Djamel BELAID Avril 2025
"TASSAOULETTES" ou autrement dit questionnement.. Questionnement, pour ne pas dire craintes. Tentative d'analyse de la politique céréalière actuelle du ministère algérien de l'agriculture et du développement rural (MADR).
Il faut rappeler qu’à l’occasion de son dernier entretien avec des représentants de la presse nationale, le président Abdelmadjid Tebboune a lancé un appel aux compétences locales. Un appel à l'image de ce qu'ont réalisés les cadres algériens pour la réalisation des dernières stations de dessalement d'eau de mer. Un appel auquel on ne peut que souscrire et se féliciter.
AGRICULTURE, LES COMPETENCES LOCALES ECARTEES
Il s’agit d’être clair. En matière d’agriculture, les compétentes nationales sont laissées de côté. C’est notamment le cas dans le domaine des grandes cultures. En cause, principalement l’option de « l’agriculture saharienne » prônée par les plus hautes autorités du pays.
Certes, en matière de céréales, il y a lieu de se féliciter des mesures de soutien à la production, des renforcements des capacités de stockage et de la préparation logistique de la prochaine récolte.
Cependant, à propos de l'objectif d'autosuffisance en orge et en blé dur et plus généralement concernant les céréales on observe seulement des mesures de financement, d'approvisionnement et de logistique, mais rien du point de vue agronomique. Où sont les mesures pour s'adapter au changement climatique et à la perte de fertilité des sols ? l n’y a rien de prévu, et c’est à ce niveau que nos craintes sont les plus grandes. Il y a la croyance en ce que seule l'irrigation nous sauvera. Cela reste à prouver.
DES DEFIS NOMBREUX
Parmi les défis, il nous semble urgent de réduire les coûts de culture et de s'adapter aux changements climatiques.
Une des solutions consiste dans l’agriculture de conservation avec l'abandon du labour et son remplacement pour le semis direct. Or, il n'y a rien de tout cela au niveau du ministère de l’Agriculture (MADR). Parmi les défis, il y a l'amélioration du semis avec le roulage pour parer aux sécheresses automnales notamment avec utilisation de Press Wheel sur les semoirs. Cela n’a rien d’anecdotique. Traditionnellement, les agriculteurs attendent la pluie pour semer, mais cette stratégie se traduite par des semis tardifs. Conséquences, des chutes de rendement et des emblavements en dessous des objectifs initiaux.
Autres chantiers : la réduction des doses excessives de semis et la lutte contre les pertes d’azote sous formes gazeuses. La volatilisation de gaz sous forme d’ammoniac fait perdre jusqu’à 40 % de l'azote des engrais azotés (urée).
Les cadres de terrain auront certainement noté d'autres sujets urgents comme par exemple la perte de fertilité des sols du fait des exportations hors des parcelles des pailles et des chaumes pour les besoins de l'élevage. Des questions non abordées au niveau du MADR et même au niveau de la CNA (ce qui est étonnant). Ceci est un non-sens, car c'est au MADR de fixer un cap. On ne peut accuser le ministre. Ce diplômé en économie, spécialisé en planification fait ce qu'il peut en fonction de ce qu'il sait et de ce qu’il a expérimenté durant sa riche carrière. Mais ce n'est pas un technicien, au sens de la technique agronomique. Aussi, c'est à son entourage de lui apporter un éclairage agronomique, un rôle dévolu principalement à l'Institut Technique des Grandes Cultures (ITGC).
Le fait de ne pas aborder ces importantes questions agronomiques est grave. Il obère le développement futur des cultures céréalières. Cela l'est d'autant plus que le secteur agricole présente la chance d'avoir un ministre qui dispose d’un certain poids politique du fait de la confiance que semble lui accorder le chef de l’Etat. Un staff technique de haut niveau à ses côtés permettrait de créer un tandem gagnant...