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Avant les élections du 4 octobre 2009Tout allait bien. Le Club Bilderberg avait choisit la Grèce pour sa réunion du 14 au 17 mai pour rendre hommage au dynamisme et la bonne gouvernance de Karamanlis, chef de la droite décomplexée. La Grèce s’enorgueillait de son triple A (bien avant Sarkozy). A cette occasion, le ministre des finances grec est devenu membre du prestigieux club des élites planétaires.
Les « reformes » tardaient un peu. La partie facile a été réalisée avec succès par la Droite : la démolition du Code du Travail. Karamanlis a fait mieux sans ministres socialistes, que Sarkozy avec ministres et conseillers socialistes. Vingt neuf milliards d’euros aux banques. Quelques privatisations juteuses dans l’Industrie et les Transports. Les capitaux français et allemands se portaient bien. Petite diminution du taux de profit comme partout ailleurs, à cause de cette maudite Crise extraterrestre qui sévit sur notre planète.
Il restait la partie difficile. Les impôts, les retraites, la santé, l’éducation. Les Grecs ont voté le 4 octobre 2009. Le PS a gagné avec 10 points d’avance sur la Droite. Les Grecs ont voulu le changement. Ils l’ont et ils ne sont pas contents. Peuple instable et capricieux.
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Après les élections du 4 octobre 2009
Tout ce que la Droite ne sait pas faire, le PS est prêt à essayer. Comment annoncer au peuple la « faillite » ? Deux mois de manipulations pour prévenir les « notateurs » de se réveiller et mettre à l’aise les autorités de tutelle (UE, BCE, FMI). Le déficit est de 12,7% le lendemain des élections contre 6% la veille des élections ! Qui ment ? La Droite ? Le PS ? Aucune importance. Les cyclopes (les spéculateurs, essentiellement français, allemands et grecs) mangent un par un les citoyens grecs de droite ou de gauche.
Le théâtre de l’absurde à l’agora d’Athènes. Le peuple : Nous avons voulu une grande majorité (160 députés PS, 21 PC, 13 radicaux sur 300) pour des vraies reformes de gauche. La social-démocratie : Nous sommes en régime post-démocratique. Il n’y a que les communistes et les gauchistes qui utilisent de telles catégories : peuple, élections, souveraineté, reformes de gauche. Les élites qui savent, sorties des meilleurs universités américaines et européennes pensent autrement. Il faut faire confiance. Il n’y a pas d’autre solution. There is no alternative.
Pendant ce temps-là, le déficit public global moyen de la zone euro avoisine les 6 % du PIB, les Etats-Unis et le Royaume-Uni battent tous les records et le Japon est hors concours. D’après l’INSEE, la France connaît la pire récession depuis 1945. Les banques se refinancent auprès de la BCE à des taux entre 0,5% et 1%. La Grèce doit emprunter de 6% à l’infini (actuellement 29,8%). L’euro protège les peuples, disent les textes. L’euro protège les … banques dont les peuples sont des otages.
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La France perd de l’argent avec les Grecs
La classe supérieure française s’inquiète. « La Grèce a vécu au-dessus de ses moyens et maintenant les contribuables français et allemands vont payer l’addition, voilà la seule vérité. » Parole d’expert initiée par un éditorial du journal du groupe Lagardère (aujourd’hui de la banque Lazard). Le racisme est un élément fondateur de “ l’identité française ” (pétainiste).
Le Crédit Agricole a mis la main sur le Crédit Agricole grec et la Société Générale a absorbé son homologue grec. Carrefour ouvre son 33e supermarché en Grèce. Les couches populaires grecques envoient la plus-value à la classe supérieure française qui n’est pas satisfaite. Les caissières grecques ne travaillent pas assez. Les ouvriers et employés grecs se bronzent au soleil sur le dos du contribuable français. “L’achat du siècle” par la Grèce de 50 Mirage 2000 n’est pas suffisant pour résorber le chômage en France. Grecs, encore un effort. « Les frégates françaises peuvent vous sauver contre les Turcs ; prenez-en en promotion. En matière d’investissements productifs (!) nous avons le PMU. Nous sommes candidats à l’achat de votre PMU désuet. Tout le monde y gagnera. »
La veille de la réunion à Bruxelles « pour sauver la Grèce » le premier ministre grec est passé par Paris pour rendre visite à Carla et son mari Nicolas. La classe supérieure grecque a confirmé l’achat de six frégates furtives FREMM (2e génération !) et des avions Rafales Dassault (que personne n’en veut) avec l’argent de la dette. Mon beau Serge tu dis merci à qui ? Si la Grèce s’en va qui achètera tes avions ?
L’Allemagne perd de l’argent avec les Grecs
La classe supérieure allemande s’inquiète. « L’éventuel renflouement de la Grèce suscite une forte opposition en Allemagne. Le sentiment qui domine est que l’Allemagne paye plus qu’elle ne reçoit, alors si elle doit en plus aider la Grèce, ce sera très difficile à expliquer ». « On n’aide pas un alcoolique en lui donnant encore une nouvelle bouteille d’eau-de-vie ». La pauvre Mme Merkel ne pourra pas expliquer à son peuple une aide aux alcooliques (c’est-à-dire les élites grecques qui ont fait leurs études en Allemagne ! Le premier ministre Simitis et la ministre des affaires étrangères fille Mitsotakis).
La Grèce avait payé quatre sous-marins allemands qui avaient tendance à … remonter de travers à la surface. La Grèce a demandé à l’Ecole polytechnique d’Athènes d’expertiser la camelote. Refus de la chancelière ; trop humiliant pour la technologie allemande ! Dans ce cas, que l’OTAN se porte garant, demandent les Grecs ; refus nouveau. Les Grecs ont payé mais ils n’ont pas vu les sous-marins. Comment alors, l’expliquer au peuple allemand ?
« La moitié de députés grecs (droite et PS grecs) ont reçus de pots de vin et commissions de la part de Siemens, premier employeur privé allemand ». Un de plus gros scandales du siècle portant sur les marchés de la firme allemande (1,3 milliard d’euros de fonds douteux) avait comme cerveau le directeur de cabinet de … Mme Merkel. La classe supérieure allemande a même réussi à rapatrier, grâce à une fuite à la Polanski, l’organisateur grec avec la complicité des libéraux grecs (la double nationalité pour les cadres européens est nécessaire voire obligatoire). Comment alors, l’expliquer au peuple allemand ?
Mme Merkel ne doit pas désespérer. Elle a de quoi expliquer au peuple allemand. Les négociations pour l’achat de quarante avions Eurofighter (EADS sans Gregorin) par la Grèce est en bonne voie. Merci au peuple grec, génie du sacrifice comptable ! Elle a intérêt à composer avec les gentils socialistes grecs, car la droite libérale (qui connaît bien les notions d’actif-passif) réclamera les dédommagements qui tardent à venir de la deuxième guerre mondiale. Et l’extrême Droite grecque cette fois-ci est du coté de la patrie. Le monde à l’envers !
Le peuple grec a bien retenu les conseils de Mme Merkel : « Les Grecs ne travaillent pas assez ». En effet, dans toutes les manifestations à Athènes les panneaux fleurissent avec l’inscription du camp d’Auschwitz
Arbeit macht frei (le travail rend libre).
La grande bouffe
Les milliards de la « dette » grecque coulent à flot. « Les banques françaises et allemandes cumulent plus de 115 milliards de dollars d’exposition en Grèce et six fois plus dans l’ensemble de l’Europe du Sud. Français, Allemands, Anglais, boivent à la santé du peuple grec ! Le contribuable français (comme dirait le Monde de la banque Lazard) en met plein les poches ! Le 27 octobre 2011, Sarkozy a révélé qu’il a encaissé 200 millions d’intérêts de la dette grecque, en tant qu’actionnaire de la Société Générale, dont le PDG est un ex de son cabinet. La confiance aux marchés paye …
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Le Monde, journal de la droite décomplexée
Le journal libéral des élites de la banque Lazard (Lagardère à 2009) nous avait prévenus déjà le 12 décembre 2009 : « En théorie, le traité de Maastricht interdit toute forme d’assistance à un Etat de la zone euro en situation de banqueroute. Dans la pratique, on voit mal comment les pays d’Europe du Nord et la Banque centrale européenne pourraient laisser tomber un pays défaillant, sous peine de provoquer une grave crise de défiance vis-à-vis de l’euro. Reste à savoir comment les contribuables allemands, néerlandais ou français réagiront quand leurs impôts augmenteront pour sauver Grecs ou Portugais. » Comment faire ? Exactement comme pour les dépenses de la famille “royale”, les commissions occultes, les guerres en Libye, en Afrique et en Asie, les cadeaux au patronat, … En tout cas, les Français ont bien réagi ; 89% ne souhaitent pas “aider” les Grecs.
Le journal vespéral des marchés titre : « Papandréou, l’homme qui fait trembler l’euro ». Mon dieu ! Hercule arrive. Et sa « journaliste » libérée fait le portait politique de celui qui fait secouer l’euro : « Le raffinement est son arme. Costume bleu marine, chemise blanche, cravate délicatement violette, Georges Papandréou a la silhouette longue et distinguée, la moustache taillée au millimètre, la politesse souriante, l’anglais parfait du brillant élève passé par Harvard et la London School of Economics, la graisse évanouie dans des heures quotidiennes de fitness et de cyclisme à haute dose. Si peu balkanique, si différent. » Je préfère le vocabulaire de Paris-match ; il est plus riche.
Le Figaro, journal de la Gauche responsable
Le groupe Dassault, s’est démené, il est vrai, dans sa campagne pour aider la Grèce et son gouvernement socialiste. « On ne laissera pas tomber la Grèce » titrait son Figaro. Mme Lagarde découvre la démocratie athénienne et la solidarité entre les peuples. Amour foudroyant avec le ministre grec socialiste de l’économie.
Hélas les amours-passion durent si peu de temps. Le petit caporal de l’Elysée est catégorique : « Les Grecs, qu’ils nous remboursent ou dehors ! » Les Grecs, qui avaient construit l’avenue Giscard d’Estaing à Athènes en 15 jours tardent à exécuter. « Grèce, France, alliance » scandait en coeur la bourgeoisie franco-grecque à l’époque. Elle ne regrette pas d’avoir reçu l’enfant de la tante de Salonique en grandes pompes au Parlement lorsqu’il a voulu un vernis démocratique de l’antiquité grecque. Ah, ces Grecs, ils sont superficiels par profondeur, disait Nietzsche.
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L’explication des élites en France
Les élites (qui savent !) de la classe supérieure sont formelles : « La zone euro avait fini par accueillir en son sein la Grèce, berceau de la civilisation occidentale mais aussi génie de l’artifice comptable » (Le Monde). Artifice comptable ? Par qui ? Le Diable ? Les communistes ? Les islamistes ? Comment se fait-il que les élites grecques, de religion libérale, formées dans les meilleurs écoles de Paris, Londres, Harvard trafiquent les bilans comptables d’un pays de l’Euroooooope ? Même les petits mécaniciens du village Delors et autres sociaux-chrétiens sont outrés.
Mezalors, les « grandes agences de notation », les anges gardiens de l’orthodoxie du marché catholique, n’ont rien constaté pendant dix ans ? Pas assez de diplômes ? Pas assez de prix Nobel ?
Et le directeur de la Banque centrale européenne (salaire six millions de dollars par an) n’a pas vu les copains de promotion qui trafiquait les bilans ? Génie lui aussi de l’artifice comptable ? Pas assez de diplômes ?
Et le FMI ? Il faisait quoi ? Il s’occupait de l’affaire hongroise seulement ? S’il avait fait au moins Harvard comme les dirigeants grecs … DSK présumé innocent …
Pour les élites françaises (incapables de gérer quoi que ce soit malgré des rémunérations exorbitantes) il y a les Spéculateurs (des noms ?) qui, de temps en temps, perturbent le marché. C’est une farce maintes fois répétée.
Le christianisme (ses fondateurs illettrés et ses élites lettrées) avait inventé le Diable (le mal) face à Dieu (le bien). Or, Dieu n’a jamais réussi à éliminer le Diable. On connaît les dégâts. Obscurantisme, misère, guerres, absence de droits fondamentaux, promesse de paradis. C’était la faute du Diable ! Aujourd’hui c’est la faute des Spéculateurs. Même, lorsque le Diable n’est pas en cause, les élites vous diront aujourd’hui que les ouvriers ne travaillent pas assez, les employés ne foutent rien, le temps libre ne sert qu’à « boire et à battre sa femme », … Le peuple ne travaille pas assez et les classes supérieures se donnent du mal à trouver des solutions. Et le comble ; ils vous diront sans honte que les structures, qu’eux mêmes conçoivent régulièrement, ne sont plus performantes ! Il faut changer de modèle !
A vrai dire, il y a un point sur lequel nous sommes d’accord : En Grèce, les élites s’emploient à travestir les deux notions fondamentales que le peuple a forgées : La Liberté et la Démocratie léguées par les anciens. Les combattants de l’EAM ne connaissaient pas le mot « consensus » avec l’occupant. En France, les élites s’emploient avec ardeur à défaire méthodiquement le Programme Nationale de la Résistance (15 mars 1944) ; en clair, le programme élaboré au nom du peuple résistant. Gaullistes et communistes ne connaissaient pas le mot « consensus » (dit pétainiste) inventé par la social-démocratie pour se compromettre en toute impunité politique. Le gouvernements grec et français doivent bientôt « choisir entre un appauvrissement généralisé de la population et une sortie de l’Euro » . La droite, l’extrême droite et le PS grecs et français ont déjà choisi. D’après vous ?
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Au temps de Clisthène, de Solon, de Periclès les voyous de la classe inférieure, que les nobles appelaient démocrates (la pire des insultes), ont essayé de bâtir une cité idéale. Aujourd’hui, les voyous de la classe supérieure que les humbles appellent les élites (louange suprême) expulsent Athéna, la déesse de la sagesse pour y mettre Ploutos, le dieu de l’argent.
Ne pleurez pas les Grecs. Ils ont chez-eux Yannis Ritsos, le poète de la résistance. Dans son poème Grecité, il nous dira que les Grecs ont besoin de Soleil, de Savoir et de Justice. Ils sont dignes même dans la misère, rebelles contre l’irréversible, fiers de ne jamais collaborer avec l’occupant. Ils ne sont pas “européens”. Ils ont l’avenir avec eux.
Ces arbres ne peuvent se rassasier de moins de ciel,
Ces pierres ne peuvent se rassasier sous les pas étrangers,
Et ces hommes ne peuvent se rassasier que de soleil,
Et ces cœurs ne peuvent se rassasier que de justice.
(texte publié en février 2010 et actualisé le 4 novembre 2011)