Ce n’est pas la dérobade devant vos responsabilités qui fait de vous un renégat, c’est l’abandon de vos idées, leur relégation derrière un mur de respectabilité.
Un soupçon d’attachement à un pouvoir, une once d’intérêt stratégique, une tête qui tourbillonne et finit par entrainer tout le corps. Tourner le dos, se voiler la face, préserver la façade, coûte que coûte, malgré tout, quelle que soit la taille de la couleuvre, déglutir l’immonde. J’avais pour habitude de dire, pour rire, à une amie un peu langue de vipère « n’avale surtout jamais ta salive tu pourrais en crever ! » mais c’était un venin bien bénin, comparé à celui que doit avaler aujourd’hui Madame Taubira.
Vous étiez l’une des rares politiques qui m’inspirait le respect.
Probablement plus parce qu’attaquée pour de mauvaises raisons, parce que sujette au racisme ordinaire, celui qui condamne toute parole parce qu’émanant d’une femme, d’une noire, que parce que je vous croyais capable de bouger les choses.
Il faut bien se rendre à l’évidence, vous vous cramponnez à un mandat, comme tous et c’est bien là le signe d’une abjuration.
Pourtant, tout n’est que symbole, vous le savez Madame.
Et quel merveilleux rendez-vous avec la Fraternité vous offrait le calendrier, 2015 Noël et Mawlid seront célébrés le même jour.
La célébration de la naissance des deux prophètes, Jésus et Mahomet, en deux mille ans cette coincidence ne s'est produite que deux fois.
Opportunité de communion de deux communautés que l’on voudrait opposer, la Chrétienté et l’Islam.
Je ne suis d’aucune église mais je pense que la vie nous proposait une pause, je sais qu’une trêve était possible.
Quelle couleur sombre posée sur votre trahison Madame.
Je vous espérais naïvement St Just, débarrassée de la terreur, mais inspirant la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen, vous n’êtes que compromission, vous aussi.
Ainsi, vous acceptez de défendre l’infamie.
Ainsi, vous abjurez pour figer l’injustice, pour promouvoir l’inégalité.
Certes, la mesure de la déchéance de nationalité est purement symbolique, mais justement, c’est pour cela que la trahison est criarde.
Certes, la France a peur, comme aurait dit Gicquel, mais elle n’a peur que d’elle-même, elle n’a peur que de ce qu’elle engendre, un Homme politique, qui en l’occurrence peut être une femme comme une autre, sait cela.
L’état d’urgence aura eu raison de vos certitudes, de vos convictions, de votre honneur.
Une désillusion de plus et çà fait différence.
Y rester coûte que coûte, mais pour défendre quoi ?
Pour administrer un ministère qui ne servira bientôt plus qu’à gérer des prisons, puisque de la Justice faisons fi, il y a état d’urgence.
Pour délivrer une parole libre, mais bâillonnée par les abjurateurs de gauche? Pour défendre l’indéfendable ?
Parce qu’on combat mieux de l’intérieur en obéissant que de l’extérieur en condamnant ?
On ne peut même pas dire que vous avez été désavouée, vous vous êtes désavouée vous-même!
Ah, j'oubliais, vous étiez le rempart, le fameux rempart à l’exclusion, la caution que tout reste possible, la garantie morale du respect des valeurs de la République.
Trente ans qu’on en mange.
Trente ans que l’on nous sert des Ministères hochets, otages, qui sont autant de prétextes à nous endormir, de magnifiques mirages à bobos.
Ministère des femmes, ministère de l’écologie…Vous avez senti la cause des femmes progresser ces dernières années ? Vous avez vu ce qu’ils font de notre planète ?
On ne peut faire aucun compromis quand il s’agit de Liberté.
Résistons.
Ne nous murons pas maintenant.