Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.
À suivre les informations sur les élections gabonaises distillées par les médias hexagonaux on en vient à s'interroger sur le métier de journaliste. Le rôle du journaliste est il , sous couvert d'objectivité, de se contenter d'ânonner paresseusement les versions fournies par les participants à un événement, ou bien de s'impliquer afin de dévoiler la vérité des faits? Dans le cas des élections gabonaises je suis excédé d'entendre nos médiacrates nous parler de "réélection d' Ali Bongo avec 5500 voix d'avance sur Jean Ping". On nous présente les chiffres officiels comme si ils étaient le reflet exact du vote populaire. Pourtant, nul besoin d'être un expert en investigation pour s'apercevoir de leur fausseté.
Le Gabon compte neuf provinces. La veille de la proclamation des résultats par la CENAP (Commission Électorale Nationale Autonome et Permanente) huit provinces avaient livré des scores incontestés correspondants aux chiffres constatés par l'ensemble des observateurs. Selon ces chiffres provisoires la participation était de 53% et Jean Ping avait 60000 voix d'avance sur Ali Bongo. Il a fallu attendre 72 heures pour avoir les chiffres de la neuvième province , le Haut-Ogooué, terre d'origine de la famille Bongo: le taux de participation s'y serait élevé à 99,93% et Ali Bongo aurait obtenu 95,46% des voix, ce qui lui permettrait miraculeusement de dépasser Jean Ping et de prétendre être réélu. Il est évident que ce score à la soviétique sent le tripatouillage à plein nez: il est même contesté par le propre frère d'Ali, Christian Bongo. On ne nous a pas parlé non plus des conditions dans lesquelles les chiffres ont été validés par la CENAP après le renvoi des observateurs de l'UE. Ces scores n'ont été avalisés que par quatre des huit membres qui composent cette commission. La publications des résultats bureau de vote par bureau de vote, qui aurait permis le recoupement avec les chiffres en possession des observateurs a été refusé. La fraude est donc évidente: qu'attendent donc nos journalistes pour l'expliquer sans détour?
Après les émeutes qui ont suivi la proclamation de ces résultats frauduleux, j'ai entendu sur une antenne de radio le député des français de l'étranger déclarer que la France ne doit en aucune façon prendre parti dans cette affaire. Ce monsieur dont je préfère oublier le nom voudrait-il nous faire croire que la France n'a aucune responsabilité dans cette crise? Ce serait oublier un peu vite que Bongo Junior n'avait pas non plus été élu en 2009: c'est Nicolas Sarkozy qui l'a imposé au peuple gabonais qui lui avait voté pour André M'Ba Obame, décédé d'une mystérieuse maladie en avril 2015.Le documentaire "Françafrique" diffusé sur France 2 en 2011 en faisait la démonstration, confirmée il y a peu par une déclaration de Manuel Valls. Nous, Peuple Français, avons déshonoré les valeurs humanistes dont nous nous gargarisons à la moindre occasion en laissant notre État et ses dirigeants mettre en place en notre nom, dans "nos" anciennes colonies africaines un système néo-colonial dont nous ne sommes pas sorti malgré les affirmations officielles.Ce système repose sur la cooptation de "gérants" autochtones chargés de protéger les intérêts français en échange de l'impunité pour leurs actes de gouvernance à l'encontre de leurs peuples. Notre prospérité relative repose encore en partie sur l'exploitation de richesses qui appartiennent à des peuples qui essaient de survivre dans la misère pendant que les dictateurs que nous leur avons imposés bâtissent des fortunes immenses en confondant les caisses de l' État avec les leurs. Aujourd'hui le peuple gabonais essaie de se libérer de ce système mortifère. Mais savez vous que les armes utilisées contre lui par le tyran de Libreville sont des armes françaises? (Encore une raison de fierté, n'est ce pas M. Le Drian?) Et que sa garde présidentielle qui aujourd'hui torture les opposants arrêtés ces derniers jours a été formée par des instructeurs français?
Pendant longtemps la population française était plus ou moins ignorante de cet état de fait. Aujourd'hui nous ne pouvons plus prétendre que nous ne savons pas ce que trament nos dirigeants en Afrique. Allons-nous continuer à nier nos responsabilités ou essayer de retrouver un peu de notre honneur perdu en faisant tout notre possible pour aider nos frères gabonais à conquérir une indépendance véritable?
La question de la Françafrique ainsi que celle du commerce des armes devront impérativement être posées dans la campagne électorale qui vient...
Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.