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Billet de blog 27 avril 2024

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Jean-Paul Delescaut, signe avant-coureur des futures répressions

Cette condamnation plus qu’alarmante, ainsi que les conditions particulièrement violentes de son arrestation, s’inscrit dans la foulée des répressions précédentes et annonce les répressions futures : Jean-Paul Delescaut se trouve à la croisée de plusieurs luttes.

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S’il s’en trouve pour l’ignorer, Jean-Paul Delescaut est un responsable CGT condamné à 1 an de prison avec sursis pour avoir osé recontextualiser l’attaque du Hamas du 7 octobre. La répression judiciaire, extrêmement lourde, dont il est victime, et sa mise en miroir avec la répression intolérable qui s’abat sur les voix qui s’émeuvent du sort des Palestiniens (qui n’a rien à voir avec le fait d’être « pro Palestine » qui souvent sonne comme l’équivalent de « pro Hamas » dans les médias de propagande) et critiquent le gouvernement israélien est déjà largement commentée. Aussi, cela ne sera pas le propos ici.

Cette condamnation plus qu’alarmante, ainsi que les conditions particulièrement violentes de son arrestation, s’inscrit dans la foulée des répressions précédentes (notamment celle des Gilets Jaunes) et annonce les répressions futures : Jean-Paul Delescaut se trouve à la croisée de plusieurs luttes, et là réside peut-être la raison de ce verdict ahurissant.

En premier lieu, les luttes sociales. Nous connaissons les violences policières et judiciaires qu’ont subies les Gilets Jaunes et les opposants à la contre-réforme des retraites. Les militants CGT en paient encore le tribut puisqu’ils connaissent, au sein de leur entreprise, la répression syndicale. D’autres syndicalistes, notamment à Solidaires, connaissent le même sort. En d’autres termes, le statut de salarié protégé, seule garantie de l’indépendance syndicale et de défense de tous les salariés, est menacé dans les faits. Tout ce qui peut engendrer la soumission à notre gouvernement inique est bon à prendre.

En second lieu, le combat humaniste. On a beaucoup parlé, ces derniers temps, de deux poids deux mesures. Frédéric Lordon a écrit un texte somptueux dans son blog du monde diplomatique sur la question : l’iniquité s’étale sans vergogne sur la place publique, les puissants misant sur leur totale impunité. Mais par humaniste, sont visés aussi bien les individus sensibles aux souffrances de leurs congénères que ceux désireux de se forger leur propre opinion par l’observation et l’étude. Et quand les manifestations de solidarité et d’empathie envers les souffrances du peule palestinien, à Gaza ou en Cisjordanie, ont été purement et simplement interdites, des universitaires, pourtant spécialistes de la question, et qui tentaient une approche rationnelle basée sur les faits et une méthode académique, ont été interdit d’expression ou même sanctionnés. Suite à cela, il a été beaucoup dit, à juste titre, que la liberté d’expression était gravement menacée en France. Or sans liberté d’expression, il est bon de le rappeler, les pensées ne circulent plus ou moins bien, et c’est donc la liberté de penser qui est à son tour attaquée. Sans pensée critique, la soumission devient plus facile.

En troisième et dernier lieu, le combat politique. Il est impossible de séparer la condamnation de Jean-Paul Delescaut des convocations de responsables politiques de Révolution permanente, du NPA ou de la France Insoumise, puisqu’elles s’appuient sur le même motif : apologie du terrorisme. Il y aurait beaucoup à dire sur la qualification elle-même et sur cette loi que nous devons au très prolixe Bernard Cazeneuve (PS), également auteur de la loi souvent appelée « permis de tuer ». Ici, le but et de disqualifier, en les associant au terrorisme, des formations de gauche critique, et qui proposent un projet de société en rupture avec le capitalisme. Autrement dit, après Tina (there is no alternative), voici que se profile TINOT (there is no other thought). En bon français, cela s’appelle le totalitarisme. Et, par définition, toute voix discordante en pâtira. Qui sait qui, demain, tombera sous le coup de la loi ? Les écoterroristes ? Les terroristes intellectuels ? Des terroristes non encore identifiés qui, par exemple, oseront réclamer un partage des richesses ?

Ce durcissement des instances dirigeantes est destiné à s’amplifier, puisqu’il s’inscrit dans une dynamique que l’on peut au moins faire remonter à Sarkozy, et qui s’est considérablement accélérée sous Macron. Les enjeux débordent donc largement la solidarité envers les civils palestiniens. A cette aune, la candidature « quel qu’en soit le prix » de Fabien Roussel à la présidentielle, et l’éclatement de la NUPES aux élections européennes sont un véritable désastre. Seule une alliance et un engagement de toutes les forces du « peuple de gauche » peut faire échec à la tyrannie qui, à terme, menace. Davantage même : ce combat concerne tous les démocrates convaincus, quel que soit leur bord. Et s’il appartient à chacun de nous de s’engager, ceux qui en ont davantage le pouvoir se doivent d’organiser une riposte à la hauteur des enjeux.

en complément :

C'est la liberté d'expression qu'on veut censurer (Médiapart)

La France est-elle en marche vers le fascisme? (Blast)

Appel à mobilisation : pour la liberté d’opinion et contre la censure (Les invités de Médiapart)

Clarification (Frédéric Lordon, Monde diplomatique)

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