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Un de ces baby-boomers tant décriés.. L'important est ailleurs. Dire d'où politiquement on parle. Quelque part entre Marx, Bakounine, Murray Bookchin et Wendy Brown mais aussi Ursula LeGuin et Jackson Browne.

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Billet de blog 12 septembre 2015

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Corbyn, et maintenant

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Maintenant que Jeremy Corbyn est élu, et bien élu, à la tête du parti travailliste que peut-il se passer ?

Après le déluge de délires auto-satisfaits de tout ce que le monde compte d'intellectuels de gauche bien dans leurs pantoufles qui ont vite oublié leurs enthousiasmes grecs viendra le temps des réalités. La nouvelle équipe sera confrontée à une tâche simple mais difficile : faire fonctionner et si possible avancer le parti et avec lui toute la gauche britannique. L'établissement travailliste repose principalement sur ses parlementaires massivement blairo-hollandisés. Les élections générales, dont le choc a conduit à la victoire de Jeremy Corbyn porté par un réel mouvement, ont installé ces députés en place de manière durable, en principe pour une législature de 5 ans. Au-delà des protestations de fidélité et d'unité de la plupart les coups bas et les dénigrements ne vont pas manquer. Quelques uns vont marquer leur distance, par exemple en démissionnant  du gouvernement fantôme afin de ne pas s'exposer publiquement dans l'espoir qu'on ne les taxe pas d'irréalisme économique, de naïveté, en un mot qu'on ne puisse les soupçonner d'être de gauche. La difficulté de mener la contre-offensive demandera un certain sens tactique et pas mal d'énergie. Corbyn et les siens devront simultanément s'appuyer sur les forces qui ont soutenu sa candidature de manière à ce que le mouvement ne retombe pas et négocier avec l'appareil et les notables du parti, dont les trois candidats heureusement largement battus ce qui les rendra plus réceptifs. Ed Milliband avait très timidement fait quelques pas dans la direction de la réforme. Le plus visible réside dans la réforme du mode d'élection du chef du parti. Cette évolution a sans aucun doute facilité l'élection de Jeremy Corbyn en donnant plus de poids aux adhérents même de fraîche date. Le positionnement politique devra être clarifié non pas tant sur les points fondamentaux qui sont connus mais sur ceux qui conditionnent la construction d'une image de long terme de parti cohérent.

Les trois principaux postes du parti (leader, leader à la chambre et candidat à la mairie de Londres) sont occupés par des hommes. La nécessité de la féminisation de direction active des opérations est soulignée par la quasi totalité des médias.

Le parti écologiste (Greens) a fait illusion au début de la campagne des élections législatives. Que son score n'ait pas vraiment évolué au bout du compte ne signifie pas que ses thèmes ne soient pas opérant dans l'opinion. La conjoncture (COP21, actualité des problèmes climatiques, gouvernement conservateur très peu mobilisé sur ces sujets) en rend obligatoire la prise en compte dans le programme du principal parti d'opposition, candidat naturel à l'alternance. Cette prise en compte devrait crédibiliser le parti que ce soit par l'inclusion directe de mots d'ordre écologistes dans le programme ou par une tentative d'alliance avec le parti écologiste.

Le débat politique au Royaume-Uni sera largement polarisé pour des mois par la question du référendum sur l'appartenance à l'Union européenne. L'élection de Jeremy Corbyn  change de manière inattendue la donne. Bien qu'il ai par nécessité tactique de campagne au moins mis la sourdine à son euroscepticisme, peut-être d'ailleurs un peu trop souligné par tous les commentateurs bien contents de trouver là matière à discussion, il reste le dirigeant travailliste le plus ouvertement dubitatif vis-à-vis du caractère positif de l'Union. Ce débat prend parfois des tours inattendus pour nous. La discussion sur le futur traité transatlantique (TTIP) me semble plus vive de l'autre côté de la Manche qu'en France. Elle rencontre le débat sur le système de santé (NHS, National Health System) qui a fourni la matière d'affrontements parmi les plus sérieux de la campagne électorale. Des acteurs importants du système de santé défendent l'inclusion de la santé dans le champs couvert par le TTIP. Ce TTIP étant clairement perçu comme la chose de l'Union mise en musique par la Commission européenne la défense du système de santé qui est une des fiertés britanniques devient un argument supplémentaire des partisans du retrait de l'Union. Suivre l'évolution du dossier européen au Royaume-Uni semblait déjà intéressant auparavant, cela risque d'être maintenant à la fois passionnant et sujet à possibles rebondissements.

La question de l'unité du royaume a été mise sur la table par le référendum écossais de 2014. Elle s'y trouve toujours. La crise actuelle du parlement nord-irlandais (Stormont) ajoutée aux bonnes relations connues de Jeremy Corbyn avec les dirigeants du Sin Fein (Martin McGuinness, Gerry Adams) peut accélérer le débat. La question écossaise risque de rester épineuse et montrera l'aptitude de Jeremy Corbyn à traitre les sujets purement politiques. Le SNP a balayé le parti travailliste sur le territoire écossais. Beaucoup doutent de la sincérité de long terme de l'engagement progressiste du parti écossais qui tire avantage de son positionnement social-démocrate (plus que de gauche) dans son affrontement avec un gouvernement anglais dominé par les conservateurs. Qui peut dire ce qui l'emportera dans la ligne du SNP s'il faut un jour choisir entre le progrès social d'une part et l'autonomie ou l'indépendance de l’Écosse d'autre part? Le dilemme symétrique existe au parti travailliste. Doit-il absolument préserver l'unité du royaume, présentée pour l'occasion comme le meilleur cadre de la démocratie sociale pour tout le monde y compris la population écossaise, ou accepter de collaborer avec un parti frère (ou cousin) de l'autre côté de ce qui pourrait devenir une frontière d'état ?

Enfin des voix commencent à se faire sérieusement entendre sur un thème pourtant jugé définitivement obsolète : la réindustrialisation du pays. Malgré le caractère incongru et obscurément économique  de la proposition là git peut-être le plus important des possibles débats de long terme à mener pour la nouvelle direction travailliste.

Bon courage Jeremy.

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