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Billet de blog 12 novembre 2016

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Le ressort de la liberté

L’autre jour, je suis en classe avec mes élèves, tranquille. Tout à coup, les grimaces d’une élève associées à d’étranges bruitages attirent mon attention...

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

L’autre jour, je suis en classe avec mes élèves, tranquille. Tout à coup, les grimaces  d’une élève associées à d’étranges bruitages attirent mon attention.

Illustration 1
Illustration 2
Illustration 3

Vous l’aurez compris, une élève s’épilait la moustache à l’aide d’un petit objet de la taille d’un stylo, facilement escamotable dans une trousse : le ressort à épiler !

Lorsque j’ai raconté cette anecdote à mon entourage, la majorité d’entre eux ne connaissait pas cet objet. Dans les salles de classe, le maquillage, la brosse à cheveux et même le fer à lisser (si, si !), c’était du déjà-vu. Mais le ressort pour s’épiler le duvet, voilà une nouveauté pour moi et pour mes coLLègues aussi.

La première fois, je dois l’avouer, je ne pouvais m’empêcher de sourire intérieurement. Mais étant la prof, le ressort à moustache, c’est la même peine que pour tout objet qui ne ressemble pas, de près ou de loin,à une feuille, un livre ou un stylo : je le récupère et je le garde sur le bureau. Sauf que je n’avais pas prévu que les élèves me lâcheraient bien plus facilement leur téléphone portable que leur ressort à moustache (au moins 10 fois moins cher que leur smartphone !)

« -  Non, Madame, s’il vous plaaaît…vous me le rendrez après ?

   -   Donne-le moi, on verra après.

   -   Non mais madame, je ne veux pas vous le donner… »

A ce moment précis, je pense avoir une idée lumineuse pour couper court à l’échange : l’humiliation publique. Oui, je sais, mais c’est tout ce qui m’est venu sur le moment : « bah oui, me dis-je, c’est quand même la honte absolue de s’épiler la moustache en classe. »

Je m’adresse alors à l’élève :

« - Bon, tu me donnes cet objet ou j’explique à toute la classe ce que tu es en train de faire ?!

   -  Bah quoi ?! » s’exclame l’élève en se retournant vers la classe et en brandissant son ressort. « Je m’épile la moustache, qu’est-ce qu’y a ?! C’est normal. »

Mon moi-intérieur a pleuré de rire. Mais mon moi-prof s’est juste senti totalement démuni.

Je finis par concéder un : « Ok, je te le rendrai à la fin de l’heure. »

Même si la salle de classe n’est pas censée être le prolongement de la salle de bains, cette élève m’a donné une belle leçon. A une époque pas si lointaine, les filles, ça-n’avait-pas-de-moustache. Ça va pas non ?! La honte, la hchouma ! Aujourd’hui, c’est parfaitement assumé par cette génération qui, grâce à ce ressort, bondit jusqu’aux sommets de la liberté !

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