Bienvenue à toutes et à tous
C comme... Coach ou Coaching. « Coach », une fois n'est pas coutume, vient du français bien connu « coche », cette voiture posée sur quatre roues, tractée par des chevaux et guidée par un cocher, lequel cocher n'hésite pas parfois à manier le fouet pour faire avancer son attelage. S'il échoue, le parasite ailé qu'on appelle la mouche viendra piquer et agacer les chevaux pour qu'ils parviennent au sommet du « chemin montant, sablonneux, malaisé et de tous les côtés au soleil exposé ». La mouche et le cocher, chacun à leur manière, parfois coercitive et directive, pousse, accompagne, encourage une équipe de chevaux pour atteindre l'objectif.
De là, il ne fallait qu'un sabot de cheval pour que le cocher devienne le coach avec la pratique attenante : le coaching. Le recours à l'anglicisme « coach » plutôt qu'à « cocher » permet d'éviter la référence trop explicite et dégradante à l'attelage, au cheval mis en lieu et place de l'équipe, du dirigeant, du sportif, de la mère, du père, de l'enfant, du professeur, même des amoureux, qui tous ont besoin désormais d'être coachés, c'est-à-dire accompagnés.
Surtout, le passage du « cocher » au « coach » indique un déplacement significatif dans les rapports d'autorité. Déplacement physique d'abord : le cocher est installé en haut de la voiture; le coach se situe aux côtés de la personne. Fonctionnel et symbolique ensuite : le cocher a les rênes en main, il guide l'attelage ; le coach accompagne, il est, ou semble être, dans une position d'égalité.
Les chevaux, les cochers ont disparu. Les « coach » les ont remplacé pour tirer en avant l'ego de chacun afin qu'il défende au mieux ses intérêts et ses atouts dans les domaines où il évolue. La chose n'est pas simple car comment tirer en avant en étant à côté ? C'est comme vouloir faire avancer une voiture en la poussant sur le côté !
C'est qu'avec le coaching, on se place dans la situation paradoxale d'avoir à favoriser le développement personnel sans avoir à produire de savoir à transmettre, donc sans se mettre devant. Transmission qui implique une relation d'autorité et la position d'un maître ou d'un instituteur, celui qui institue. Comme le dit Dany Robert-Dufour dans son livre Le Divin Marché, en se contentant d'accompagner, le coach fait au niveau de l'esprit ce qui se fait au niveau du corps dans les salles de gym : de la gonflette du moi et ne produit aucune vérité si ce n'est d'avoir fait 50 tractions, soulevé 20 kilos ou parcouru sur place 10 km.
L'auteur cité fait référence au film de Audiard, « De battre mon coeur s'est arrêté » où l'on comprend que pour apprendre – ici le piano – il faut bien qu'il y ait transmission et pas seulement accompagnement. C'est parce que l'élève commence à «battre... la mesure, [que] le cœur s'arrête..., s'arrête d'être la proie des passions du petit moi. »
Ainsi, revenant à la Fable de la Fontaine, la Mouche du Coche, « certaines gens, faisant les empressés / S'introduisent dans les affaires : / Ils font partout les nécessaires, / Et, partout importuns, devraient être chassés. » Ainsi va le monde !
Didier Martz, philosophe pratiquant. Le 27 février 2014
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