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Billet de blog 9 décembre 2015

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Conte pour enfants

Conte pour enfants où toute ressemblance avec des événements historiques ou actuels serait, comme d'habitude, le seul fait du hasard

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Les chasseurs, les loups et la maman dans la Forêt sans nom

Il était une fois, au milieu d’un pays et depuis la nuit des temps, une immense forêt. On appelait cette forêt la forêt sans nom. Elle couvrait un grand nombre de douces collines et de vallées formant entre elles comme un labyrinthe. La forêt sans nom était si grande qu’elle entourait des montagnes et de grands volcans couverts de neige jusqu’en été.  De là venaient presque toutes les rivières du pays : elles sortaient de la forêt sans nom et traversaient les paysages de tous côtés jusqu’à la mer.

Dans la forêt, vivaient plein de sortes d’oiseaux, de plantes, d’animaux et d’arbres : de très beaux et très grands arbres, mais aussi de plus modestes, néanmoins d’une taille harmonieuse et d’un ombrage parfait. Au pied de ces arbres, à l’automne, s’épanouissaient quantités de champignons : les uns, délicatement parfumés, délicieux à manger en omelette baveuse ou avec du pâté ; mais d’autres, à surtout ne pas cueillir car c’étaient des poisons. En plus des champignons, on trouvait des myrtilles et des fraises des bois, elles aussi d’un goût merveilleux. Sur les pentes boisées ou dans les fossés poussaient également des herbes et des fleurs qui guérissent les maladies si on les cueille au bon moment et si on sait bien les choisir, les mélanger et les préparer. Mais aussi d’autres herbes, à ne pas mettre entre toutes les mains parce que, si elles sont euphorisantes (jusqu’à faire rire et voir, sans dormir, des choses fantastiques qu’on ne voit même pas au cinéma) elles sont dangereuses jusqu’à tuer à petit ou grand feu ceux qui les goûtent.

A partir d’un certain âge, presque tous les gens du pays connaissaient aussi bien les merveilles que les dangers de cette extraordinaire forêt sans nom. Pourtant, presque personne n’y allait. A cause des loups. De grands loups noirs avec des yeux rouges ; des loups féroces avec de grandes dents blanches ; des loups puissants et affamés courant très vite, et grimpant aux arbres. Si bien que tous ceux et toutes celles qui voulaient traverser la forêt, ou aller y cueillir les champignons et les plantes, devaient se faire accompagner par des chasseurs, chaque chasseur avec au moins deux fusils et une mitraillette : un fusil sur l’épaule droite (à prendre de la main gauche) pour tirer sur les loups méchants attaquant par la gauche ; un fusil sur l’épaule gauche (à prendre de la main droite) pour tirer sur les loups méchants attaquant par la droite ; et la mitraillette sur le ventre pour tirer sur les loups méchants attaquant par devant.

C’étaient donc des chasseurs très bien armés, mais qui n’avaient pourtant rien trouvé pour tirer sur les loups méchants attaquant par derrière. Et çà, c’était vraiment dommage, car ces loups-là étaient réellement les plus méchants : c’étaient les loups mange-fesses.

A la tête du pays, le chef du gouvernement et ses ministres étaient en colère. Cela faisait des années et des années qu’ils demandaient aux chasseurs la solution pour enfin pouvoir tuer les loups mange-fesses qui attaquent par derrière. Mais les chasseurs n’avaient trouvé aucune bonne solution. Ce n’était pas faute pour eux d’y avoir travaillé. Pour agir efficacement, disaient-ils, ils n’arrêtaient pas de se réunir sans leurs femmes et leurs enfants, et ils avaient ainsi imaginé et inventé entre chasseurs uniquement une énorme quantité de solutions en tenant des assemblées, des colloques, des congrès, et même des séminaires. Les chefs des chasseurs terminaient toutes ces réunions par de « fortes déclarations », comme ils disaient, avec demandes d’argent au gouvernement. En plus, ils adressaient souvent des instructions aux ingénieurs et aux fabricants des armes, des munitions, des costumes et même des repas pour chasseurs. En effet, ils finissaient leurs réunions par un très bon repas de façon à ce que tous les chasseurs repartent contents. Il était en extrêmement important qu’à la fin de leurs rencontres entre chasseurs, tous les chasseurs repartent contents chez eux. Car, en temps ordinaire, les chasseurs se divisaient en deux grandes catégories prêtes à se bagarrer l’une contre l’autre.

La première catégorie rassemblait les chasseurs qui chassaient en marchant devant les autres ; c’étaient ceux qui se disaient les plus courageux car ils se mettaient en avant. En réalité, s’ils étaient regroupés, ils ne risquaient pas grand chose, et c’était aussi la meilleure position pour tuer facilement les plus idiots des loups méchants, ceux qui ne réfléchissent pas, et attaquent par devant. Par contre, malheur au chasseur qui se retrouvait tout seul ! Il pouvait mourir dévoré par les loups, même les plus idiots, et alors le gouvernement n’a plus qu’à organiser une très belle cérémonie pour son enterrement. Mais, s’ils se regroupaient, les chasseurs en avant tuaient beaucoup de loups avec leurs deux fusils et leur mitraillette sur le ventre, et ils gagnaient de l’argent en vendant les peaux et le reste des loups.

La seconde catégorie de chasseurs réunissait ceux qui chassaient en marchant derrière ceux de la première catégorie. Plus modestes, ces chasseurs marchant derrière protégeaient en réalité les chasseurs marchant devant contre les plus malins et les plus dangereux loups : les fameux loups mange-fesses attaquant par derrière. Tandis qu’eux n’étaient protégés par personne, et même par rien du tout, à cause de l’impossibilité technique de blinder les fonds de culotte des chasseurs.

En cas d’attaque des loups par derrière, c’étaient donc les chasseurs en arrière des autres chasseurs qui se faisaient manger les fesses, et c’était ensuite pour eux très ennuyeux car, même s’ils n’en mouraient pas, ils avaient du mal à s’asseoir tout le reste de leur vie. Il fallait leur mettre plein de coussins sur les sièges où ils devaient s’asseoir. En particulier, lors des réunions entre chasseurs qui duraient très, très longtemps. Or, pendant des années et des années (peut-être des siècles, dit-on…) ce furent les chasseurs en avant qui eurent les meilleurs fauteuils, bien qu’ils avaient les fesses en pleine forme et n’avaient donc pas mal à leur séant. D’ailleurs, ils disposaient des meilleurs fauteuils grâce à l’argent qu’ils avaient gagné en tuant les loups idiots qui attaquaient par devant. Cette situation mettait en colère les chasseurs en arrière qui avaient, eux, réellement besoin d’excellents fauteuils afin de pouvoir s’asseoir sans avoir mal aux fesses. Il fallut une grande révolution pour que tous les chasseurs aient droit aux mêmes fauteuils, et aujourd’hui, c’est la très grande qualité des fauteuils pour tous les chasseurs qui les incitent, comme ils le disent eux mêmes, à toujours se réunir en leur Siège.

L’égalisation des chasseurs dans le droit aux meilleurs fauteuils était nécessaire, mais pas suffisante. Elle n’avait en réalité pas servi à grand chose pour trouver enfin la solution technique contre les attaques par derrière des terribles loups mange-fesses. Il arriva cependant qu’à la fin d’un congrès très réussi en leur Siège, tous les chasseurs se mirent d’accord en imaginant une brillante solution. Ils eurent l’idée d’utiliser une seconde mitraillette, cette fois-ci installée sur leur chapeau. Solidement attachée sur le chapeau à plumes, cette mitraillette était pointée à demeure vers l’arrière. Il suffisait alors de compléter l’installation avec : d’une part, l’ajout d’une tige en biais portant un rétroviseur sur l’avant du chapeau, de façon à ce que le chasseur puisse être renseigné, sans avoir à tourner la tête, sur ce qui arrive derrière lui ; et d’autre part, avec l’installation d’une ficelle dont l’un des bouts était attaché au mécanisme de la mitraillette sur le chapeau tandis que l’autre bout, après avoir passé par un anneau fixé à la pointe du chapeau, venait pendre devant les yeux du chasseur. Le chasseur en regardant dans le rétroviseur n’avait plus qu’à tirer sur le bout de ficelle pour tirer sur le loup venant par derrière (Voir le dessin technique) Il pouvait donc tuer le loup sans se retourner à condition de bien mettre sa tête dans le bon axe de tir (Voir le manuel d’instruction pour les chasseurs gradés)

Dés la fin de ce fameux congrès, les ingénieurs et les fabricants se mirent au travail, assurés d’être bien payés par le gouvernement qu’enthousiasmait la proposition des chasseurs. Mais, lors des essais, ce fut la catastrophe pour plein de raisons. D’abord, les chasseurs n’avaient pas voulu que l’installation de la mitraillette se fasse à la place des belles plumes traditionnelles sur leur chapeau. Là-dessus, le gouvernement leur avait donné raison : comment, en effet, se faire reconnaître comme bon chasseur sans un chapeau à plumes ? C’est pourquoi, les ingénieurs avaient installé la mitraillette légèrement sur le côté du chapeau, ce qui faisait glisser, en marchant, le chapeau sur l’oreille, et cela déréglait aussitôt le rétroviseur. Ensuite, l’agitation des plumes ébouriffées à la moindre brise cachait dans le rétroviseur l’image du loup mange-fesses arrivant rapidement et sournoisement par derrière. Enfin, même s’ils voyaient très bien le loup derrière eux, les chasseurs avaient beaucoup de mal à mettre aussitôt la tête en bonne position de tir. Ils se trompaient à cause de l’image inversée dans le miroir du rétroviseur. Alors, ils avaient tendance à se retourner tout en tirant, et ils en venaient ainsi à se tirer les uns sur les autres, ce qui n’était pas du tout le but recherché.

Quand les essais du chapeau-mitraillette faisaient des morts, tout le monde pleurait, et le gouvernement organisait alors, comme pour les chasseurs isolés dévorés par les loups, une magnifique cérémonie pour enterrer les morts, consoler les familles, et redonner du courage aux chasseurs pour de nouveaux essais. Et quand, par chance, personne n’était tué, cela faisait quand même rire les non chasseurs qui trouvaient ridicule la solution du chapeau-mitraillette. Mais pas le gouvernement ; ni les gens qui avaient besoin, ou croyaient avoir besoin, des chasseurs pour aller dans la forêt sans nom.

*

Un jour, l’épouse d’un chasseur qui s’était fait manger les fesses et ne s’asseyait plus que sur un empilement d’au moins sept coussins remplis de plumes d’oiseau-lyre, fut très ennuyée : elle avait besoin en urgence de plantes médicinales de la forêt sans nom pour soigner sa fille qui avait très mal au ventre. La charmante enfant avait en effet mangé trop de champignons - disait-elle - ou d’herbes euphorisantes, selon ce que racontaient, en douce, ses copines. Peu importe : dans les deux cas, la maman savait que le remède était le même, mais qu’il fallait faire vite. Or, les plantes dont elle avait besoin doivent être cueillies à l’aurore, au moment de la rosée, sur une pente exposée au soleil levant. Elle savait où les trouver au milieu de la forêt sans nom : dans les éboulis d’un vieux volcan éteint. Elle y était déjà allée une fois en accompagnant son mari, lors de l’avant-dernière chasse qu’il avait faite dans la catégorie des chasseurs en arrière, juste avant de se faire mordre par un loup aussi rapide que féroce, malin et silencieux. Désormais, son mari ne pouvait plus chasser, et tous les autres chasseurs étaient indisponibles, occupés au Siège à réfléchir et à manger ensemble. Elle décida donc d’aller seule dans la forêt sans nom, laissant sa fille à la garde de son papa aidé par les voisins. Et il fallait qu’elle parte avant la nuit.

La maman se mit à réfléchir : comment passer sans encontre malgré les loups dans la forêt sans nom ? Elle n’avait pas d’armes et, d’ailleurs, elle n’en voulait pas. Elle connaissait trop bien l’histoire de la mitraillette sur le chapeau de chasseur. Elle voulait pourtant garder ses fesses entières, ne serait-ce que pour ramener à sa fille, en temps voulu et en courant s’il le faut, les plantes guérisseuses. Elle se demanda donc simplement si elle avait dans sa réserve de nourriture quelque chose de bon qu’un loup mange-fesses aimerait encore mieux déguster que des fesses de chasseur lourdement armé, ou de maman courageuse et sans armes. Elle se souvint alors qu’en guise de cadeau, des oncles lui avaient rapporté de Sibérie (ou d’Amérique, ou d’Afrique, elle ne savait plus) d’énormes saucissons d’autruches et de fesses de mammouth dont elle ne savait quoi faire, car ils étaient vraiment trop durs, à se casser les dents. C’étaient des saucissons en effet très spéciaux car il fallait absolument, selon les oncles, qu’ils proviennent d’autruches et de mammouths morts tranquillement de vieillesse, et non pas tués. Sans quoi, les saucissons n’avaient plus rien de « magique ». La maman pensa que les loups aimeraient les manger car ils avaient des dents suffisamment puissantes pour ces saucissons-là. Elle en prit trois énormes exemplaires qu’elle fourra dans son grand sac à dos, et elle partit.

Lorsqu’elle arriva vers minuit à l’orée de la forêt sans nom, le silence était impressionnant mais la nuit remplie par les étoiles et la pleine lune restait éblouissante au-dessus des ténèbres des arbres. De temps en temps, un cri d’oiseau éclatait dans ce silence, après quoi plus de bruit, pas le moindre souffle. Rien. On aurait entendu de très loin quelqu’un, ou une bête, marcher sur le tapis de feuilles mortes dans les sombres frondaisons, ou les allées d’herbes folles illuminées par le clair de lune. Dans ces conditions, la maman se dit qu’il valait mieux qu’elle suive les allées forestières sans craindre d’y faire du bruit. Cependant, par précaution, et pour ne pas avoir à se retourner constamment en marchant, elle relâcha les sangles du grand sac à dos rempli de saucissons afin de le descendre jusqu’à couvrir ses fesses. Elle se disait que si un loup l’attaquait par derrière, ses dents seraient aussitôt occupées par un gros saucisson avant d’atteindre ses fesses à elle, et qu’elle pourrait se retourner et faire face. Elle se mit alors à rire en pensant que les chasseurs n’avaient même pas été capables de cette idée-là malgré leurs innombrables réunions et discussions. Prenant ainsi confiance, elle entra dans la nuit de la forêt sans nom en chantant les meilleures chansons de son vaste répertoire.

A peine avait-elle avancé dix minutes dans l’allée forestière illuminée par la lune qu’elle distingua juste devant elle, assise sur un tronc renversé au bord de l’allée, une ombre noire au profil parfaitement reconnaissable : la silhouette d’un grand loup mange-fesses ! Elle cessa aussitôt de chanter. Le loup ne la regardait pas : il contemplait la lune. Mais au petit craquement que fit entendre une brindille sous les pas de la maman, il tourna la tête, et la maman sentit son cœur battre très fort dans sa poitrine dès qu’elle vit l’éclat terrifiant des yeux rouges qui se mirent à la fixer. Cependant, elle maîtrisa  sa peur et avança encore de quelques pas avant de s’arrêter, sans plus bouger. Le loup ne bougeait pas non plus. Le temps, seul, continuait d’avancer. Sans trop attendre, la maman dit au loup d’une voix forte mais tranquille : « Loup, je t’ai apporté le meilleur à manger ». Déposant alors lentement le sac de ses épaules, elle l’ouvrit et sortit un gros saucisson puis, s’approchant lentement à quelques pas de la bête, le déposa devant lui, puis recula jusqu’à son sac.

Le loup baissa le cou et la tête, en gardant ses yeux rouges fixés sur la maman. Il flairait de loin le saucisson. Quelques instants plus tard, il sauta du tronc, s’approcha du cadeau, le flaira encore, et se mit enfin à le manger. La maman ne bougea pas, se doutant qu’elle devait attendre la fin du repas. C’est alors qu’elle vit quelque chose de « magique » : pendant qu’il mangeait, les yeux du loup changèrent de couleur : de rouges, ils étaient devenus violets, puis bleus. Bleu profond suivi d’un bleu azur. Soudain, ils passèrent au vert, un vert d’herbe tendre et vraiment surprenant pour des yeux de loup mange-fesses. Puis, ce vert tendre se transforma en plein de nuances qui firent la maman penser aux éclats d’une pierre précieuse appelée aigue-marine, et lorsque le loup eût achevé le saucisson, son regard était d’un or profond, une sorte de plein gris-or étincelant, rempli de joie solaire, couleur de brume matinale et ensoleillée. Il regrimpa sur le tronc d’arbre renversé, tandis que, surgissant du plus noir de la forêt sans nom tout autour, deux grandes chouettes grises aux ailes silencieuses vinrent se poser de chaque côté de lui. Des chouettes elles aussi avec des grands yeux d’or gris, d’une profondeur inestimable.

La maman demeura un long moment admirative devant les trois ombres immobiles aux mêmes regards splendides. Puis, elle comprit ce que l’ensemble loup-chouettes lui disait en silence : qu’elle pouvait poursuivre sa route vers les plantes guérisseuses à condition de ne toujours pas faire d’erreur dans le monde subtil de la forêt sans nom. Elle sortit le deuxième saucisson du sac et le posa au même endroit devant le loup aux yeux d’or. Le loup ne bougea pas, mais une des deux chouettes s’envola pour aller se poser plus loin dans l’allée, à la limite où la maman pouvait encore la voir sous la clarté de la lune. Là, la chouette agita ses ailes d’un signe qui appelait à venir… La maman remit le sac sur son dos et avança pour la rejoindre. Passant devant le loup et la seconde chouette dont les regards en or la suivaient, elle les salua courtoisement et poursuivit sa marche sans se retourner. C’est alors qu’elle entendit s’envoler derrière elle, et la suivre sans la dépasser, la deuxième grande chouette grise aux yeux d’or.

Tout était en ordre : la maman n’avait plus qu’à suivre la première chouette tandis que la seconde la protégeait en arrière. C’est ainsi qu’elle traversa la forêt sans nom. Elle rencontra plein de loups, mais aucun ne l’attaqua, à cause de la présence des chouettes grises aux yeux d’or. Elle trouva les plantes au lever du soleil dans les éboulis du vieux volcan éteint, et revint par le même chemin. Repassant devant le grand loup immobile dont les yeux étaient toujours d’or, elle déposa le troisième saucisson. Et c’est là que les chouettes cessèrent de l’accompagner et disparurent en un clin d’œil avec un grand cri d’au revoir au milieu des arbres.

Revenue chez elle, la maman prépara le remède pour sa fille en commençant de lui raconter l’histoire. Mais sa fille ne voulut pas l’entendre. Elle avait trop mal au ventre, elle prit la potion et alla dormir. Le lendemain, heureuse d’être guérie, elle se fit alors raconter toute l’histoire. L’ayant écoutée, elle dit que son papa et sa maman devaient maintenant utiliser leurs loisirs à élever des autruches et des mammouths afin d’avoir, le temps venu, assez de saucissons à offrir aux loups mange-fesses. Elle dit aussi qu’il fallait trouver quels autres animaux que les autruches et les mammouths peuvent être élevés pour en faire, après leur mort et sans les tuer, des saucissons magiques. Tout le monde, autour d’elle fut d’accord : il y a tant de loups mange-fesses à nourrir et à transformer en loups-chouettes aux yeux d’or …

 Mais lorsque la maman voulut raconter son histoire aux chasseurs, ceux-ci refusèrent de la croire. Surtout les chasseurs en avant, ceux qui ont les fesses entières, et jamais mal en s’asseyant. Ils voulaient encore ne penser à rien d’autre que de toujours essayer de faire bien fonctionner la mitraillette sur chapeau à plumes. Comme le gouvernement n’a plus d’argent, ce sont maintenant les banques qui leur font des prêts. Et les chasseurs ont cinquante ans pour les rembourser. C’est dire s’ils ont encore beaucoup de travail et de bons repas devant eux.

Heureusement, les non chasseurs et quelques chasseurs de l’arrière aux fesses entamées ont mieux écouté la maman accompagnée par toute sa famille et les voisins. Certains, qui habitent à la campagne essaient maintenant d’élever des autruches et des mammouths. D’autres n’y songent pas, car ils habitent en ville dans des appartements ; ou dans des maisons avec un jardin trop petit. Mais, les plus savants étudient la façon de créer des variétés d’autruches naines. Déjà, ils ont obtenu des volatiles qui se mettent la tête dans le sable et qui ressemblent, à s’y méprendre, à des poules au cou nu. Quant aux mammouths nains, ils pensent les obtenir, surtout en ce qui concerne les mammouths laineux, par croisement avec des bichons maltais. Et pour çà, ils commencent, eux aussi, à organiser plein de réunions. Cependant, à la différence des chasseurs, ils emmènent à ces réunions leurs femmes et leurs enfants, et tout le monde a le droit d’y prendre la parole. Cela énerve le gouvernement et ne facilite pas les discussions. Pourtant, on dirait déjà qu’ensemble, ils travaillent finalement beaucoup mieux que les chasseurs qui cherchent depuis des années et des années le moyen de faire bien fonctionner le système de mitraillette sur leur beau chapeau à plumes.

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