Un jour un petit samouraï, alla voir un grand maître d’art martiaux.

Avec l’arrogance naïve de sa jeunesse, il lui dit :

-« O grand maître ! Toi qui a atteint les sommets de l’art de la  guerre peux m’apprendre à résister à tout les attaques à toutes les souffrances, à pouvoir malgré un bras cassé, être victorieux de mes ennemis ! »

Le grand maître lui dit à peu près cela :

« Je ne sais pas faire de miracle. Par contre si tu en as le temps je peux t’apprendre à ne pas en arriver à avoir un bras cassé. Mon art martial est l’art de ne pas se battre : comment arriver à ce que le combat n’ai pas lieu. Le vrai art martial est un art de paix. »

« Quoi ? toutes ces années de travail pour ne pas se battre ! toute cette énergie pour ne rien faire ! mais alors quelle gloire me payera de mes efforts d’apprendre ton art martial ?»  lui répondit le jeune samouraï. Et il s’en alla chercher ailleurs la gloire qui rassure.

le DRH me dit après un moment de réflexion : « je comprends bien ce que dit le maître en disant qu’il faut anticiper les problèmes pour qu’ils ne se posent pas, mais ce serait quoi anticiper les problèmes dans l’entreprise ?

Mais surtout je ne vois pas à quoi fait référence la réponse désappointé du jeune samouraï qui veut de la gloire en paiement de ses efforts d’apprendre ? »

- « une question à la fois : Cette métaphore fait référence à la tendance arrogante et naïve des décideurs de l’entreprise qui ne veulent faire des choses que si elles se voient, c’est ainsi qu’ils justifient leur raison d’etre dans l’entreprise ».

L’art du grand maître en question c’est : faire beaucoup d’effort travailler beaucoup pour que rien de visible ne se passe. Mais quel DAF accepterait de payer pour que rien de visible ne se passe ? Un problème qui se voit, c’est une justification, une raison légitime de faire quelque chose. Mais s’il ne se passer rien comment savoir si c’est ce que nous avons fait comme effort qui a permis que rien de visible se passe ? c’est ce  principe qui a présidé aux catastrophes écologiques comme celle de bp dans le golf du mexique: à quoi cela sert de mettre autant d’argent dans la sécurité, il ne se passe rien!

Qu’est ce que ce serait que d’anticiper les problèmes dans l’entreprise ?

Un employeur intelligent est quelqu’un qui se situe dans une perspective de quelques années.

Lorsqu’on embauche quelqu’un pour ses compétences et seulement pour ses compétences, on a une perception à court terme de son employabilité. On le veut adapté.

Penser une activité salariée sur plusieurs années c’est anticiper qu’elle va changer de forme, que le salarié va aussi devoir évoluer et que plus que la compétence, c’est la compétence à s’adapter qui doit présider à des critères d’embauche. On le veut adaptable.

Quand vous avez embauché ces bras cassés il n’étaient pas des bras cassés. Ils étaient juste compétent (ou au moins diplômés) pour la tache que vous leur avait assigné. Mais ils étaient surtout soumis. Tu sais bien qu’on ne garde pas salariés non-encore titularisé s’il revendique, fait du zèle et demande à progresser. Le premier critère d’embauche c’est la subordination. Le fléau d’une décision d’embauche penchera toujours du coté soumis dans la balance de critère “soumis/compétent”. Ce qui peut sembler logique dans un rapport salarié : il vaut mieux que le salarié soit d’accord pour faire ce qu’on lui demande. Mais le revers de la médaille c’est une certaine tendance à ne pas vouloir bouger. Tendance renforcée par le fait que le patron préfère que son salarié passe son temps à produire plutôt qu’à se former ou à vouloir partir ailleurs.Ou encore à vouloir prendre sa place.

On peut  rêver d’un contrat de travail qui pose comme clause de licenciement le fait qu’au bout de cinq ans le salarié en est toujours au même point sur le même poste. On aurait moins de risque d’avoir de « bras cassé » si l’on posait le mouvement comme base du contrat de travail.

On a connu des entreprises où le manager était récompensé quand il promouvait un collaborateur et doublement récompensé quand il faisait qu’un de ses collaborateurs le dépasse dans la hiérarchie.

Une telle démarche suppose de la part du chef d’entreprise, une vision à long terme, un lacher prise sur l’illusion du  contrôle total de ses salariés et une capacité à prendre des risques.

Un chef d’entreprise qui n’a pas comme critère d’embauche l’impertinence de ses cadres, la capacité à résister et à s’affirmer se prépare un avenir bien cristallisé.

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