Lien d'une interview du docteur Patrick Bouet, président du Conseil national de l'Ordre des médecins.
Mon commentaire corrigé et complêté, l'original étant publié sur le site www.allodocteurs.fr à la suite de l'interview du bon docteur Bouet.. (lien ci dessus) :
A 2.20min sur la vidéo de France5, mon confrère le Dr Patrick Bouet, nouveau président du Conseil national de l'Ordre des médecins, parle de ma suspension, invité qu'il y est par Michel Cymès.
Je me félicite, qu'enfin (du moins sur le papier car je ne le connais pas), un médecin généraliste soit président de l'ordre, c'est un signe fort en direction d'une spécialité qui a actuellement besoin de soutien.. J'ai également appris qu'il exerçait en Seine Saint Denis, ce fameux "9-3" dont on parle tant lorsqu'on évoque les déserts médicaux urbains dans les zones dites "difficiles", ce qui nous rapproche tous les deux, le quartier de Roubaix dans lequel je me suis installé en 1994 étant également sinistré de la même façon (même pire, pourtant sans "publicité" aucune pour lui venir en aide, ni subventions, grasses, aux médecins généralistes pour qu'ils y restent...en "abattant" plus de 15000 actes/an...sans danger?).
Je remercie également mon confrère de "ne pas se prononcer sur le fond" de mon affaire, ne la connaissant pas, c'est très "sport" de sa part, à l'inverse de ce conseiller départemental de Lille, ne la connaissant pas plus, qui s'est permis de me diffamer en proférant contre moi aux journalistes des accusations passées dans la presse, qui pourtant avaient été supprimées du dossier d'accusation, avec d'ailleurs beaucoup de mal (Cf. plus loin les raisons), concernant la prise en charge des toxicomanes et les prescriptions de subutex (la toxicomanie, un véritable problème qui gangrène les populations jeunes de tous les quartiers dits "sensibles", à Roubaix comme dans le "9-3" et pour lequel très peu de médecins se risquent à essayer de s'investir un minimum).
Néanmoins, je ne suis pas du tout mon confrère président lorsqu'il affirme que le médecin traduit devant la SAS à tous les outils pour se défendre et convaincre ses juges! Précision technique: cette juridiction qu'on appelle la section des assurances sociales du conseil de l'ordre (la SAS) siège au conseil régional en première instance puis s'il y a lieu en appel au conseil national à Paris (ce qui a été mon cas). Le médecin s'y voit traduit suite à un "contrôle d'activité" effectué par l'assurance maladie à l'échelon local (CPAM), se terminant par une plainte pour "escroquerie" par versement aux professionnel de santé d'honoraires indus, au moyens de toutes sortes de méthodes que la CPAM et surtout son service médical (médecins conseils dirigés par un médecin chef) s'efforcent durant des mois de démontrer, coûte que coûte.
C'est donc la sécu qui "cible" les fraudeurs ("délits" purement statistiques en grande majorité, dénonciations parfois...etc.), instruit l'enquête puis juge le médecin à la SAS, en lieu et place et en présence de deux membres du conseil de l'ordre des médecins.
Le problème est que la sécu est dans toute l'affaire juge et partie (seule exception dans toute la juridiction française) et que c'est surtout elle qui réalise l'instruction, sur étude de dossiers, d'entretiens avec des patients, puis d'entretiens avec le médecin (auquel elle reproche des "griefs) qualifiés "d'entretiens contradictoires".
Avant d'être convoqué à ces entretiens contradictoires, le médecin accusé reçoit des tableaux et feuillets classés par "griefs" , documents dans lesquels le médecin conseil de la CPAM chargé du contrôle résume une situation qualifiée par lui d'anormale, par exemple il relate un entretien avec un patient disant ne pas se souvenir vous avoir vu tel jour alors que sa carte vitale est "passée", ou une ordonnance qui serait un peu trop chargée ou inappropriée, ou encore dangereuse (selon des critères dont seule la sécu a le secret..) ...etc.
Le médecin accusé a la possibilité d'avoir le nom des patients mais en aucun cas les pièces originales (ordonnances ou attestations ou autres) dont le médecin conseil a uniquement résumé, ce qui pour lui semblait anormal.
On demande donc au médecin accusé, lors de ces entretiens contradictoires, de se justifier sur des anomalies "en général" que le médecin conseil dit avoir détecté dans une période donnée, sans avoir plus de précisions, sans avoir surtout le document original sur lequel ensuite sera basé la plainte elle même.
Toute défense précise et efficace est donc très difficile, voire le plus souvent complètement impossible, surtout lorsque le médecin conseil, et ce n'est pas moi qui le dit, se comporte comme un policier inquisiteur, souvent agressif (surtout avec les patients les plus fragiles..), interprétant systématiquement le moindre fait contre le médecin accusé. Un incroyable "guide du médecin conseil contrôleur" leur est même fourni par la CNAM, guide qui pourrait être rebaptisé : "coincer un médecin coûte que coûte pour les nuls" (je le publierai sur mon blog...)
Cette macabre mascarade organisée (déjà comparée à quelque chose de pire qu'une garde à vue) est dénoncée depuis de très nombreuses années par tous les syndicats de médecins. Cela le docteur Bouet ne peut l'ignorer.. Même la CNAM et son président Frédéric Van Rockeghem sont conscients du "malaise" et ont admis que cela était anormal (pour ne pas dire "illégal") et une "charte de bonne conduite" à l'attention des médecins conseils contrôleurs a de ce fait été rédigée par FVR, signée par lui et certains syndicats, mais il est établi qu'elle est largement bafouée par les CPAM. FVR reste muet face aux perpétuelles dénonciations par les syndicats signataires de cet irrespect.
C'est à l'issue de ces entretiens honteusements qualifiés de "contradictoires" qu'un rapport est fait par le médecin contrôleur (plus que "conseil"..) à son supérieur "médecin chef" et que la plainte est établie! En fait il y a toujours 2 plaintes, une du médecin chef représentant le "service médical" près la CPAM et une du directeur de la CPAM (qui a reçu un rapport du médecin chef..). Ces plaintes sont ensuite directement transmises au conseil régional de l'ordre des médecins. Le Médecin chef réclame (franchement..) une suspension du médecin controlé. Quant au directeur il supplie (lourdement) une suspension aussi, mais également une condamnation pour escroquerie qui lui permettra, via le transfert de sa plainte au civil (correctionnel), de punir financièrement le médecin et donc au moins de récupérer les coûteux frais d'instruction par la CPAM : 15.000€ / 6mois de contrôle, au minimum (pour moi ça a duré 4 ans..).
D'un avis général, de tous les syndicats médicaux et de tous les avocats spécialisés dans la défense des médecins le "contradictoire" dont parle mon confrère le docteur Bouet est bafoué. Cela, le Docteur Bouet ne peut pas l'ignorer. Le fait de ne pas en parler et de ne pas rester sur la réserve jusqu'au bout n'est pas très sport, ni honnête, ni confraternel, d'autant plus que ce sont actuellement beaucoup de médecins généralistes en suractivité dans des déserts médicaux qui sont traduits et condamnés trop souvent abusivement devant les SAS, dont on sait qu'une refonte complète, voire leur suppression au profit d'une juridiction indépendante serait d'actualité.
Pas très sport, hein, cher confrère président, de parler de la possibilité d'un "contradictoire" pour me défendre et qui n'a pas "convaincu"..
Je suis sur que vous ne m'en voudrez pas si je vous dis même que vous êtes "un peu culotté"..
J'espère et attends, comme beaucoup de mes confrères généralistes, beaucoup mieux de vous, vous en avez le temps car vous êtes tout frais émoulu dans votre fonction. Au travail!
Les références à mes propos sont :
- les sites des syndicats suivants : 'FMF' (Fédération des Médecins de France), 'Union Généraliste' et MGFrance …etc. (désolé de ne pas tous les citer)
- les articles et excellents billets du docteur Marcel Garrigou Grandchamp,
- les articles, le blog et les vidéos de l'avocat spécialisé dans la défense des médecins Maitre Fabrice DiVizio,
- saisir dans un moteur de recherche les mots clés SAS, Section des assurances sociales, contrôles d'activité des médecins par l'assurance maladie/les médecins conseils et leurs entretiens contradictoires…etc.
- et aussi, même si c’est long mais très exhaustif : le guide du médecin contrôlé, disponible librement sur le web, et quand vous en verrez la date d'édition, sachez que rien n'a changé!
Docteur Christophe LAMARRE - Roubaix