Comment, en tant que personnel politique de droite, contribuer à la majorité absolue du RN à l’assemblée, tout en appelant au barrage (pour avoir l’air) républicain ?
Un homme, ou une femme, politique de droite doit avant tout paraître respectable. Défendre les « valeurs de la République » et, du haut de cet Aventin moral, distribuer des bons et mauvais points de républicanisme aux autres partis, surtout de gauche, surtout LFI. Mais pour cela, il est encore de mise de rejeter le RN, du moins dans le discours. Parce que dans le réel, mais sans le dire, on préfère Hitler au front populaire. D’où la question : dans le duel extrême droite/gauche qui s’annonce au second tour, comment faire en sorte d’assurer la victoire au RN tout ayant l’air de le combattre afin de conserver son autorité morale ?
Il suffit, pour comprendre, d’écouter quelqu’un comme Édouard Philippe, grand éborgneur devant l’Éternel. Il dit, pour sembler être un républicain exemplaire, de faire barrage au RN, sauf dans quelques cas bien précis concernant des gens vraiment infréquentables de LFI. « Des fichés S, ma bonn’ dame, vous vous rendez compte ? » Et le tour est joué. En effet, il est fort probable, même si ce n’est pas souhaitable, que le RN manque la majorité absolue de quelques sièges seulement. Il suffit donc de leur assurer subtilement ces quelques sièges. Déclarer que le front républicain est nul et non avenu serait une stratégie extrêmement grossière, et risquerait même de choquer une partie de son électorat. D’autre part seuls quelques sièges sont nécessaires, et même si abondance de bien ne nuit point, cela deviendrait très visible. Mais saboter dix ou quinze candidatures LFI, en leur refusant ce front républicain sous prétexte de leur immoralité, permet mécaniquement au RN de grappiller ces précieux sièges et d'atteindre ainsi la majorité absolue. Ainsi, on pourra crier haut et fort que l’on a tout fait pour empêcher l’accès du RN au pouvoir, que l’on est moralement irréprochable, mais que ce con de peuple en a décidé autrement… Il est impossible qu'un homme politique à ce niveau puisse ne pas avoir conscience de cela. Cela s’appelle du machiavélisme.