Pour la recherche-action, en vrac, quelques hypothèses et idées générales.
- quelqu'un qui vient de l'extérieur a des besoins, des attentes en lien avec ce qu'il a pu connaître ailleurs ou ce qu'il est venu chercher sur ce territoire. S'il se sent légitime, il participera à créer un environnement qui lui convient (services, cultures, commerce...).
- sur certains territoires, la collectivité (institutionnelle ou "société civile") est prête à voir évoluer ce territoire sous l'impulsion de nouveaux arrivants.
- un certain accueil collectif (associations ou instance territoriale) permet d'accorder aux arrivants une légitimité à agir dans le collectif.
- Dans d'autres territoires, d'autres milieux, d'autres lieux, d'autres moments, les personnes ne veulent pas accueillir ceux qui pourraient modifier le territoire doté d'un certain équilibre (si instable soit-il. Surtout s'il est vécu comme instable).
- Or par leur simple présence, les nouveaux arrivants créent une "émotion", un mouvement, sur le territoire. Si le territoire, les personnes qui sont déjà là n'ont pas décidé d'accueillir ce mouvement, cela va provoquer un mouvement contraire, de rejet pour essayer de rester à la situation de départ.
- or cette situation est déjà bousculée, il n'y a pas de retour possible, il ne peut donc qu'y avoir un rejet accentué par la frustration que "ce n'est plus comme avant".
- pour certains, être "autochtone", être d'ici, c'est comme être sur une micro-île battue par les flots. Rien ne doit bouger pour que l'île ne soit pas submergée. Les seules issues sont de rester immobile au risque d'y crever ou bien de quitter l'île pour survivre.
- Laisser quelqu'un y prendre pied peut être vu comme une chance de trouver une autre façon de la faire perdurer, de garder la tête hors de l'eau. C'est plus communément vu comme une destabilisation qui sera fatale.
- sur ces territoires ruraux, les personnes "autochtones" ont vu l'avantage d'être "d'ici" (cf. capital d'autochtonie, Nicolas Rénahy...) se dévaloriser énormément. Cela ne permet plus de s'en sortir, ne préserve absolument pas d'un avenir précaire, de l'obligation de migrer pour survivre (pas de travail sur place).
- ce qui a pu être un avantage est devenu un handicap dès qu'il s'agit d'aller ailleurs (parce qu'on est de ce territoire rural, on n'est pas ceci ou cela, on ne connait pas ceci ou cela)
- ceux qui arrivent pourraient avoir d'autres avantages (capital symbolique : études, réseaux urbains...) qui vont encore dévaloriser les "gens d'ici".
j'ai souvent comparé les positions défensives d'un monde agricole "conventionnel" (entendu ici par transmission familiale, ancrage local ancien...) aux positions défensives de jeunes banlieusards. Autant stigmatisés et du coup autant attaché à défendre son monde, en bloc.
En quoi l'action de territoires ou de collectifs qui prennent des moyens pour accueillir, voire aller chercher de nouveaux arrivants, ont-elles une incidence sur le regard porté sur l'autre ?
Est-ce que c'est parce que le lieu est déjà prêt à accueillir et accepter le mouvement que ces politiques sont possibles ? Ou parce que ces politiques sont mises en oeuvre que le mouvement devient acceptable ?
Dans le deuxième cas, est-ce que c'est une ouverture portée par des individus (un maire par exemple) ou par un collectif ?
Que nous apprennent les réactions aux projets de création de CAO ou bien les mouvements pour créer des lieux d'accueils de réfugiés ou de migrants ? Est-ce qu'il y a des différences en fonction de "l'autre" dont il est question ?
Est-ce que les politiques d'accueil volontaristes accroissent effectivement la légitimité des personnes accueillies ? Si oui, ça se traduit comment ?
Billet de blog 2 janvier 2017
Mouvement pour ou contre l'émotion
Accueillir ou rejeter l'autre, c'est accepter ou refuser le mouvement. Or la seule apparition de l'autre a déjà créé l'émotion qui est mouvement.
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