«De façon plus générale, la principale faiblesse de la loi travail est de ne pas suffisamment prendre en compte la faiblesse syndicale française, et les moyens d’y remédier. Pis encore : la loi travail comporte des dispositions susceptibles d’affaiblir encore un peu plus les syndicats et leurs représentants. C’est le cas notamment des mesures sur les référendums d’entreprise présentées dans l’article 10. L’objectif est de permettre aux employeurs d’imposer par référendum – et dans des conditions qui peuvent s’apparenter souvent à du chantage – des accords qui auraient pourtant été refusés par des syndicats représentant jusqu’à 70% des salariés de l’entreprise lors des dernières élections professionnelles. On comprend que la CFDT puisse dans certains cas y trouver son compte : cela peut lui permettre avec 30% des voix de contourner les autres syndicats, et en particulier la CGT, et de négocier directement un accord avec l’employeur. Il reste que ce contournement des élections professionnelles – qui ont lieu tous les quatre ans – revient à revenir en arrière sur les timides avancées démocratiques des réformes de la représentation syndicale qui venaient tout juste d’être mises en place en 2004-2008, et qui avaient donné pour la première fois aux syndicats réunissant 50% des voix le rôle décisif pour la signature des accords d’entreprise (alors que le régime antérieur permettait à chacun des cinq syndicats historiques de 1945 de signer des accords, quelle que soit leur représentativité dans l’entreprise, ce qui n’a guère réussi au modèle social français). Tous les exemples étrangers le montrent : la démocratie économique a besoin de corps intermédiaires. Ce n’est pas en renvoyant une bonne partie des syndicats et du corps social français dans l’opposition et la frustration que l’on sortira la France de la crise.»
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