Après le retrait du pôle économique dans la journée, en fin d’après-midi, mardi (18/04/2017), nous apprenions que les peuples autochtones se retiraient des collectifs (plus précisément du collectif Pou Lagwiyann dékolé). On se disait bien que la rétrocession totale du foncier par l’État, exigé par les collectifs, les inquiéterait. Eux, n’ont pas cru une seconde que cette revendication avait pour objectif des créer des ères écotouristiques ou de développer l’agriculture. Ils ont tout de suite vu le piège : orpaillage, spéculation foncière… faut dire qu’ils ont l’exemple du grand voisin, le Brésil. Cette réaction était prévisible.
Ce qui l’était moins fut le coup de théâtre du début de soirée de ce même mardi : au tour de Mika Mancée d’annoncer son retrait : « Nous avons oublié que la stratégie est une discipline établie qui ne supporte pas l’amateurisme », a-t-il sobrement déclaré.
C’est ce que nous avons toujours affirmé, ici et avec quelques autres sur les réseaux sociaux. Et nous étions bien seuls. Parfois menacés.
Lucidité tardive d’un leader
Que ne l’a-t-il pas eu plus tôt cet éclair de discernement, bien avant que ça parte dans tous les sens avec un Goudet incontrôlable, sans la moindre idée de ce à quoi il voulait arriver ? Avec les repris de justice Mariéma et Horth ou d’autres dont la seule action se résumait à des invectives ridicules. Avec des syndicalistes complètement déconnectés des réalités comme Davy Rimane...
Les ministres, à Cayenne, ont tout de suite repéré leurs fragilités, cependant beaucoup de monde a cru aux excuses de celle de l’outremer. Tu parles Charles ! elle n’avait qu’une envie : rentrer à Paris. Le Premier ministre et ses conseillers ont immédiatement cerné l’incompétence stratégique de ceux qui se sont improvisés porte-parole sans regarder plus loin que le bout de leur nez. En vieux briscard, Bernard Cazeneuve savait que les collectifs ne résisteraient pas aux luttes internes dominées par des ego exacerbés. En fait, ces 500 frères et autres collectifs, ce fut tout simplement une arnaque. Nous ne mettons pas en cause la sincérité de ceux qui ont défilé dignement dans les rues de Cayenne. Nous ne remettons pas en cause non plus la sincérité d’un Mancée. Mais que diable n’a-t-il pas agi, lui et ses vrais amis, pour se débarrasser de ces électrons libres ivres d’eux-mêmes ?
Aujourd’hui, Mancée nous dit que ce n’est que le commencement et qu’il est impossible de rattraper 50 années de retard en quelques jours. Il a certainement raison. En attendant, le résultat n’est pas fameux : un milliard; grosso modo ce qu’il y a dans le contrat d’avenir, quelques colmatages ici ou là, mais rien sur le fond alors que la France va changer de gouvernement dans des conditions incertaines. Rien sur l’impéritie des élus. Rien sur la place de la Guyane dans son environnement sud-américain, rien sur le statut, rien sur la technocratie guyanaise... Rien.
Et surtout il y a eu des dommages collatéraux particulièrement graves et regrettables : des élèves qui à quelques semaines des grandes vacances ont perdu plus d’un mois de cours, des entreprises fragilisées comme si la Guyane avait besoin de cela, et puis des blessures infligées par des abrutis qui ont profité de la situation pour se livrer à des actes violents et racistes. D’autres ont même réglé quelques comptes bien antérieurs au mouvement social. Sans doute faudra-t-il oublier tout cela. Pour certaines et certains, la cicatrisation sera longue.
Alors, répétons-le, c’est maintenant que les Guyanais doivent dire ce qu’ils veulent, écrire leur avenir, peaufiner leur projet. Et cela ne se fait pas avec des révoltés du bar du Commerce, des harangues douteuses aux barrages, des aller-retour inutiles et lamentables à Paris ou ailleurs. Ce n’est pas avec des pseudo grévistes, des insultes, des menaces, des cartons rouges que l’on s’émancipe ! Et encore moins avec des cagoules.
Dernière mise à jour : mardi 18 avril 2017 à 23:15 (Cayenne, 19/04 à 4:15 Paris)
[Dans le même temps les discussions se poursuivent. Un protocole d'accord envoyé par le gouvernement est étudié par les membres du collectif, selon Valérie Vanoukia.]