L’angoisse du mardi
C’est une mécanique aujourd’hui bien rodée. Chaque mardi est attendu toute la semaine et dès le matin l’angoisse monte : les nouvelles des familles arrivent au fur et à mesure. Lesquelles seront à la rue cette semaine ? Il y a cette famille qui n’a jamais rien, rebelote pour elle. Telle autre avec une maman épileptique et pourtant régulièrement sans solution...
Commence le branle bas de combat : appels aux 115, nombreux échanges sur les possibilités d’accueil hors 115, soit à l'hôtel par le soutien de la Mairie de Tours ou des différentes cagnottes qui reposent sur la solidarité citoyenne, soit chez un particulier solidaire, soit encore à l’école.

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La voie royale, le Graal qui, au fil du temps, devient de plus en plus rarement atteint, c’est l’hébergement d’urgence « conventionnel ». C’est le cas de figure ou l’État remplit son rôle et prend en charge la famille jusqu’au mardi suivant. La normalité quoi, mais une normalité qui devient l’exceptionnel du fait d’une crise du logement sans précédent en France.
Dans de nombreux cas il faudra téléphoner aux associations d’aide aux sans-abris pour essayer d’organiser les nuits des restant sur le carreau qui, à ce moment du mardi restent la majorité des cas. Avec l’aide des cagnottes citoyennes beaucoup de familles trouvent une solution mais...
« On ouvre ». C’est le mot fatidique qui est finalement lâché quand plus aucune alternative n’est possible et pour les familles restantes c’est à l’école que se passeront les nuits de la semaine. Et on peut dire que cette situation se normalise puisque ce sont plus de 140 nuitées qui ont été assurées ainsi avec l’aide des enseignant·e·s et des parents d’élèves volontaires.
Quand l’exceptionnel devient quotidien
Le temps a fait son œuvre et l’idée n’est plus d’éviter cette situation mais de s’organiser face à une réalité qui revient inlassablement, qui ne perd jamais rien de son aspect inhumain et révoltant, et que la raison réprouve.
Le constat dans la durée des défaillances de l’Etat a des effets secondaires importants sur les personnes qui en font le constat : perte de confiance et compréhension qu’en fait il ne s’agit pas de défaillances mais d’une organisation de la pénurie. Tous les ingrédients sont réunis pour que la situation s’aggrave : une crise dans la construction logements sociaux inédite au moment même où les loyers atteignent des prix prohibitifs dans la majorité des grandes villes et, très récemment, l’adoption de la loi immigration, officialisant un nouveau dogme, que l’État ne pratiquait pas officiellement jusque-là, le tri social.
Que faire quand le nombre de pauvres augmente ? Réponse du gouvernement : interdire l'accès aux aides à certain-e-s en fonction de leur origine...
— Collectif Pas d'Enfant à la Rue (@EnfantalaRue37) January 3, 2024
Cela ne convient à personne ! https://t.co/i2deWt7gND
En effet, en faisant adopter la préférence nationale chère à l’extrême-droite, le gouvernement a ouvert la porte à la rationalisation de la grande misère. Certain·e·s auront des droits, d’autres n’en auront pas. Ainsi l’hébergement d’urgence ne sera pas pour tout le monde mais conditionné, ce qui ne va certainement pas permettre de régler le problème du sans-abrisme et les nuitées à l’école ont donc de beaux jours devant elles. Le cynisme de la logique est révoltant : il y a pénurie ? Alors hiérarchisons les droits des gens et commençons par la préférence nationale comme premier d'entre eux.
La vie dans le mouvement et l’action, la mort dans l’immobilisme
Pour autant il n’y a pas chez les membres du collectif Pas d’Enfant à la Rue le moindre signe de renoncement, le moindre essoufflement. La situation est aujourd’hui claire, connue et acceptée. Ce qui s’est perdu en route, c’est la confiance en la justice, en l’égalité, en l’État, censé nous représenter et prendre en compte tous les citoyens, et il nous semble que nous ne sommes pas quantité négligeable de citoyens qui réclamons la primauté des valeurs d'humanité sur toutes autres considération…
Il faut faire avec, il n’y a rien à attendre d’un pouvoir qui se congratule dès qu’il le peut mais qui ne possède plus de tapis assez large pour mettre dessous tous les dossiers gênants et qui ne semble plus avoir aucune attache avec le réel. Ce sont aux citoyens de bonne volonté de s’organiser sans rien attendre de personne mais en espérant juste ne pas avoir trop d’embûches supplémentaires sur leur chemin.

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Parce que des bonnes nouvelles, il y en a malgré tout! Déjà parce que le constat est chaque jour plus clair, plus lumineux : oui, les citoyens de bonne volonté existent, ils répondent présent. Là où le Collectif mobilisait 30 personnes en mai dernier pour s’inviter à un conseil municipal, il a aidé à regrouper 500 personnes en manifestation le 11 novembre dernier. Cela s'est fait grâce à une mise en relation avec les autres acteurs locaux, politiques et associatifs. Le mouvement avait été amorcé dès le mois de juillet dernier lors d’un rassemblement où étaient présents Utopia56, La Table de Jeanne Marie ou encore le député William Martinet de La France Insoumise. Depuis les liens se sont tissés, les relations se sont approfondies dans un but commun, l’aide et la protection de celles et ceux qui n’ont rien, pas même un toit.

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Depuis sa création, le Collectif a suivi le chemin du compagnonnage et doit beaucoup à toutes celles et ceux qui l’accompagnent, à tous ces citoyens et citoyennes qui ont les mêmes indignations. C’est là qu’est l’espoir, la vie, l’humanité triomphante dans sa solidarité, sa vertu, son honneur.
Depuis, le député Charles Fournier s’est engagé courageusement et a relayé les problématiques de sa circonscription en ouvrant sa permanence aux familles à la rue, en permettant au Collectif d’avoir une grande visibilité médiatique et en portant la question du sans-abrisme des enfants à l’assemblée nationale.
Aujourd’hui le Collectif compte plus de 3000 followers sur facebook, est également présent sur x (ex-twitter) et mastodon, ce qui augmente sa visibilité et sa capacité de mobilisation de manière considérable.
Et demain ?
Aujourd’hui le Collectif est armé pour continuer son chemin, aussi bien en terme de réseaux de solidarités que de revendications, et il s’engage dans l’avenir avec optimisme, persuadé qu’il peut aider à débloquer une situation humaine catastrophique puisque ce sont plus de 3000 enfants qui chaque nuit dorment à la rue dans notre pays.

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Après avoir bénéficié de l’aide de celles et ceux qui étaient déjà dans l’action avant eux, les membres du Collectif souhaitent aider celles et ceux qui se lancent. Ainsi, un collectif Pas d’Enfant à la Rue s’est monté à Blois et a mené ses premières actions de manière brillante et efficace. Le 17 janvier une Réunion d’Information Syndicale sur le sans-abrisme chez les enfants est organisée à Tours par le SNUIPP afin d’accompagner les enseignants confrontés à cette situation et qui se sentent isolés et démunis pour aider concrètement les familles concernées.

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Suite à de vifs échanges au mois de novembre avec les services préfectoraux et les députés de la majorité, la revendication de réquisitions temporaires chaque fois que nécessaire a été affirmée et affermie. Celle-ci a eu son origine dans deux articles de défense de l’action du gouvernement en matière d’hébergement d’urgence et le préfet a été jusqu’à affirmer que les réquisitions étaient illégales alors qu’elles sont selon la loi, possibles. D'ailleurs c'est un immeuble inoccupé dans l'enceinte de l'école Michelet qui est aujourd'hui demandé officiellement à réquisition par courrier à la mairie, propriétaire des lieux et au Conseil Départemental qui en dispose. Pour l'heure ce courrier est sans réponse.

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Et puis il y a cette campagne pour la venue de la ministre des Familles et des Solidarités, entamée au mois de novembre lorsque madame Aurore Bergé a répondu dans l’hémicycle à Charles Fournier qu’elle était prête à venir voir par elle-même la situation des familles à la rue. Le Collectif a écrit à la ministre pour lui proposer de lui faire la visite guidée, invitation qu'il a appuyée d’une pétition toujours très active et qui a déjà recueilli 2500 signatures. Le courrier, envoyé le 25 novembre est à ce jour sans réponse mais le Collectif a appris pendant cette année à faire preuve de pugnacité et n’a certainement pas peur de se retrousser les manches pour être écouté, fort du réseau de solidarité dans lequel il s’inscrit fièrement.

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