Il fallait y penser!
Eh bien, rassurez-vous! "On" y a pensé.
Désormais, les gens qui ont activement participé à la dégradation de notre société par les recettes ultra-libérales qu'ils lui ont appliqué, constatant cette dégradation, nous expliquent navrés, mais sans rougir, qu'il faut bien accepter la réalité telle qu'ils l'ont créée, avec comme solution... toujours plus de libéralisme! CQFD.
Je vous laisse écouter attentivement cette interview de M. Pascal Lamy sur LCP:
Où l'on entend cet ami de notre Président-de-gauche nous expliquer ce qui serait, selon lui, une solution à la situation délétère du pays (à partir de 27'30):
Regardons, pour une fois un peu loin, et un peu large...Et je pense que si on fait ça, et qu'après on revienne sur nos problèmes, alors on va trouver les solutions qui aujourd'hui sont bloquées
Son point de vue "si loin, si large" l’amenant directement à cette "solution" aujourd'hui bloquée:
Je sais que je ne suis pas en harmonie avec une bonne partie de mes camarades socialistes, mais je pense que... il faut... à ce niveau de chômage, il faut aller davantage vers de flexibilité, et vers des boulots qui seront pas forcément payés au SMIC.
C'est à dire? Moins que le SMIC? lui demandent de préciser les journalistes.
Oui, absolument!
Les journalistes lui "objectent" qu'il y a 7 millions d'Allemands payés en-dessous de 800€ à faire des "mini-boulots", des "mini-jobs", et que l'Allemagne revient dessus. Réponse de l'expert:
« Un petit boulot, c'est mieux que pas de boulot! Je ne réponds pas ça dans l'absolu. J'aurais pas dit ça y'a 10 ans ou y'a 20 ans, mais à ce niveau de chômage [il appuie bien sur ces mots]... Dans le coin où je suis en Normandie, je connais des gamins, qu'ont 15 ans, dont les parents n'ont jamais eu de boulot! Bon! Pour moi, ça c'est le signe d'une gangrène! Une société où ceci peut se produire, sans que y'ait la révolution, c'est vraiment très inquiétant! Et ça, je crois vraiment que : à crise de ce type, solutions de crise de ce type! »
Je ne peux, tout d'abord que noter que M. Lamy semble se contredire très directement : il prétend que ce sont les conditions très particulières de chômage aujourd'hui qui l’amènent à évoquer une solution "de ce type", mais en donne comme illustration des gamins de 15 ans (pile-poil au milieu de la fourchette du temps "où il n'aurait jamais dit ça", donc) dont les parents n'ont jamais travaillé... J'en conclus naïvement que, contrairement à ce qu'il dit, le problème n'est donc pas celui d'aujourd'hui, mais existait déjà il y a 15 ans! Mébon, moi je ne suis pas expert.
Mais la question que je me pose surtout, c'est:
QUI nous a amené à cette "situation-de-ce-type-réclamant-des-solutions-de-ce-type", à coup de néo-libéralisme, à coup de "pensée unique" économique ("pensée unique" non pas en tant que "science", puisque des économistes hétérodoxes existent en nombre, mais bien en tant que "science appliquée", telle qu'elle fonctionne concrètement depuis le début des années 1970), par exemple à coup d'analyse ricardienne des avantages comparatifs présentée comme l'alpha et l'oméga de la "bonne marche économique du monde" par les tenants de la mondialisation heureuse, dont est M. Lamy?
Eh ben, maintenant qu'on a bien détruit l'emploi, il va falloir que vous bossiez pour rien...
Je propose donc d'aller au bout de la logique: étant donné que les esclaves étaient logés et nourris par leur maitres, et qu'une mauvaise piaule, c'est mieux que pas de piaule du tout, rétablissons l'esclavage comme solution à la pauvreté.
Après tout, ce même M. Lamy ne cite-t-il pas l'I-Pad comme exemple réussi de la mondialisation du commerce, "conçu aux USA et assemblé en Chine"? Il semble être de ceux qui ne se rappellent pas que plusieurs de ces ouvriers chinois qu'il cite en exemple se sont suicidés au sein même de leur usine, désespérés qu'ils étaient par les conditions iniques de leur "boulot".
«Une vie misérable vaut mieux que pas de vie du tout», dirait peut-être ce bon Pascal Lamy. Ces ignorants d'ouvriers chinois n'avaient pas l'air du même avis.