Le Grand Paris Express a été mis sur les rails, lors du discours solennel tenu par le président Sarkozy il y a bientôt 12 ans. Il s'agissait, comme il se doit, de faire dans le grandiose, dans l'épate technologique, bref une réalisation digne de la légendaire "grandeur de la France". Il était proclamé que ce métro automatique passerait pour partie en sous-sol et aurait la forme d'un grand huit. L'annonce avait de quoi étourdir les esprits, un peu comme une attraction foraine de la fête à Neu-Neu. Le génie français de l'organisation territoriale et celui du bâtiment allait connaître, après l'épopée du tunnel sous la Manche, une nouvelle occasion de s'illustrer et de nous valoir de remporter de nouveaux contrats à l'international.
Demain matin des travaux liés à ce super métro doivent reprendre juste à côté de la ZAD. Si nous nous sommes implantés là, c'est justement parce que nous avions appris par la bande que ce chantier devait reprendre. Les engins reviennent demain pour poser les fondements d'une voie d'accès au futur chantier et pour finaliser des études de sol. Pendant ce temps, la machine de l'Etat se creuse les méninges pour proposer au gouvernement une décision que l'on espère la plus sensée possible. Car le chantier reprend alors que, comme le dit lui-même Monsieur Dallard (le président du directoire de la Société du Grand Paris), il est dans l'attente de savoir ce que le gouvernement va décider au juste. Nous nous félicitons d'ailleurs d'avoir pas qu'un peu contribué à la délibération publique sur l'aménagement de ce territoire autour de l'aéroport de Roissy. Dans son article du Monde (publié en ligne le 13/02), Denis Cosnard souligne en quoi la ZAD a accéléré la prise de conscience des enjeux de la construction de cette gare. Il ajoute qu'après des années de contestation, tout à coup l'agenda s'emballe, ce qui aboutit même pour certains à une remise en cause en profondeur du schéma initial : c'est désormais carrément l'intérêt de la ligne 17 nord dans son ensemble qui est sur la table. Il faut comprendre que c'est la création de deux grand pôles d'activités qui motivait essentiellement la construction de cette ligne : Europacity et le Terminal 4. Europacity a été abandonné par le président Macron en novembre 2019. La construction du Terminal 4 à Roissy (qui aurait abouti à augmenter le nombre de vols de Roissy du volume de celui d'Orly) semble aussi avoir été définitivement écartée cette semaine.
Le journaliste du Monde dans une phrase que j'espère involontairement maladroite écrit à propos des zadistes : "Pour eux, pas question d’une gare perdue au milieu des champs, ni d’une gare tout court !". On l'aura peut-être mal renseigné. Les zadistes, même s'ils sont divers, ne comportent pas en leur sein des esprits arriérés et bornés qui ne jureraient que par le transport à cheval. La ZAD a été décrétée parce que tous les efforts poursuivis par le Collectif pour le Triangle de Gonesse pendant une dizaine d'années pour que les dernières terres agricoles de ce secteur soient préservées n'ont rien fait d'autre, hélas, qu'alimenter les tergiversations des gouvernements successifs. Ce collectif considère qu'il aura rempli sa mission lorsque ces terres seront préservées et serviront à un projet de redynamisation globale du territoire (projet CARMA-Pays de France). C'est la ligne qu'a d'ailleurs semblé soutenir la ministre Pompili lors d'une récente intervention au Sénat.
Puisqu'il semble que l'on nous reconnaisse de contribuer à la bonne conduite des affaires publiques et que Madame Pécresse ose prétendre que nous portons tort à "1,5 million de Franciliens", nous souhaiterions qu'un institut de sondages à la méthodologie indiscutable lance une étude sur Gonesse et les communes avoisinantes sur l'usage que pourraient faire les habitants de cette gare perdue loin des habitations. Cela supposerait évidemment de prendre la peine d'expliquer au préalable aux personnes sondées où serait localisée cette gare, car pour le moment la plupart n'en ont pas une idée claire.