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Billet de blog 20 janvier 2014

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Ainsi va le monde n° 230 – P comme... Pompe

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Bienvenue à toutes et à tous

 P comme... Pompe. La pompe, du latin pompa et du grec pompé, désigne un cortège solennel ou encore un convoi notamment lorsqu'il est funèbre. Dans ce cas, le mot passe au pluriel et désigne ce service public qui assure les funérailles, qu'on appelle « pompes funèbres ». L'enterrement se fait en général sans déploiement de faste ni de décorum sauf lorsqu'on est un grand personnage. Récemment, celui de Nelson Mandela s'est fait en « grandes pompes » c'est-à-dire avec beaucoup de solennité. Les funérailles d'Ariel Sharon, général et homme d'Etat israélien, compromis dans les massacres de civils de Sabra et Chatila, ont été moins triomphales. Quoi qu'il en soit, mourir c'est renoncer aux vanités et « aux pompes » du monde.

 Non content de tous ces sens, le mot « pompe » désigne cette machine bien connue qui permet d'aspirer, de refouler ou de comprimer des fluides. Ses usages sont multiples de la pompe à essence à la pompe à vélo en passant par la pompe cardiaque. Quant à son origine étymologique, cette pompe-là n'a rien à voir avec le latin ou le grec. Comme l'onomatopée « tic-tac » désignant l'horloge, le son vocal « pompe » viendrait d'un bruit naturel ou d'un son produit par un être animé ou une chose. Difficile à établir.

 Le lien est plus évident entre le fonctionnement de la machine qui va et vient pour remplir une fonction bien déterminée et le mouvement de culture physique consistant pour un homme à relever en poussant sur les bras, son corps allongé à plat ventre au sol. Il est ainsi capable, par mimétisme, de reproduire le mouvement de la machine et de réaliser plusieurs dizaines de « pompes ». L'observateur extérieur n'est pas sans interrogations à la vue de cette pratique pour le moins curieuse. Il reste qu'après cet exercice, qui enrichit fortement l'humanité, l'individu pompant en ressort « pompé », c'est-à-dire épuisé. Être vidé, c'est avoir un coup de pompe. Nous restons bien là dans le champ sémantique de la pompe. Rappelons qu'un champ sémantique désigne l’ensemble des sens d’un mot fournis par le dictionnaire contrairement au champ lexical qui lui regroupe les termes exprimant une même idée. « Briller », « éclairer », « lampe », appartiennent au champ lexical de la lumière. Le champ sémantique du mot « pompe » recouvre l'ensemble des sens que nous venons d'évoquer.

 J'ai eu quelques difficultés à y faire entrer « la pompe » qui permet d'assister l'élève ignorant lors de l'examen, mais en forçant un peu le trait, « pomper » ou faire usage de pompes, c'est aspirer un savoir copié sur une feuille ou sur la main pour le faire venir sur la page blanche désespérée. C'est combler le vide de l'ignorance en pompant le plein du savoir.

 Plus délicat a été de faire entrer le pied qui chasse quelqu'un à « coup de pompes » ou la jambe qui nous fait « courir à toutes pompes » dans le dit champ sémantique. Certes, au bout de la jambe, il y a le pied et au pied on a la chaussure, « la pompe ». Mais est-ce le bruit de la chaussure qui couine qui lui vaut cette appellation ? Quoiqu'il en soit les pompes n'en finissent pas de faire du bruit : celles de Kroutchev tapant sur la table, celles de Roland Dumas à 11000 francs la paire, celles des tunisiennes lancées au front du gouvernement et maintenant celles du président Hollande ! Ainsi va le monde... nu-pieds !

 Didier Martz, philosophe

23 janvier 2014

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