Je continue à suivre la participation aux primaires. Il s'est passé quelque chose de nouveau à New-York. Habituellement les électeurs républicains se mobilisent mieux que les démocrates. Ici le résultat est inverse : 1790083 pour les démocrates et 857250 chez les républicains. Il faut prendre en compte plusieurs biais contradictoires : les règles de la primaire démocrate qui ont sans doute limité la participation des supporters de Sanders ou l'opinion dominante dans l'état -ne pas confondre avec la ville- qui favorise le camp démocrate.
Peser le poids des différents facteurs n'est pas facile. LA victoire de Trump en sort relativisée. L'enseignement le plus important est l'échec de Cruz qui avait orienté largement sa campagne contre "les valeurs de New-York", confondant sans doute un peu la ville avec l'état. Celui-ci comporte en effet une vaste zone rurale entre l'océan et les lacs et des villes de l'Ouest -Buffalo par exemple- des territoires industriels dévastés par la désindustrialisation et les effets des accords de libre-échange, typiquement favorables à Trump et Sanders. Cruz sortant sans nouveau délégué de cette phase devient de moins en moins crédible. L'espoir des dirigeants du parti républicain va sans doute devoir se reporter sur John Kasich qui sert toujours à grappiller des délégués qui ne vont pas à Trump dans l'espoir d'une convention contestée. Le désarroi patent de cette direction républicaine ne peut qu'étonner. Aucune stratégie anti-Trump articulée ne s'exprime, au contraire. La réaffirmation par Paul Ryan de son manque d'intérêt peut n'être qu'une posture du genre "Retenez-moi ..." mais elle ne contribue pas à mobiliser les troupes. De plus en plus de commentateurs écrivent qu'il est trop tard pour arrêter la marche de Trump vers la candidature avec à la clé un chamboulement du parti.
Du côté démocrate il est clair que l'objectif est maintenant de trouver la bonne sortie de l'affrontement entre les deux postulants, et ceci quelque soit le vainqueur, dont je pense que ce sera Clinton. On constate ici aussi des facteurs contradictoires. L'équipe de Sanders est maintenant confrontée à des choix décisifs. Quel est l'objectif ? Devenir le prochain président, objectif peut-être à courte vue. Ou marquer en impulsant un nouveau mouvement qui s'implante à la fois dans le parti démocrate et surtout dans la société. Reste la préoccupation immédiate ou presque : gagner l'élection, et donc faire élire Clinton quoi qu'on pense de ses limites et de ses défauts. Ceci implique de rassembler les partisans de Bernie Sanders derrière Clinton en novembre. Ces partisans, assez hétéroclites, souvent très remontés envers tout ce qui ressemble à l' "establishment" ne sont pas faciles à appréhender et seront sensibles à un mouvement d'ensemble. Une personne clé va jouer un rôle dans ce rassemblement : Elizabeth Warren. La figure par excellence de la gauche parlementaire a refusé jusqu'à présent de soutenir l'un ou l'autre des candidats aux primaires démocrates -elle aurait été ma candidate préférée- ce qui la met en position pour rassembler à partir du moment où la compétition aura pris fin entre Clinton et Sanders. Il est logique que dans la perspective de construction du mouvement Sanders continue sa campagne jusqu'à la convention du fait même que l'objectif prioritaire n'est pas la nomination mais quelque chose de plus important et efficace dans le long terme.
Et n'oublions que les primaires ne sont pas les seuls événements en cours. La semaine passée a vu bien d'autres choses se passer, peut-être bien plus importantes. Suivez donc "Democracy awakening".